À la Vie, à la Mort !

☠ Chapitre 26 ☠

La nuit était agitée pour moi. J'ai eu du mal à trouver le sommeil et je n'ai pas arrêté de me réveiller durant toute la durée de la nuit. Finalement vaincue par mes propres démons, je me suis levée à l'aube. J'ai alors configuré mon nouveau téléphone pour passer le temps et oublier, ne serait-ce que quelques instants, ce qui se passerait quelques heures plus tard.

Là, je suis assise face à mon bureau. Je m'apprête à faire quelque chose que je vais sûrement regretter par la suite : regarder quelques vidéos sur les attentats. Je voulais depuis quelques jours les visionner, mais seule. Je ne voulais pas de compagnie pendant ce moment où j'allais enfin pouvoir tout extirper de moi.

Alors j'ouvre mon ordinateur, l'allume, ouvre une nouvelle page Internet et tape sur le clavier les dernières lettres qui me séparent de mes plus grandes peurs. Mais je ne renonce pas. Au contraire, je frappe sur le clavier de plus en plus vite. Des dizaines, voir des centaines de vidéos, s'affichent sur mon écran. Ma main droite tremble sur la souris en cliquant sur la première vidéo. J'enfonce alors mes écouteurs dans les oreilles et souffle une dernière fois.

« C'est maintenant ou jamais », je me dis pour me rassurer.

Et la vidéo démarre. Elle est filmée par une des caméras de surveillances. On voit l'attaque se produire, mais avec la fumée qu'il y a, on ne voit pas grand chose. Le journaliste qui parle y va de ses petits commentaires et les images continuent. Par une autre caméra, on me voit moi, sortant de l'eau, complètement épuisée.

En regardant cela, je ne réagis pas tout de suite. J'ai un certain temps de réaction avant de me rendre compte que c'est bien moi surses vidéos. Que j'ai bien vécu tout cela en temps réel. J'enchaîne alors les vidéos les unes après les autres et, heureusement, on ne voit jamais mes amis se faire tuer. Certes, je suis complètement bouleversée et en larmes, mais c'est mieux comme ça. On voit les dégâts après les attentats mais on ne reconnaît personne sur les vidéos. Mais savoir que tout ceux présents ici sont des gens que j'ai connu et côtoyé pendant des mois, étendus, morts, ça me brise un peu plus de l'intérieur. C'est tellement horrible !

Mais j'en avais besoin. J'avais besoin de ces images pour tourner cette fameuse page. Ce soir, tout sera fini. Quand j'irai me coucher, à la fin de la journée, je me fais la promesse de dormir en souriant. Je veux qu'en me levant, demain, je redevienne la Allison d'il y a un mois et demi. C'est peut-être court, mais je n'oublie pas. Je n'oublierai jamais. Je dois juste vivre avec la douleur.

En refermant mon ordinateur, je reste quelques minutes à fixer mon mur, sans esquisser un seul geste. Je ne pense à rien. Enfin si ! Á cet après-midi. Je dois me montrer sous ma meilleure forme. Il faut que je montre à ma famille et aux familles des victimes que je suis là. Je suis une survivante et je reviens plus forte. Je ne peux pas me laisser mourir. Pour eux. Je leur dois bien ça après ce qu'ils viennent de vivre.

Je pousse un dernier soupire de soulagement, sèche mes dernières larmes et vais prendre une douche. J'enfile ensuite mon leggings et mon fidèle sweat à capuche. Je me rends ensuite dans la chambre d'ami où dort actuellement Margaux. Je m'approche doucement du lit et m'assois sur le bord. Je la secoue légèrement en la regardant dormir. Elle est tellement innocente de cette manière.

- Réveille-toi ma belle..., je dis doucement. C'est aujourd'hui...

Ma voix se brise à la fin de ma phrase. C'est instinctif.

- Margaux...

Elle ouvre finalement doucement les yeux avant de les poser sur moi. Elle sourit automatiquement. Et puis, sûrement se souvenant de la journée qui nous attend, elle fronce les sourcils et pousse un long soupire.

- Allez, va prendre ta douche, je t'attends en bas pour le petit déjeuner, je l'avertis en sortant de la chambre.

La cérémonie est dans quatre heures et je me dois d'être prête. Je me dois d'être à la hauteur, pour tous ces gens. Mais surtout, pour ma famille.