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Mes yeux se perdent un instant dans les iris couleur miel de Túlio avant de revenir à la réalité. Même si l'idée de ne plus porter ce fardeau seule est tentante, me confier plus longuement à cet inconnu est un risque et une perte de temps que je ne peux me permettre. Mes mains se retirent des siennes, brisant à contrecœur notre contact apaisant et presque hypnotique, puis je me lève avec détermination.

– Merci pour votre accueil et votre bienveillance Túlio mais je ne vais pas vous importuner plus longtemps.

Il se redresse à son tour, de l'inquiétude gravée sur le front.

– Vous êtes sûre que vous ne voulez pas manger ou boire quelque chose avant ? Vous avez l'air drôlement pâle.

– Non, ça ira, merci.

Je lui souris aimablement en essayant de contrôler les hurlements de mon estomac. Je me sustenterai quand cette créature sera hors d'état de nuire. Mon regard part à la recherche des escaliers et trouvent leur entrée en bout de salle, près de l'ascenseur. Túlio insiste pour me raccompagner jusqu'à ce dernier, allant jusqu'à appuyer sur le bouton d'appel. Je me tâte à lui annoncer la mauvaise nouvelle mais la surprise est complète quand j'aperçois les portes métalliques s'ouvrir sur une cage d'ascenseur en parfait état. Alors je n'ai pas rêvé, la créature est bien sortie de l'ascenseur tout à l'heure ?

Túlio doit détecter ma réticence car il adopte un ton doucereux pour me rassurer.

– Je n'ai jamais trop aimé ces machins-là non plus mais les escaliers sont un peu sombres par endroit et au vu de votre état, il me semble plus sûr d'opter pour l'ascenseur. Vous savez, il a l'air vieux mais il fonctionne à merveille. Je peux le prendre avec vous jusqu'au lobby, si ça peut vous rassurer.

Un rictus de sarcasme s'immisce au coin de mes lèvres. Soit cet homme n'a jamais emprunté cet ascenseur, soit nous n'avons pas la même compréhension de l'expression « fonctionner à merveille ». L'ascenseur est pourtant bien là et parait effectivement être opérationnel, comme si mon aventure du début de nuit n'était jamais arrivée. Cet endroit est en train de me faire douter de ma propre santé mentale. Mais qu'il soit véridique ou onirique, mon premier voyage dans cet ascenseur a installé en moi une peur irrationnelle qui m'empêche de poser ne serait-ce qu'un pas dans cet appareil infernal. Même avec toute la volonté du monde, il me faudrait une sacrée bonne raison pour me convaincre de remonter dedans. Heureusement, Túlio n'insiste pas. Si mes refus à la chaine l'offensent, il ne le montre pas. Au contraire, toujours aussi serviable, il m'enjoint d'emprunter une des petites lanternes qui ornent les tables du restaurant pour y voir plus clair dans les portions sombres de l'escalier avant de poser une main amicale sur mon épaule.

– Je sais que nous venons de nous rencontrer et que ce n'est pas ma place mais je me dois de vous dire que parfois les êtres chers qui nous quittent restent beaucoup plus proches qu'on ne l'imagine.

Je fronce les sourcils, troublée, alors que Túlio me sourit tendrement. Je crois percevoir son regard s'arrêter un infime instant sur le vide au-dessus de mon épaule droite. Mes pensées vont presque immédiatement vers mon frère avant que la gêne ne s'installe. Évidemment que le seul employé de cet hôtel sur qui je tombe est un pseudo voyant qui croit pouvoir m'entourlouper avec ses révélations manufacturées pour s'appliquer à n'importe qui.

– Regardez bien où vous mettez les pieds, me conseille Túlio en m'observant entamer ma descente. Et quand vous serez prête à l'entendre, je crois que Jivan aimerait vous parler.

Mon corps se fige en reconnaissant le prénom de mon frère dans la bouche de l'homme qui s'éloigne lentement. Abasourdie, je lève un regard interrogateur vers lui puis au-dessus de ma propre épaule.

– Vous savez où me trouver, se contente d'annoncer Túlio sans se retourner.

Puis il disparait derrière la porte menant au restaurant, me laissant seule dans la cage d'escalier mal éclairée.


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Étonnement, la descente se déroule sans trop d'encombres ni aucune mauvaise rencontre. Le craquement des planches m'accompagne pendant mon voyage alors que la moquette retrouve une couleur plus vive et les lumières s'intensifient au fur et à mesure que j'approche du rez-de-chaussée. Dès que la lumière réconfortante de l'accueil filtre à travers la porte, mon pas s'accélère. Même vide, je trouve le lobby bien plus accueillant que les autres étages de l'hôtel. Quelque chose a cependant changé depuis ma dernière visite, un détail plus qu'intriguant puisque la musique du lobby est complètement absente, laissant entièrement la place au vacarme de la pluie au-dehors.

Il y a donc bien un employé chargé de l'accueil présent dans les parages. S'agit-il du vieux concierge que j'ai aperçu à mon arrivée ? Mon regard scanne les alentours pourtant déserts et s'arrête successivement sur la porte de la conciergerie puis sur le téléphone à faux cadran qui repose près de l'ordinateur du comptoir.


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À vous de choisir...

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{OUVRIR LA CONCIERGERIE}

Uniquement si vous avez les clés de Túlio, allez en 83


OU


{APPELER LA POLICE}

Direction le 82 

HÔTEL PARADIS | Livre interactifOù les histoires vivent. Découvrez maintenant