☔ JEUDI 12H17 / JOUR 147
La pluie tombe fort aujourd'hui. Je savais que le ciel était le reflet de ses émotions. Je le constate même alors que ses larmes se mélangent à l'eau glaciale des nuages, j'en suis désormais persuadé. J'ai séché les cours de cet après-midi pour me tenir à côté de lui, droit dans mes bottines, le cœur vibrant d'une nervosité que je déteste. Sous le parapluie qu'on se partage, les gouttes tapent avec véhémence le tissu. Des «plocs» assourdissants qui masquent sa souffrance. Je ne le regarde pas. Il me l'a demandé. Toutefois, je l'entends. Derrière ces «plocs» fracassants, je peux percevoir le son de ses sanglots. Le ciel gris foncé et les gouttes d'eau froide s'accommodent à ce qu'il ressent. Le froid s'infiltrant sous mon imper me donne des frissons déplaisant. Le silence est un millier de gouttes qui tombent sur le parapluie, mon épaule droite, sur le marbre. Un silence bavard. On entendrait presque un rire homérique entre chaque goutte qui s'abattent sur et autour de nous.
Sa main froide sert la mienne.
Il n'entend pas le silence.Il a tenu à ce que je sois présent. Je ne sais pas encore pourquoi je suis là, mais je sais reconnaître quand Sunflower essaie de faire un pas vers moi. Alors j'attends qu'il se décide. J'attends avec une grande impatience de savoir ce que je dois faire, ce qu'il veut faire. En général, je ne suis pas doté d'une telle placidité. Néanmoins, je suis conscient que je ne dois en aucun cas le bousculer. J'en ai très envie. Je veux lui poser toutes mes questions. Pourquoi as-tu insisté pour que je vienne avec toi ? Est-ce que tu essaies de me dire quelque chose ? Est-ce que je peux te poser toutes les questions qui me turlupinent depuis que je te connais et même avant que je ne te connaisse ? Peux-tu me parler de toi, de ta famille, de tes amis, de JB, de ton lien avec Satan et l'écureuil blond ? Est-ce que je peux te demander d'arrêter de te droguer ? Si je le fais, arrêteras-tu ? Je sais, on a déjà essayé et ça a fini en une magnifique dispute, c'était une belle connerie. Mais je voudrais essayer encore, avec toi. Comment vois-tu notre relation ? Comment me vois-tu ?
Les questions ne sont jamais une bonne chose lorsqu'elles restent coincées dans la tête. Tout part d'un petit rien pour continuer sur ce bon vieux chemin de l'estime de soi et finir en «je ne suis rien». Une petite question innocente pour finir en petite question sur la remise de sa propre existence. C'est difficile de se sortir de ce genre de pensées. Pas impossible, mais très difficile. C'est une pente glissante sur laquelle, parfois, on peut s'accrocher. Soit on prend appuie et on va un peu mieux que la semaine précédente, soit l'ancrage se casse la gueule et vous avec. D'un jour à l'autre, ça change. D'une seconde à l'autre, l'état d'esprit n'est plus du tout le même. Je le constate pour lui et je l'ai vécu. On rit, on s'amuse, on sent comme sur un petit nuage, rien que lui et moi. Et soudainement, une petite seconde d'inattention, un mini regard vers un ailleurs et un Sunflower dont les larmes tombent seules. Et durant cette petite seconde, il s'est passé tellement de choses dans ses pensées intrusives qu'il nomme les toiles gluantes.
Parfois cela vient seul. Parfois cela vient de moi. Un mot, un regard, un geste qu'il interprète beaucoup trop et il pense que je m'éloigne de lui, que je l'aime moi qu'hier ou que je l'abandonnerai pour sûr. Je me suis dit que je devais faire attention à mon comportement lorsque je suis avec lui. J'ai expliqué la situation à ma mère et elle m'a dit, dans toute sa sagesse, que je ne devais absolument pas faire ça. Je dois rester moi. Je ne dois pas modifier ma façon d'être que ce soit avec lui ou quelqu'un d'autre. Sunflower est dans une dépression assez grave. Je ne peux pas contrôler ce qu'il se passe dans sa tête. Je ne peux pas invoquer ou repousser les toiles gluantes. Alors si je fais attention à mon comportement avec lui, c'est le début de la fin de notre relation. Selon ma mère -et je ne suis pas en désaccord- si je commence à faire attention à tout ce que je dis et fais en sa présence, je vais me sentir piégé au fur et à mesure de rester avec lui. Je vais finir par faire fâner Hanahaki. Je ne veux pas ça. Les tournesols dans mon estomac ne me dérangent plus. Ses racines sont ancrées dans mon cœur et je veux vivre avec ça. Je choisis d'accepter Hanahaki. Je choisis d'accepter Sunflower. Je choisis d'être moi-même avec lui. Par conséquent, même si parfois je le blesse involontairement en étant moi-même, je continuerai tout de même à l'être.
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SUNFLOWER
FanfictionQuel sentiment étrange. Croiser le regard de l'inconnu qui change tout. Il plante son regard dans le mien comme une graine dans le sol. Une petite tige croît. Les battements de mon coeur s'affolent. Le sentiment étrange se métamorphose et s'enracine...