Chapitre 31

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( TW : malnutrition )

Amélie


Après une promenade à pied qui m'a semblé s'étirer en une interminable odyssée, j'arrivai enfin aux portes du Moulin Rouge.

Cependant, je suis à peine entrée que les cris stridents de mon patron résonnent, éclatant avec une intensité telle qu'il semble se répéter à l'infini. Une inquiétude croissante m'envahit, alors que je me dirige d'un pas pressé vers son bureau, l'angoisse au ventre, afin de m'assurer que tout va bien.

- Non mais vous êtes complètement folles ! Voulez-vous ruiner l'image du Moulin Rouge ?! hurle mon patron, alors que j'ouvre la porte sans même frapper.

Je remarque la présence de certaines de mes amies danseuses dans la pièce, toutes ayant participé à la manifestation d'hier.

Mais bon sang que se passe-t-il ?

- Tiens, voilà donc notre chère Amélie ! Qui arrive en retard, qui plus est ! s'agace mon patron, en me regardant droit dans les yeux, furieux.

- Désolée, monsieur, mais puis-je savoir ce qu'il se passe ? je demande, perdue.

- Mon dieu, c'est un comble ! Mais c'est qu'elle fait vraiment comme si elle ne savait pas ! Non, mais vous êtes vraiment des incapables !

Il fait une pause dans ses exclamations furieuses en se frottant les sourcils, avant de reprendre :

Vous avez organisé une manifestation féministe ! Vous êtes vraiment des êtres ignobles, vous les femmes !

Étant donné que c'est mon patron, je reste le plus calme possible en entendant ces mots, essayant de ne pas exploser et lui balancer mon sac en pleine tête.

- Voir vos têtes de féministes m'énerve encore plus ! Vous êtes toutes virées, je ne veux pas de folles extrèmistes dans mon établissement ! déclara mon ancien chef.

Sur le moment, je me rends à peine compte des flots d'insultes qu'il déverse sur nous, car ma conscience est accaparée par la future absence de travail, de nourriture et d'argent. La pauvreté semble m'envelopper à nouveau, tel un mauvais rêve éveillé qui ravive les souvenirs douloureux de mon enfance...

Tandis que mes compagnes et moi tentons de faire entendre notre désespoir par notre immobilité, les gardes du corps s'avancent, nous prenant une à une pour nous évacuer, en murmurant des excuses que j'entends à peine.

Je poursuis mon chemin seule, confrontée à la brutalité du soleil qui s'acharne sur moi, me rappelant que je n'ai pas mangé depuis deux jours. Cette lumière implacable, loin d'être réconfortante, m'inflige un mal de tête lancinant, m'entraînant inexorablement vers l'obscurité. Je m'approche de ma maison, mais mes pas sont vacillants, et des taches noires dansent devant mes yeux fatigués...

Je m'octroie une pause sur le pavé rugueux, fermant les yeux un instant pour rassembler mes idées. Une profonde inspiration, puis l'autre, jusqu'à ce que je retrouve un semblant de clarté... Avec une détermination fragile, je fouille dans mon sac pour saisir mes clés et ouvrir la porte de ce refuge devenu familier.

Sans un regard en arrière, je la referme derrière moi, m'avançant au gré de mes pensées vers mon téléphone. Je compose le numéro d'André, que j'ai gravé dans ma mémoire, et m'installe sur le sol froid et dur, accablée par le poids de mes pensées.

- Je suis désolée de te déranger, André, mais ça ne va pas du tout... dis-je.

- Que se passe-t-il ? me demande André, complètement affolé par mon ton.

- Ils m'ont virée, André. Ils ont dit que c'était à cause de la manifestation... Je n'ai plus de travail, je n'ai plus d'argent, je n'ai plus rien dans mon frigo. Et tout ça, parce que je ne suis pas une bonne petite femme mariée à la maison qui a un mari qui subvient à ses besoins ! déclare-je, complètement épuisée par ma situation.

- Ne dis pas ça, mon Phoenix. Va plutôt te reposer, je dois quant à moi raccrocher, dit-il avant de me laisser seule avec mes angoisses, de retrouver à nouveau l'horrible pauvreté. 

La Pickpocket du Moulin RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant