De retour à la villa, je m'isole pour appeler Fanny. Jusqu'à maintenant, nous n'avions échangé que quelques messages et j'avais hâte d'entendre sa voix.
Au bout de quatre sonneries, je vérifie l'heure. Dix-huit heures. Elle est généralement plus rapide pour me répondre. Je sens monter la déception quand arrive la sixième sonnerie. Bientôt, je tomberais sur la messagerie. Alors que je suis sur le point de raccrocher, elle me répond avec une voix qui me fait frissonner.
— Hé ! Fanny que se passe-t-il ? Tu vas bien.
— Je... je m'étais endormie. Attends quelques secondes.
J'entends du tissu se froisser. Un soupir...
— Alors la vacancière ?
— Ce n'est peut-être pas le moment. Tu as l'air épuisée.
— Allez ! Dis-moi ! Je veux tout savoir. Cette journée de rafting ?
La détermination de Mina pour son concours l'amuse beaucoup. Elle se régale pendant l'épisode des embarcations dans les précipices et plaint la pauvre Julie pensant sa dernière heure arrivée.
— Elle devait être ravie de retrouver la terre ferme.
— Tu ne peux pas savoir à quel point ! Dès sa descente du radeau, elle s'est précipitée derrière un arbre et a vomi à ne plus pouvoir s'arrêter. Elle a fait promettre à mon frère de l'oublier pour des activités de ce genre. Tu l'aurais vu... Il culpabilisait de l'avoir entraîné dans cette aventure.
— Et Mina ? Pas trop déçue d'échanger ses escarpins pour une paire de baskets ?
L'écouter me poser des questions sur ma famille comme si elle les connaissait intimement me fascinait. Quelques semaines avant mon départ, elle avait tenu à ce que je lui parle de chacun d'entre eux. Leur personnalité, leur caractère, leurs points forts, leurs faiblesses... elle était dotée d'une mémoire remarquable. Pas un instant elle ne se trompait ou était perdue le temps de nos conversations. Elle savait parfaitement qui était qui. Les liens de parenté, les âges, les affinités... comme si Fanny avait toujours fait partie de ma vie et celle de mes proches.
— Oh Mina n'a pas eu d'autre choix que de ravaler sa fierté et faire bonne figure. Par contre, je n'en dirais pas autant de son splendide maquillage qui a déclaré forfait assez vite. Son visage était strié de traces noires. Quand ils ont débarqué, Vic lui a crié... je cite : « mon dieu Mina ! C'est une chance que tu ne doives pas te rendre à un concours de beauté ! » Mina l'a foudroyée du regard ce qui laissait présager une éventuelle vengeance. Mais parle-moi de toi ? Comment vas-tu ?
Fanny ne répond pas tout de suite à ma question. Quelques secondes s'écoulent pendant que mon baromètre d'angoisse s'affole.
— Kris... j'ai dû retourner à l'hôpital. J'ai fait un malaise. L'augmentation du traitement est toujours aussi difficile à supporter.
Je sens ma gorge se serrer. Le sang me monte à la tête.
— Quand ?
— Hier. Je ne suis rentrée que de cet après-midi, il y a à peine une heure.
— Pourquoi tu ne m'as pas prévenue ? David aurait dû le faire !
— Ne lui en veux pas. Je ne le voulais pas. Mon cher mari m'a pourtant mise en garde, me répétant que tu n'apprécierais pas.
— Eh bien il avait raison ! J'ai besoin de savoir comment tu vas !
— Écoute Kris ! Tu as, toi aussi, ton fardeau à porter. Tu n'as pas besoin du mien en plus. Je ne voulais pas plomber ton moral. OK ? Tu as assez de « ta grosse Bertha » pour te rappeler que chaque instant, chaque minute, chaque seconde sont précieux. Tu as tout organisé pour que ces vacances à Cauterets soient inoubliables. Alors tu n'as pas besoin de ça pour les assombrir. Trois semaines... trois petites semaines. Ça ne représente qu'un souffle dans ce que nous traversons. Un battement d'ailes. Alors, ne les gâche pas. Tu entends ? Promets-le-moi !
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Une année...le reste d'une vie
ChickLitKristelle voit son monde s'écrouler. Sans son autorisation, une tumeur s'est infiltrée dans son cerveau. Le verdict est sans appel. Il ne lui reste qu'une année à vivre. Sa première intention face à ce cataclysme est de ne rien divulguer à son ento...