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Je ne saurais l'expliquer mais mon instinct me guide vers le troisième bouton et, en l'absence de tout autre indice, je me dis que ça vaut le coup de croire en ma bonne étoile. Je prends une grande inspiration et croise les doigts de ma main libre avant d'activer le bouton. Le son d'un mécanisme qui s'enclenche suit aussitôt et je me tourne pleine d'espoir vers la cabine de Camille.

Via les vitres de la cabine, j'aperçois une sorte de casque métallique qui vient s'abaisser de part et d'autre du visage de la journaliste. Horrifiée, j'appuie à nouveau sur le troisième bouton dans l'espoir que cela annule mon action mais rien n'y fait. Le casque se resserre autour de Camille, faisant pression sur ses tempes. Derrière elle, un petit écran affiche une barre de chargement qui commence à se remplir.

– Camille ? Camille !

Le feu qui se propage toujours dans la pièce m'empêche de réfléchir calmement. Malgré la fumée, les alarmes et les crépitements électriques, je me force à garder mon attention sur la cabine. La barre de chargement est déjà remplie d'un quart et Camille ne me répond plus. Ses membres pendent mollement le long de son corps, seulement soutenus par la machine, et son regard me parait étrangement vide. Merde ! Même si je parviens à la libérer, dans quel état vais-je la retrouver ?

Je commence à être désespérée quand la silhouette du stagiaire attire mon regard. Des barres de RAM dépassant de ses poches, il tente de fermer une valise pleine à craquer de composants électroniques. Sans réfléchir, j'évite les obstacles enflammés et attrape le bras du garçon au vol. Il se débat mais ma poigne est plus forte. D'une main, je colle son corps contre le mur et le toise d'un regard menaçant.

– Libère-la maintenant ou on y reste tous !

– C-C'est t-trop t-t-tard, hoquète le garçon, visiblement surpris par ma démarche.

– J'en jugerai moi-même alors tu as intérêt à ouvrir ce machin ou je t'envoie en vol plané par la fenêtre.

Ma menace fait son effet puisque le jeune homme déglutit avant d'acquiescer vivement. Je le suis de près alors qu'il s'approche de la surface de contrôle. Le résultat se fait un peu désirer ; une attente cruelle au vu de la fournaise qu'est en train de devenir la pièce mais une attente qui en vaut le coup car bientôt Camille est libérée de ses attaches et les portes vitrées de sa cabine s'ouvrent. Je m'empresse d'aller réceptionner la journaliste qui s'écroule, inconsciente, dans mes bras. Je tente de la réveiller mais son sommeil parait profond. Elle respire cependant et cela suffit à me redonner espoir.

Le stagiaire n'attend pas plus longtemps pour empoigner sa valise et déguerpir dans l'ascenseur tandis que je m'attèle à positionner Camille convenablement sur mon épaule. Quand je finis par suivre l'exemple du garçon, l'ascenseur est indisponible et je me dirige alors vers la porte de service, sans m'imaginer un instant trouver celle-ci fermée à clé. Pourtant elle refuse bien de bouger, peu importe le sens dans lequel je tourne la poignée. Comment ce peureux de stagiaire a pu avoir une idée aussi machiavélique ?

Sentant la panique monter en moi, je dépose le corps de Camille et recule pour prendre de l'élan. L'adrénaline annule ma douleur alors que je me jette de tout mon poids sur la porte en bois. Au bout de la troisième tentative, je sens un léger craquement mais malheureusement la porte est toujours en place et nos chances de survie de plus en plus réduites. Il fait si chaud que je sens le masque de peinture commencer à fondre. J'ai beaucoup de mal à le retirer tant il est bouillant au toucher et la fumée qui accueille aussitôt mes poumons me fait tousser. Je lutte pour me remettre d'aplomb et m'élancer une nouvelle fois sur la porte.

Au bout de la sixième ou septième tentative, un gond finit par céder et je sais que je tiens le bon bout mais l'action combinée à la chaleur ambiante et au manque d'oxygène devient de plus en plus pénible. Je ne sais pas si j'aurai la force d'aller jusqu'au bout de ma démarche et encore moins de porter Camille après. Mais il est trop tard pour faire marche arrière alors je décide de donner tout ce qu'il me reste dans une tentative ultime d'enfoncer la porte.

Un énorme craquement accompagne mon geste suivi d'un mouvement de bascule puis un impact étourdissant. Quand je reprends conscience, je me retrouve tout en haut de l'escalier de service, allongée de tout mon long sur la porte. Je ne saurais dire si le choc de ma chute m'a mis K.O. pendant une seconde ou dix minutes mais, quand je me retourne, la suite du cinquième étage est complètement en feu. À bout d'énergie et d'air, je peine à tendre le bras pour m'agripper à la rambarde et me hisser hors de la porte. Même si je parviens à me lever, soulever ou tirer Camille me serait impossible. Je n'ai même pas le courage de vérifier son état, craignant qu'il ne soit déjà trop tard pour elle.

Je commence à douter de ma propre survie également quand des bruits de pas précipités se font entendre un peu plus bas dans l'escalier. Ma vision est trouble mais je crois bien reconnaitre la crinière de Túlio, venant à ma rescousse une nouvelle fois.

– Taline ? s'écrit-il, surpris, avant de se précipiter à mes côtés.

Puis il m'aide à me redresser et descendre quelques marches.

– Ok, je vais vous lâcher deux minutes pour appeler les pompiers mais je reste avec vous, d'accord ?

J'ai envie de rire et pleurer à la fois alors que mon sauveur me cale contre l'angle du mur. Un mélange de soulagement et de peur quant au sort de Camille m'assaille mais cela ne suffit pas à garder ma conscience à flot et je sens mes paupières se faire lourdes. Devant les flammes dansantes qui troublent ma vision de plus en plus floue, la silhouette du barman m'apparait en double, comme si une sorte de double maléfique se tenait juste derrière lui. Une hallucination étrange de mon cerveau aux batteries complètement à plat. Je ne me souviens même pas du moment où le sommeil me gagne enfin.


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Voyons à quelle fin votre enquête vous a menée...

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Allez en 99.



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