Avant la neuvième lettre

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Niall avait son crayon en suspension dans l'air. Il ne savait pas quoi écrire. Il avait la peine sèche. Il avait le syndrome de la page blanche et il ne savait pas vraiment pourquoi, parce qu'il avait tellement de chose à dire à la belle brune. Il en avait tellement mais tout était désordonné dans sa tête. Plus aucune phrase n'avait vraiment de sens, de clarté. Tout tournait dans tous les sens, partait une fois sur la gauche puis une fois sur la droite, mais plus rien n'avait vraiment de signification. Tout partait en couille, comme toujours avec ces pensées depuis que la jeune femme a rendu l'âme.

Niall se passa la main sur le visage, las de toute cette situation qui n'en finissait pas. Il n'aurait jamais imaginé que la mort de quelqu'un, chère à ces yeux, serait aussi difficile à surmonter. Il n'avait jamais du faire de deuil auparavant et ne se doutait pas de la hauteur, de l'épaisseur, de la taille et de la longueur qu'était cet obstacle dans la vie d'un humain. Il n'en avait la moindre idée et il se retrouvait comme un con dans cette impasse. Il n'aurait jamais cru que ce serait aussi difficile, contraignant et que cela le prendrait autant à la gorge, au cou et à la tête.

Niall ne se saurait jamais douté qu'un deuil serait aussi dur à faire, aussi long et aussi douloureux. Il n'avait jamais perdu qui que se soit de la sorte et il le regrettait bien, à présent parce qu'il n'y était clairement pas préparer. Mais même si une personne est malade et que l'on sait que c'est sa dernière seconde de vie sur cette planète, on ne sait pas s'y préparer à l'éventualité de ne plus jamais la revoir. Un deuil ne peut pas se préparer à l'avance, il se subit au moment présent. Il n'y aurait jamais cru, de devoir en avoir un mais, il n'avait pas vraiment le choix. Ou bien, il réussissait à faire son deuil, ou bien il vivait avec la mort de la jeune femme sur le cœur toute sa vie.

Niall ferma les yeux et inspira un grand coup mais quand il rouvrit les yeux, les choses n'allaient pas mieux. Elles n'allaient pas mieux du tout, parce qu'il entendait –malgré tout, il les sentait plutôt- les larmes silencieuses de son meilleur ami dans son dos. Les autres garçons avaient été mit au courant par le mécheux mais aucun n'avaient su rappliquer dans la seconde. Puis, les fans ne tardèrent pas à être mit au courant et ce que l'irlandais n'avait gardé que pour jusqu'à hier comme une sorte de secret, était maintenant connu par presque toutes les personnes vivant sur cette planète.

Niall s'en voulait de l'avoir annoncé à son meilleur ami, parce que maintenant, lui aussi était affecté par sa mort, puis Harry, Liam ainsi que Zayn l'étaient. Et maintenant c'était presque si le monde entier n'était pas en train de pleurer la mort d'une jeune femme décédée il y a un mois et dont il n'aurait sûrement jamais connu l'existence si elle n'était pas entrée dans la vie du jeune irlandais. Ils pleuraient tous pour une personne qu'ils ne connaissaient aucunement et prétendent qu'elle était exceptionnelle et que c'est une grosse perte.

L'hypocrisie commençait vraiment à soûler le blondinet qui n'en pouvait plus. Louis avait apprit la mort de sa meilleure amie il y a environ 24 heures. Zayn avait apprit la mort de sa meilleure amie –avec qui il avait gardé quelques contacts- il y a même 12 heures. Harry et Liam qui appréciaient la jeune femme mais sans plus, pas autant que Louis et Zayn du moins, étaient sous le choc. Tout le monde entier était en train de pleurer la mort de Jersey que personne ne souligna l'éventuelle rupture entre le brun et Noémie. Tout le monde passait outre, parce que la mort avait prit le dessus dans le monde des fans plutôt qu'une rupture et une histoire de tromperie ; c'était moins important.

