J'allais me relever, puisque je suis toujours à son niveau mais elle attrape mon visage avec ses petites mains et m'embrasse la joue avant de me dire au revoir. Je n'ai pas réussi à lui sourire mais elle a compris. C'est l'essentiel. Elle a compris, avec des mots d'enfants, ce qui s'est passé pour moi et pour Nathan.
Je sors de l'ascenseur lorsqu'il arrive à mon étage et me dirige vers mon ancienne chambre en essuyant tant bien que mal mes larmes. La porte est entre-ouverte mais je frappe quand même pour m'annoncer. En attendant, je rabaisse ma capuche sur mes épaules.
- Oh, Allison, mais... Tu as pleuré on dirait ? me questionne Cathy, la mère de Nathan.
- Ce n'est rien... Comment va Nathan ? je m'empresse de lui demander.
Elle soupire et me fait entrer dans la pièce. Elle était seule à l'intérieur.
- Son état est stable mais ça ne s'améliore pas, malheureusement...
Je hoche la tête mais continue quand même mon interrogatoire :
- Cathy... Ne me dis pas que tu es restée toute la nuit et toute la journée à son chevet ?
Je la connais par cœur et je sais qu'elle serait capable de tout pour son fils. J'ai aussi remarqué les cernes violettes en dessous de ses yeux bleus.
- Pas toute la nuit, non. Je suis revenue ici à six heures du matin. Sébastien a pris le relais de vingt-trois heures à six heures.
- Tu dors trop peu Cathy... Va te reposer un peu chez toi, tu habites à côté en plus. Je vais prendre le relais jusqu'à dix-huit heure quarante cinq, après il faut que j'aille voir le psy.
Elle hoche la tête. Elle comprend mon besoin de me retrouver seule avec Nathan et il faut aussi qu'elle soit raisonnable et qu'elle aille dormir un peu.
- D'accord, je t'appellerai, Allison.
- Non, je n'ai plus de téléphone.
Elle acquiesce et m'embrasse un million de fois, me souhaitant bonne chance et s'en va, attrapant son sac à main au passage. Lorsqu'elle n'est plus là, je décide de fermer la porte derrière elle pour être seule. Seule avec Nathan, rien que tous les deux.
Je me tourne vers lui et admire sa beauté. Même s'il est plus maigre qu'avant, même s'il est d'une pâleur extrême et même s'il est impassible, il reste beau. Il l'a toujours été d'ailleurs. Grand, les cheveux constamment en bataille et ses yeux bleus. Pas d'un bleu pâle comme le ciel en été, non. Un bleu comparable à la pureté de l'eau de mer, en pleine saison printanière. On pourrait même voir des vagues dans ses yeux, ils sont tellement envoûtants et si... irréels.
Je lui attrape la main et décide de lui raconter ma journée, comme je le faisais, pendant des heures avec lui au téléphone. Et puis, ça me permettra de m'évader, même le temps de quelques minutes s'il le faut.
- C'est dur, Nathan... C'est dur de se dire qu'on ne reverra plus certaines personnes. Ils me manquent, tu sais... Sarah et Dylan tout particulièrement. C'était mes meilleurs amis, à la vie, à la mort, tu te rappelles ?
Je garde le silence, comme si j'attendais qu'il donne une réponse à ma question. Et puis, réalisant qu'il ne pourra pas me la fournir, je continue :
- Je n'ai pas osé ouvrir mon ordinateur, Nathan. J'ai peur. Peur de se que je vais trouver sur les réseaux sociaux. J'ignore ce qui s'est dit pendant tous ces jours interminables, j'ignore ce qui m'a été envoyé. J'appréhende de devoir tout lire, tout regarder, répondre aussi. Je ne suis pas encore prête. Ça peut paraître complètement fou que je ne veuille pas savoir ce qui s'est passé mais je n'en ai pas le courage...
Quelques sanglots s'échappent et je ne les retiens pas. Je les laisse couler, ce n'est pas une honte de pleurer. Au contraire, ça prouve qu'on a des sentiments et qu'on n'est pas insensible aux obstacles de la vie.
- Maman dit que je déprime mais ce n'est pas vrai. J'ai seulement envie d'être seule. Elle me reproche aussi de ne pas manger mais comment veux-tu que j'arrive à avaler quelque chose alors que je pense sans cesse à tous ces morts et... à toi ! Tu es l'une des personnes que j'aime le plus au monde Nathan. Ça fait plus de trois ans qu'on est ensemble, tu ne peux pas m'abandonner comme ça... J'ai espoir que tu survives, que tous ces médicaments et traitements seront efficaces. Je t'en supplie, ne me laisse pas... Pas toi...
Je me lève et me penche au dessus du lit, au dessus de son visage. Je le fixe quelques secondes avant de déposer mes lèvres sur les siennes. Elles paraissent mortes mais je m'en contente amplement. Le contact de ses lèvres contre les miennes m'avait manqué et les mêmes papillons au creux de mon ventre se font sentir.
Je m'assois à nouveau sur la chaise en bois et continue le récit de ma journée :
- Une petite fille m'a parlé dans l'ascenseur. Elle était belle comme tout. Elle s'appelait Noémie. C'est beau comme prénom, je trouve. Elle m'a interrogée sur mes blessures, celles que j'ai aux mains. Je lui ai dit que les blessures physiques n'étaient pas les plus douloureuses, que c'étaient les psychologiques. C'est vrai. Physiquement, je ressens la douleur mais elle est beaucoup plus faible que celle qui se trouve dans ma tête.
Je marque un temps de pauses, pour réfléchir un peu à mes paroles. Je me lève de la chaise et me dirige vers la grande fenêtre. Je regarde la vue imprenable sur la ville. C'est beau. La hauteur aussi est belle. Nous sommes quand même au huitième étage, c'est très haut. Je remarque qu'il n'y a aucune poignet pour ouvrir les fenêtres, sûrement en prévoyance de suicide...
Toujours en contemplant l'étendue de la ville, je parle à Nathan.
- Je lui ai parlé de toi aussi. Enfin, de nous. Elle m'avait demandé si j'avais un amoureux. C'était mignon, tu aurais dû voir...
Je déglutis fortement et continue :
- Je lui ai dit que des gens s'étaient amusés à faire la guerre sur nous. Comme ça, ça peut paraître complètement débile comme propos et puis... je comprends. C'est pas très compréhensible ce que je dis. Mais elle a compris. Du haut de ses six ans, à peine, elle a compris. C'est peut-être tôt pour une petite fille que de savoir que des gens en tuent et en blessent d'autres mais je ne l'ai pas vu effrayé le moins du monde. Peut-être que j'ai employé les bons mots ? Je l'ignore...
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Moment intime entre Nathan et Allison que je trouve très touchant 😏J'espère malgré tout que l'histoire vous plaît toujours ! 😍
Pleins de bisous à vous 😘
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À la Vie, à la Mort !
Short StoryEt la mort a surgit soudain. Elle s'est immiscée dans les moindre recoins de ma vie, détruisant tout sur son passage, y compris ma petite personne. Ma vie a basculé du jour au lendemain à cause d'eux ! Ces monstres qui m'ont tuée en me laissant viva...