Chapitre 9

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J'arrive au bar, l'air détaché, comme si c'était un soir normal. Tout dans mes gestes est calculé pour paraître indifférente. Je nettoie quelques verres, passe un coup de chiffon sur le bar, ignorant délibérément les cinq silhouettes accoudées à quelques pas de moi. Leurs regards me suivent, je le sens. Ils observent chacun de mes mouvements, mais je fais semblant de ne rien remarquer.

— Heather, viens par ici.

La voix de Liam tranche dans l'air. Son ton autoritaire me fait déjà monter la tension. Il ne pose jamais de questions, il donne des ordres.

Je me stoppe, mon cœur s'accélère. Que me veut-il cette fois ? Je repose doucement le verre que je nettoyais et m'avance, coupant court à ce que j'étais en train de faire.

Il reste là, à me fixer sans un mot, savourant le malaise grandissant en moi. Il sait exactement ce qu'il fait, et cela me met en rage intérieurement. Il se nourrit de cette gêne, j'en suis certaine.

— Tu vois le monsieur en costume rouge, derrière moi ? demande-t-il sans se retourner, son regard toujours fixé sur moi.

Je balaye la salle du regard, et oui, je le vois. Un homme en costume rouge, assis à une table près du fond, l'air distant et quelque peu détaché.

J'acquiesce d'un signe de tête, indiquant que j'ai repéré l'homme en question.

— Va lui demander si tout va bien, ordonne-t-il d'une voix calme mais tranchante. Mets-le à l'aise.

J'hoche la tête, incapable de refuser un ordre venant de lui. C'est devenu presque automatique. Si Liam le veut, je le fais.

Mais c'est ce qu'il dit ensuite qui me glace.

— Charme-le.

Je me fige net. Mes sourcils se froncent, et je me retourne pour le regarder, cherchant une explication. Est-ce qu'il vient vraiment de me demander de charmer un client ? Pourquoi ?

Liam reste imperturbable, me fixant comme si mon hésitation l'amusait. Il attend que je comprenne que les questions ne sont pas permises ici.

— Tic tac, tic tac, murmure-t-il doucement, son ton moqueur, presque chantant.

Mon cœur s'emballe à ces mots. Cette pression silencieuse qu'il exerce sur moi est suffocante. Je sais ce que cela signifie : je n'ai pas le droit de poser des questions, je dois m'exécuter sans broncher. Chaque seconde d'hésitation est une menace implicite.

Je prends une grande inspiration avant de me diriger vers cet homme en costume rouge. Mon cœur bat à tout rompre, et chaque pas que je fais semble plus lourd que le précédent. Je sens le regard de Liam peser sur moi, comme un fardeau invisible. Il attend que je m'exécute, et je n'ai pas d'autre choix que de faire ce qu'il m'a ordonné.

L'homme, assis seul à une petite table, a cet air détaché que je commence à reconnaître chez les habitués de ce genre d'endroit. Ses cheveux noirs, soigneusement coiffés, contrastent avec la froideur de ses yeux. Il doit avoir la quarantaine, mais son regard est plus vieux, plus fatigué, comme s'il avait vu et vécu plus que je ne pourrais jamais imaginer.

Je m'approche, tentant de garder un air détendu malgré le nœud qui se forme dans mon estomac.

— Bonsoir, dis-je d'une voix que j'espère charmante. Est-ce que tout va bien pour vous ? Vous avez besoin de quelque chose ?

Il tourne lentement la tête vers moi, ses yeux me détaillant rapidement. Je me sens exposée, comme s'il pouvait lire dans mes pensées. Il me fixe un moment avant de répondre, et je sens mes jambes devenir légèrement tremblantes.

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