Déjà dix-huit jours de rayons avec la bête. Nous sommes vendredi, rendez-vous hebdomadaire avec ma cancérologue.
— Madame Valet ! Comment se sont passées vos trois semaines de radiothérapie ?
— Appelez-moi Kristelle... Fatiguée, maux de tête mais supportables. Parfois, mon bras droit ne répond carrément pas. Même si ça ne dure pas bien longtemps, c'est assez gênant. Ah oui ! Me concentrer devient de plus en plus compliqué. Lire... je ne vous en parle même pas. Malgré tout, j'admets que vos petites pilules m'aident à tenir.
Elle prend des notes. J'ai l'impression d'être un cas expérimental.
— Pas de perte de cheveux ?
— Non ! J'ai même dit au revoir à mes foulards. Plus besoin de camoufler les traces de la chirurgie.
— Et le moral ?
Est-ce que je lui raconte mes pertes de contrôle quand je m'adresse à « la grosse Bertha » ? Cette dernière me scrute méchamment, toujours confortablement installée dans son fauteuil.
Ahhh ! Alors grosse vache ! On craint madame la cancérologue ? Bon à savoir. Je lui tirerais bien la langue mais j'ai bien trop peur que madame Mouffoir pense que ça lui soit adressé.
— Je me suis faite une nouvelle amie. Je l'ai rencontrée dans le service. C'est une patiente elle aussi.
Je vois bien que ma réponse n'est pas celle qu'elle attendait. Elle se lève, se sert un café et m'en propose un. Je l'accepte pour gagner du temps. Je sais qu'elle ne va pas en rester là.
— Vous vous voyez régulièrement ?
— On essaie, oui.
Allez vas-y, pose-la ta question.
— Et votre famille ? Votre entourage ?
Bingo ! En plein dans le mille.
— Je les vois aussi.
— Madame Valet ! Kristelle... Vous savez très bien où je veux en venir.
Je croise les bras sur ma poitrine, prête à en découdre. J'ai lu quelque part que, dans le langage corporel, cette position traduisait l'autodéfense et la détermination. Parfait ! C'est justement le message que je voulais lui faire passer.
— Vous ne leur avez encore rien dit. Je vois...
Effectivement, très efficace. J'ai au moins gagné cette manche-là.
— J'y travaille. J'attends tout simplement le bon moment. Et justement, j'ai quelques petites questions à vous poser pour mettre au point mon approche.
Je lui parle de mon projet de vacances et mon intention de réunir tous ceux que j'aime. Elle semble tout à coup rassurée et détendue.
— C'est une excellente idée.
— Mais pour mon protocole ?
— Quand comptez-vous partir ?
— Juillet.
Elle tourne son regard vers son écran d'ordinateur, prend quelques secondes et me répond.
— Vous aurez à ce moment-là trois mois de rayons. Ce sera le bon moment pour faire une petite pause de quelques semaines. Sans arrêter bien évidemment le "Temodal" et vos vitamines.
— Donc, c'est possible !
— Je dirais même préconisé par votre cancérologue ! Ça ne peut que vous faire du bien. Bien sûr, nous recommencerons votre radiothérapie à votre retour. Il était de toute façon prévu que je vous propose une coupure pour que votre corps puisse souffler un peu. Il faudra également envisager, si c'est possible, une neurochirurgie. En espérant qu'on puisse accéder à votre tumeur.
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Une année...le reste d'une vie
ChickLitKristelle voit son monde s'écrouler. Sans son autorisation, une tumeur s'est infiltrée dans son cerveau. Le verdict est sans appel. Il ne lui reste qu'une année à vivre. Sa première intention face à ce cataclysme est de ne rien divulguer à son ento...