BLOWER SOUL

Chapitre 30 - L'avenir nous révèle toujours ses secrets

Un, deux, trois...

Trois petits jours sans nouvelles. Trois horribles souffrances de 24 heures chacune, sans savoir si Jaya se porte bien.

Devant ma famille et Marla, je donne le change. Officiellement, mon petit ami a la grippe. Pas de quoi pleurer dans mon lit. Ma mère sait quelle belle actrice je fais et je découvre qu'elle-même sait jouer la comédie en dehors des salles d'audience. Elle cache à mon père ce moment où elle m'a vue craquer et m'a consolée. Pourquoi ? Elle maintient cette distance qui nous définit, tout en effleurant ma main ou mes cheveux, lorsque papa a le dos tourné. C'est furtif, délicat, presque imperceptible. Me faisant douter de l'existence même de ces marques d'affection. Nous partageons un secret désormais. Est-ce que j'aime cela ? Oui. La petite fille que je suis en redemande. Mais la femme de presque 18 ans bouillonne, redoutant une manœuvre de sa part pour mieux se jouer de moi. Quand est-ce que tout cela va cesser ?

On toque à ma porte et mon amie pénètre l'instant d'après sans attendre mon invitation. Marla est chez elle ici et il n'y a qu'en présence de ma mère qu'elle montre un soupçon de retenue.

- Salut ma puce ! Alors c'est pas trop la déprime sans Peter Pan ?

Je me redresse sur le lit et lui adresse un sourire qui tire sur mes zygomatiques tant il est forcé. Je tapote le matelas à côté de moi, pour qu'elle vienne me rejoindre.

- Je prends mon mal en patience. Mais il est vrai qu'il me manque.

Marla embrasse mes joues.

- Dis-toi qu'il vaut mieux qu'il soit malade maintenant plutôt qu'en fin de semaine.

Le bal, voici ce qu'il y a dans quelques jours et je suis dans le déni. Ma robe est reléguée au fond de mon dressing, car sa seule vision me fait monter les larmes aux yeux. Jaya sera-t-il prêt pour le bal ? Sera-t-il tout simplement encore dans ma vie ?

- Je présume que tu as raison. À moins que sa convalescence ne soit longue...

Une convalescence qui s'éternise, ça s'appelle une rupture, non ?

J'alterne entre l'abattement et l'autoflagellation. J'ai si peu confiance en notre couple que cela en devient risible. Je m'en veux toujours de l'avoir repoussé. Même si je me suis ravisée rapidement, la désagréable sensation de culpabilité me suit comme mon ombre. Elle tente désormais de m'asphyxier même la nuit.

- As-tu peur ? me demande Marla.

Je suis terrorisée.

- De quoi ?

- D'accord... Donc tu ne veux vraiment pas discuter avec moi de la perte prochaine de ta virginité ?

- C'est pas ça, Marla.

Je balance la tête négativement. Je ne veux pas qu'elle le prenne pour elle. Je dois tenter de lui expliquer.

- Jaya est... même sans savoir pourquoi, tu sais qu'il est différent des autres garçons, n'est-ce pas ? Ce ne sera pas juste une expérience sexuelle. Ce moment... notre moment doit demeurer intact, unique et protégé. Tu comprends ?

Je relève mon regard sur elle et le sourire qu'elle me renvoie est si doux.

- Tu es tellement piquée que tu en fais de la poésie.

Je m'esclaffe et cette fois-ci ma joie n'est pas feinte. L'absence de Jaya ne modifie en rien ce que je peux ressentir pour lui. Il pourrait me quitter aujourd'hui, partir et ne plus jamais revenir, que cela n'y changerait rien. Il n'existe qu'un seul chuchoteur à New York et il a dérobé ce qu'aucun garçon n'a réussi à faire avant lui. C'est un voleur. Un exhumeur de cœur.