Niall avait besoin de nicotine. Il était en manque de ce mélange de goudron et de nicotine. Il se leva et alla jusqu'à la terrasse prenant son paquet de clopes au passage. Il referma légèrement la baie-vitrée mais en laissa une partie encore légèrement ouverte. Il avait un peu froid et referma la tirette de son pull jusqu'au cou. Il sortit un cylindre de son paquet ainsi que son briquet qu'il cachait minutieusement dedans pour ne pas le perdre, surtout. Il alluma le bout et inspira une première bouffée du cylindre. Il en avait vraiment besoin. Il était véritablement en manque.

Niall entendit un bruit de coulissement et comprenait que son meilleur ami venait le rejoindre. Il vit une silhouette se mettre sur sa droite mais ne tourna par le regard, si c'était pour que son cœur se comprime encore plus en voyant la mine dépitée et attristée de Louis baigné par les larmes et les remords ; il passerait son tour. Il n'en avait pas la moindre envie, il était déjà assez mal ainsi. Il vit, du coin de l'œil sans le vouloir, que le mécheux s'accoudait à la rambarde du balcon. Il entendit un bruit de reniflement et savait très bien que cela ne pouvait venir que du jeune homme sur sa droite et personne d'autre. Ils étaient tous seuls à ce balcon, avec la ville à leurs pieds dont toutes les lumières clignotaient ou stagnaient et étaient comme des étoiles dans le ciel. Ils étaient seuls face au monde.

-Tu n'aurais pas une clope pour moi ? Demanda Louis la voix rauque et cassée par les lacrymales.

Le silence fût briser mais pour une fois, Niall ne le releva pas. Il tendit son paquet, sans jeter un seul regard à son meilleur. Celui-ci prit un cylindre et le briquet et en alluma l'extrémité pour ensuite remettre le briquet là où il se trouvait, refermer le paquet et le tendre au blondinet. L'irlandais le reprit et le mit dans une des poches de son pull. Il s'appuya, à son tour, sur la rambarde du balcon et laissa son regard bifurqué de lumière en lumière. Ils s'allumaient, s'éteignaient. Il avait presque l'impression qu'elles étaient en vie et qu'elles faisaient comme Jersey, elles prenaient vie mais d'une seconde à l'autre, elles pouvaient perdre la vie. Il se détestait d'avoir des pensées ainsi et était bien content de ne pas avoir un lien télépathique avec Louis parce que celui-ci n'en avait clairement pas besoin de ses pensées malsaines et noires.

Niall tourna légèrement la tête vers son meilleur ami et pu remarquer rapidement qu'il regardait lui aussi l'immensité de la ville à leurs pieds. Il reconnaissait tout de même son regard. Ce même regard qu'avait couramment la jeune brune ; un regard vide. Il savait qu'il avait le même genre de regard depuis qu'elle était morte et maintenant, Louis avait aussi un tel regard. Il sentit sa gorge se serrer et il ferma les yeux pour ne pas que les larmes finissent par venir sur ses joues à lui. Il ne voulait pas pleurer devant son meilleur ami. Il détestait l'idée de pleurer devant les gens, devant quelqu'un même si cette personne pouvait être « Louis Tomlinson » ou encore « Jersey Balkui ».

Niall n'arriva pas à les retenir plus longtemps, c'était beaucoup trop dur pour lui, pour trop lourd à porter sur ses épaules frêles et maigrelettes. Il avait perdu du poids et du muscle aussi. Quelques perles d'eau salées dégoulinèrent sur ses joues, s'échouèrent sur le sol ou sur ses vêtements. Il avait le regard droit sur toutes les lumières de la ville en contrebas. Il était en ailleurs, plongé dans les souvenirs des sourires, des larmes, des rires et des peines de Jersey mais aussi plongée dans la douleur qu'elle lui causait avec son deuil à faire. Louis se tourna vers lui, remarquant que le blondinet pleurait et il le prit dans ses bras. Leurs cigarettes mourraient dans leurs doigts, presque fumées jusqu'au filtre. Ils s'étreignirent et le câlin était plus brusque et douloureux qu'amical et doux. Ils avaient mal et leurs cœurs avaient besoin d'une onde de choc tel que ce câlin pour reprendre leur place initiale et réalisé le surplus de peine qu'il avait caché dans la poitrine.

***

Musique ; 3 Doors Down - Here Without You


Dear Jersey//n.hOù les histoires vivent. Découvrez maintenant