Chapitre 4 - Jalebi baby

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Je suis garée en double file devant l'immeuble de Marla. J'ai beau avoir les warnings allumés, je me fais klaxonner par les automobilistes new-yorkais qui malgré le début de soirée ne sont pas moins nombreux et énervés que d'habitude.

Je profite que Marla ne soit pas encore présente pour checker ma tenue et vérifier que tout est en place. Je descends la fermeture éclair de mon énorme doudoune chenille crème, qui m'arrive aux pieds et qui est juste indispensable en cette période. Le tableau de bord de la voiture indique 2°C et la température risque de chuter davantage durant la nuit.

J'écarte les pans de mon manteau et observe mon bustier blanc agrémenté de dentelle. Puis la jupe tutu rose bonbon, que je pourrais avoir subtilisé à une gamine fan de Barbie et des goûters-party. Les collants rayés arc-en-ciel rendraient quant à eux n'importe quelle licorne épileptique. Et l'arme secrète de la costumière... les escarpins roses irisés aux talons vertigineux.

Un courant d'air glacial me tétanise, alors que Marla pénètre dans la voiture pour s'y installer. Je referme à toute vitesse ma doudoune, mais le mal est fait. Mes dents jouent des castagnettes.

- Désolée, désolée, me dit Marla. Mes bas résilles ont filé à deux reprises. Julia Roberts a eu les oreilles qui sifflent ! On ne m'y reprendra plus à acheter une marque de collants qui porte le nom d'un sandwich italien (1).

Marla est à peu de chose près habillée comme moi, mais dans une version ultra dark. Nous aimons jouer sur la dualité de nos personnages. Ange et démon. Le yin et le yang. Comme à son habitude, la noirceur la recouvre de haut en bas. Mais ce soir, le satin et les paillettes la font briller de mille feux.

- Ne t'inquiète pas, je la rassure. Tu lances le GPS ?

- Yep ! Go Go Go, s'écrie-t-elle à plein poumon dans l'habitacle.

Elle me fait penser à une chauffeuse de salle survoltée et ça fonctionne puisque je souris jusqu'aux oreilles durant notre trajet vers le lieu de la fête.

Je sais que nous sommes proches de notre but lorsque les rues s'encombrent de voitures sur le bas-côté et qu'une puissante basse s'intensifie alors que nous progressons vers la maison de Keena. Nous sommes en banlieue de New York et je pense que la demeure doit appartenir à l'un de ses proches, car bien trop éloignée de notre Lycée pour qu'il puisse s'y rendre tous les jours.

Marla m'a effectivement appris que Keena était un élève de notre école qui fête aujourd'hui ses 17 ans. Et son souhait de nous avoir à sa fiesta comme cadeau d'anniversaire, me laisse à penser qu'il doit occuper une bonne place dans ma cour d'admirateurs.

Un emplacement nous est bien réservé juste devant l'entrée de la maison, mais occupé par un groupe d'adolescents qui semble avoir eu l'idée de nous accueillir. Ils s'écartent néanmoins alors que la voiture progresse vers eux.

Une fois garées et le moteur coupé, nous ne descendons pas immédiatement. Nous savons qu'une fois le pied dehors, le show débutera.

Nous retirons nos doudounes, rangeons nos biens les plus précieux dans la boite à gants munie d'une serrure et retouchons nos maquillages respectifs.

J'avertis Marla par un hochement de tête que je suis prête.

- Et c'est parti ! annonce cette dernière en frappant des mains, juste avant d'ouvrir sa portière.

Je ne me suis pas encore extraite de la voiture mais je perçois déjà l'effervescence de la fête qui s'invite à l'intérieur de l'habitacle. Je sors à mon tour et je suis assaillie par des jeunes de mon âge qui m'interpellent par mon prénom. Je n'ai pas d'autre choix que de les ignorer si je veux assurer la mission qui nous est confiée.

BLOWER SOULOù les histoires vivent. Découvrez maintenant