Chapitre 14

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Cela faisait maintenant quatre jours que je n'avais pas eu de nouvelles de Jason. Chaque matin, je vérifiais si je n'avais pas reçu un message. A chaque pause, je renouvelais mon geste et chaque soir, je ré-interrogeais ma messagerie. J'hésitais à faire le premier pas mais je refusais d'abandonner. Je n'étais pas un objet que l'on achetait! J'aurais voulu tirer un trait sur cette histoire - qui ne pouvait mener à rien de toute façon - mais une rafale de cadeaux m'en empêchait. J'avais reçu jusqu'ici un pendentif, des plantes, une montre, un tableau, un bonsaï, une sculpture et des poissons... 

Quand j'avais refusé le pendentif, le livreur m'avait annoncé qu'il avait alors reçu l'ordre de le laisser devant ma porte. Libre à moi de le jeter. En soupirant, je l'avais récupéré. La seconde fois, j'avais refusé les fleurs, imaginant ainsi que Jay allait arrêter les frais, mais les cadeaux avaient continué d'affluer. Aucune note, aucun nom, mais il n'y avait pas de doute à avoir sur l'expéditeur.

C'était avec joie que j'avais accueilli cet après-midi à la plage avec mes amis. Mélissa était passée me prendre et elle était étrangement silencieuse ce qui cadrait parfaitement avec ma propre humeur. Je fis signe à Thomas et Jasper qui étaient déjà garés sur le parking. En un tour de volant hautement inventif, Mel réussit à se garer à côté d'eux sans écraser personne dans la manoeuvre. Et après les gens osaient remettre en doute l'existence de Dieu! Sortir vivante d'Adélaïde était mon petit miracle quotidien.

La conduite de ma meilleure amie était à son image - vive et sans peur- c'est pourquoi je ne lui en ferais jamais le reproche, je l'adorais telle qu'elle était! Thomas nous salua et nous présenta le reste du groupe, constitué en majeur partie de femmes pouvant postuler au défilé de Victoria Secret. Jasper grogna un salut et s'éloigna, l'oeil vissé à son écran de portable.

J'étudiais la situation pour installer ma serviette de façon stratégique. Une fois, la position optimale approuvée par la grande experte en serviette de plage -c'est-à-dire moi!- je me prélassais en observant le joyeux manège de mon entourage. Si en principe, je les rejoignais au beach volley, je faisais la fermeture du bar le soir même et je ne voulais pas arriver déjà K.O. De plus, Thomas n'avait visiblement pas besoin de moi, il était entouré par ses groupies. 

Je reportais mon attention sur les deux autres lézards à mes côtés. Mélissa n'avait même pas pris la peine de sortir sa serviette, elle était assise sur la mienne. Elle ne lâchait pas des yeux son téléphone et souriait à chaque fois que celui-ci bipait, soit toutes les deux secondes. Si elle continuait comme ça, elle serait bientôt aussi ridée qu'un parchemin. Jasper plus discret, faisait semblant de jouer à un jeu de guerre. Heureusement mon amie était trop absorbée pour remarquer l'attitude du jeune homme. Il passait du rire à la réflexion puis au sourire...

- Alors? Ton plan fonctionne? me demanda Thomas en s'effondrant à côté de moi. Je m'écartais vivement pour ne pas être asperger de sable. Ce qui échoua lamentablement.

- De quoi parles-tu ? chuchotais-je.

- Pourquoi chuchotes-tu? demanda-t-il malicieusement en adoptant le même ton que moi.

Je levais les yeux au ciel et l'entendis ricaner.

- Tu crois que je ne sais pas que tu veux caser mon frère avec ta meilleur amie?

- Pas un mot! m'écriais-je.

Je sentis leur regard sur moi et je me forçais à adopter un ton plus calme.

- Ne fais pas tout capoter! le suppliais-je en joignant les mains.

- Du calme Cupidon, je n'en avais pas l'intention. C'est une bonne idée. Depuis le temps qu'ils se tournaient autour! ajouta-t-il d'un ton désabusé.

*****

Je les quittais en fin d'après-midi. Il fallait encore que je me change avant mon service. Jasper avait rejoint le groupe au beach volley, surement pour éviter d'attirer trop l'attention. Quand à Mélissa, qui était plutôt joyeuse, pour ne pas dire euphorique et rêveuse, ses sourcils se fronçaient de plus en plus. Elle fixait déséspérement son téléphone, qui restait muet. Mon coeur se serra pour elle, mais c'était pour son bien. Si elle savait que c'était Jasper, elle ne lui répondrait plus, peu importe l'attirance qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre.

J'attendais le bus quand mon téléphone sonna. Surprise, je me dépêchais de le récupérer. Un message de Jason. Mon coeur s'accéléra. Je cliquais sur son nom en essayant de ne pas hurler de joie. Il m'avait envoyé une photo. Je mis en route le téléchargement et maudis mon téléphone. Pourquoi était-il si long?! C'était une photo de moi. Il avait du la prendre quand j'étais sur le balcon, à moitié de profil, je regardais un ménate. Je ne l'avais pas entendu arriver. La photo était magnifique. Je voulus le remercier mais je ne savais pas vraiment quoi lui dire. Il n'y avait pas de message, juste l'image. En soupirant, je rangeais mon téléphone. Jason n'était pas facile à oublier, surtout quand il était aussi présent.

*****

A 23h26 précisément, je craquais et lui répondis un «merci». J'aurais voulu être plus éloquente mais j'avais le cerveau vide. Quand je rentrais finalement chez moi, il n'avait pas daigné répondre.

Je me blottis sur mon canapé-impossible-de-passer-à-autre-chose-quand-je-m'endors-et-me-réveille-sur-l'un-de-ses-cadeaux. Je finis par m'endormir, épuisée de trop penser à lui.

Un moment d'égarementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant