Chapitre 28 - Cendrillon n'a qu'à bien se tenir

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Sequins, paillettes, soie, dentelle.

Étoffe blanche, rose, bleue, parme, noire, noire, noire et encore noire...

Je désespère de trouver la robe qu'il me faut parmi les centaines d'articles suspendus le long des murs, lorsque mes yeux reviennent sur la quatrième robe noire essayée par Marla. Quoique celle-ci a quelque chose de particulier, je dois bien le reconnaître, avec son col montant en dentelle transparente.

- Alors, qu'est-ce que t'en dis, m'interroge mon amie sur le seuil de la cabine d'essayage.

- Elle fait très Mercredi Adams, mais ça te va bien.

Ma référence ne la vexe point. Son sourire XXL et son hochement de tête me confirment qu'elle a trouvé son bonheur.

Ça va être à mon tour de passer dans la cabine et je n'ai encore rien sélectionné. Je ne sais pas ce que je veux et trop bien ce que je ne souhaite pas.

- Alors, alors ! Qu'allons-nous te trouver ! chantonne Marla une fois rhabillée.

- Il n'y a rien pour moi ici.

- Pas de pessimisme, veux-tu ? Nous allons dénicher quelque chose de classe, mais aussi de sexy pour ta première nuit d'amour avec Jaya.

- Quoi ?

Une chaleur irradie mes joues et je détourne le regard. Tant pour faire croire que je ne me sens pas concernée et aussi peut-être par crainte qu'elle ne me reproche de ne pas lui en avoir parlé.

- Franchement, vous vous croyez discrets avec vos chuchotements ? Ce ne sont pas vos mains qui m'empêchent d'entendre quoi que ce soit.

Oh... bordel... de... merde...

Forcément, je me demande si elle en sait plus qu'elle ne le devrait. A-t-elle perçu des bribes de conversations concernant nos pouvoirs ?

- Et que sais-tu exactement ? je lui demande, prudente.

- Que Jaya vous a réservé une chambre d'hôtel pour le soir du bal.

- Et... c'est tout ?

- Parce que tu as des projets plus importants dans les prochains jours que de perdre ta virginité ?

- Non, évidemment !

Mon amie hoche la tête de satisfaction.

- Donc, j'ai dit une robe classe et sexy...

Marla marmonne, tout en faisant coulisser à une vitesse impressionnante les cintres sur les barres en acier doré. Elle traverse la pièce, se rend sur l'autre pan de mur, observe les robes rouges, puis au bout de dix minutes, elle revient aux robes blanches et crème.

- C'est bien cette couleur qu'il te faut, une couleur virginale...

- Marla ?

Elle ne m'a pas entendu. Elle est repartie bien trop vite au fond du grand showroom où sont exposées les robes de mariée. Mais qu'est-ce qu'elle fabrique ?

- Oh putain c'te dinguerie... je l'ai trouvée ! me crie-t-elle, à travers la pièce.

Ses mots résonnent, telles des paroles divines au sein d'une cathédrale. Et c'est flippant...

Mes pieds se mettent lentement en mouvement pour la rejoindre. J'appréhende, mais l'excitation me gagne aussi. Marla avance à son tour vers moi, serrant contre elle une robe couleur crème, dont je ne distingue que des plumes. Un bon gros amas de plumes, ressemblant à un nid d'oiseau.

Nous nous rejoignons au milieu de la pièce. Je ne regarde pas cette robe, qui je le pressens saura me rendre faible. Faible face aux caresses du chuchoteur lorsqu'il me la retirera. Je plonge dans les billes profondes et céruléennes de ma meilleure amie. Elle prend son rôle très au sérieux, me faisant craindre son comportement lorsque ce sera vraiment le « grand jour ». Non pas que je l'attende ou que j'y pense. Bref...

- Tu me montres cette « Dinguerie » ou tu fais une fashion-syncope ?

Marla cesse enfin de me fixer comme une styliste psychopathe et me pousse vivement vers la cabine d'essayage.

- Je t'interdis de poser les yeux sur cette robe avant qu'elle ne moule ton joli petit cul !

- Cool ! J'ai jamais joué à Colin-maillard dans une cabine d'essayage.

- Tu te déshabilles d'abord et ensuite je te passe la robe.

- À vos ordres !

- Ah ! Et enlève le soutif !

J'obtempère, tout en poussant un grognement. Ma poitrine n'est pas suffisamment volumineuse pour remplir décemment une robe à elle seule. D'où mon amour pour les soutiens-gorge rembourrés depuis que j'ai 14 ans et que j'ai compris que la croissance de mes seins avait conclu un pacte diabolique avec le reste de mon corps.

- C'est bon ? demande Marla impatiente.

- Oui !

- OK ! Ferme les yeux, j'arrive !

What ?

Marla déboule de derrière le rideau et je cache rapidement ma poitrine à l'aide de mon bras.

- Heu... j'avais pas compris que tu voulais me la passer toi-même.

- Arrête de faire ta prude. J'ai vu plus souvent tes seins que Jaya n'en aura l'occasion durant les dix prochaines années.

- C'est vrai ? Tu nous vois ensemble dans dix ans ? je me réjouis. Attends... C'est pas très gentil ce que tu viens de dire ! je me renfrogne tout aussi vite.

- Les yeux !

Une main sur mes paupières et l'autre toujours rivée à ma poitrine, j'obtempère.

- Lève un pied ! Parfait, le deuxième maintenant.

Je suis parcourue de frissons alors que le tissu satiné glisse le long de mes jambes. Puis, une sensation d'enveloppement chaud et douillet vient se caler sur ma poitrine. Cette robe que je n'ai pas encore vue est très confortable et lorsque Marla remonte la fermeture éclair dans mon dos, j'apprécie de sentir ma taille enserrée de la sorte.

Je n'attends pas le signal et ouvre les paupières pour découvrir la merveille qui me recouvre.

Woawwww...

J'en ai le souffle coupé. Le bustier crème et ses baleines apparentes me recouvrent comme une seconde peau, alors que la jupe droite mais vaporeuse avec ses plumes qui semblent flotter, possède sa propre gravité. Cette robe est trop belle pour un bal de promo. Je ne peux justifier de dépenser une telle somme dans le simple but de me pavaner. Et si je le faisais pour Jaya ? J'imagine ses yeux rougeoyants de désir lorsqu'il me découvrira. Ses mains sur ce bustier qui dessine des courbes parfaites. Les plumes qui me font ressembler à un ange tombé du paradis. Un être céleste perdu sur terre que je lui supplierais de sauver... ou plutôt de corrompre.

- Tu as raison, Marla. Cette robe est digne de mon amoureux.

Mon amie approche son visage du mien, se plaçant au-dessus de mon épaule. Elle m'observe dans le miroir avec un regard énigmatique.

- Elle est parfaite pour vous. De quoi vider ton bocal à préservatifs.

J'aime le clin d'œil dans la glace qu'elle me renvoie. Elle espère m'embarrasser, alors qu'il n'en est rien. J'ai suffisamment fantasmé ce moment pour ne plus en ressentir la moindre gêne. Je suis sûre de moi, de nous. Oui, je compte bien vider tous les bocaux qui croiseront notre chemin.


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