☠ Chapitre 17 ☠

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Il y en a toute une centaine. La nuit va être longue et pleine d'émotions mais je suis enfin prête. Prête à voir la réalité en face, prête à répondre à tous ces gens qui attendent de mes nouvelles. En ouvrant les enveloppes, je remarque que beaucoup en ont préparé des nouvelles pour les retours. Comme cela, je n'aurai qu'à répondre, à placer ma feuille dans la nouvelle enveloppe et renvoyer tout cela au destinataire. Et tout ça, sans rien payer. Heureusement qu'il y en a qui ont fait cela parce que je me serai ruinée à tout renvoyer.

Je pioche une lettre au hasard. C'est une enveloppe. Je l'examine parcimonieusement et remarque que des dizaines de cœurs ont été dessinés aux feutres et des « Courage », « Je t'aime », « Vivre ce n'est pas survivre » ont été écrit partout sur l'enveloppe, parfois sur les cœurs même. J'ai les larmes aux yeux rien qu'en voyant ces mots. Ceux qui m'ont le plus frappés, ce sont « Vivre ce n'est pas survivre ». Tellement de mots d'espoir et d'aide. Comment ne pas être émue lorsque vous vous dites que toutes ces personnes ont écrit ces mots rien que pour vous, en pensant à vous ?

La lumière de ma chambre éclairant le tas de feuilles et même plus, j'hésite à reporter ma lecture à demain. Mais finalement, j'éloigne les doutes de mon esprit et ouvre cette enveloppe merveilleusement décorée. J'en retire une feuille de papier remplie d'écriture. Je me cale contre ma tête de lit et commence à lire :

« Bonjour Allison, tu ne me connais probablement pas mais nous sommes dans le même lycée. Je suis aussi en première mais je n'ai jamais eu la chance de te parler. Au fond, c'est bizarre à dire, mais j'ai toujours eu une certaine admiration pour toi, même avant ces affreux attentats. Tu es quelqu'un que j'admire tout particulièrement. Malgré que tu sois très belle, la beauté ne fait pas tout. Á vrai dire, je passais parfois des récréations entières à t'observer. Tu es tellement généreuse, gentille, pleine d'attention pour les personnes qui en ont besoin. Tu es une personne très forte Allison et tu es pleine de courage.

Ces attentats t'ont forcément atteint, tu dois être triste, affaibli et je pense que si je devais te voir, en ce moment même, je ne verrai plus cette étincelle qui brillait dans tes yeux lorsque tu étais une jeune fille comblée. Et pourtant, nous voulons tous que tu la retrouves, cette étincelle. Je veux, nous voulons, que cette flamme brille à nouveau dans ton regard.

Garde espoir et souviens-toi que vivre ce n'est pas survivre. Vis ta vie et n'essaie pas de survivre. Surmonte toutes ces épreuves et ressors-en plus forte ! ».

Ça y est, les larmes coulent à flots sur mes joues. Je m'empresse de me placer sur la chaise de mon bureau et de lui écrire une réponse qui me vient du fond du cœur. Une fois fait, je dépose l'enveloppe dans un coin de mon bureau et décide de prendre un second papier. Cette fois, il n'y a pas d'enveloppe mais seulement une feuille avec des phrases telles que :

« La vie est faite de joie mais aussi de tristesse. Mais comment veux-tu que nous connaissions la joie si nous n'avons jamais été triste ? ».

« Être triste, c'est une chose. Vouloir s'en sortir en est une autre. Le faire est une tout autre histoire ».

« Chacun à ses obstacles dans la vie, chacun à ses épreuves. Nous devons chacun les affronter pour pouvoir s'en sortir. Aujourd'hui, Allison, ton combat est peut-être plus difficiles que les autres mais tu te dois de le combattre jusqu'à la fin ! ».

C'est tellement beau ! Je plaque une main sur ma bouche et étouffe mes sanglots. Je n'en reviens pas de toutes ces personnes qui me soutiennent. C'est tellement magnifique, tellement improbable.

- Merci... Merci..., je murmure en baissant respectueusement la tête.

Un mot tombe du sac où se trouve toutes les lettres. C'est un simple petit bout de papier où il y a écrit dessus :

« Redeviens la jeune fille pleine d'énergie que nous avons tous connus !

Signé Margaux ».

Je souris. Margaux est une grande amie à moi mais nous ne nous trouvons pas dans la même classe. Avec du recul, j'en suis plutôt ravie.

Je prends ensuite une seconde enveloppe. Comparée aux précédentes, celle-ci, je l'ai choisi. Pourquoi ? Parce que l'enveloppe était blanche immaculée, sans aucun dessin dessus. En fait, elle m'a plus intriguée qu'autre chose. Je l'ouvre délicatement et, comme je le pensais, la feuille se trouvant à l'intérieur ne comporte pas non plus de graphiques mais seulement des phrases alignées les unes à la suite des autres, racontant une histoire.

« Bonjour Allison, on ne se connaît pas, on ne sait jamais vu. Je ne connais ton visage que grâce aux photos qui ont été retransmises à la télévision et celles des réseaux sociaux. Je sais que tu as perdu une grande partie de tes amis, que ton petit-ami est entre la vie et la mort et que tu vas au plus mal. Je compatis entièrement avec toi cette douleur car, moi aussi j'ai perdu deux personnes très chères à mon cœur ce soir-là. Mes parents. Je suis devenue orpheline du jour au lendemain, sans plus aucun parent pour me soutenir. Les parents sont les personnes les plus importantes dans la vie. On a les amis, les copains, mais ce n'est que du superflus. Ce ne sont pas eux qui resteront à ton chevet toute la nuit parce que tu es malade, ce n'est pas grâce à tes amis que tu as réussi les choses que tu as entreprise dans ta vie. Tout ceci, c'est grâce à ton papa et à ta maman. Moi, je n'aurai plus la chance de pouvoir prononcer ces deux mots. Certes, j'ai aujourd'hui vingt-six ans, mais mes parents comptaient autant pour moi que si j'en avais cinq. Alors, quand j'ai appris leur mort, j'étais effondrée. Je n'arrivais plus à penser normalement et j'avais une haine qui grandissait de jour en jour. Mais lorsque, deux jours plus tard, les journalistes ont annoncé qu'il y avait une survivante, j'étais aux anges. J'étais heureuse car tu représentes l'espoir. L'espoir que nous survivrons à tout ça. Á toute cette haine, à tous ces terroristes qui ruinent notre vie plus qu'autre chose.

Je veux te faire comprendre Allison que, pour surmonter un accident comme celui-ci et pour survivre dans cette vie, il faut voir le côté positif dans toutes les choses que tu entreprends ou qui t'arrivent sans prévenir, comme cet accident. Tu dois chercher cette positivité partout où tu vas. Tu dois te demander en ce moment où elle se trouve ? Et bien elle est là, autour de toi. Elle est avec toi, tous les jours. Ce sont tes parents et tes frères et sœurs. Ce sont ce que tu as de plus précieux dans ce monde alors ne gâche pas votre amour les uns pour les autres pour cet attentat. Ça peut paraître fou ce que je te dis mais peut-être que tu es encore trop jeune pour le comprendre ou encore trop traumatisée par les attentats. Mais tu comprendras la portée de mes paroles lorsque tu te rendras compte que ta famille sera toujours là pour toi alors que les amis peuvent partir du jour au lendemain...

J'espère que tu auras compris le sens de cette lettre, si non, relis-la dans quelques temps. Sur ce, je te laisse à la réflexion et te souhaite bon courage ! ».

Si. J'ai compris. J'ai très bien compris ce que tu as voulu me dire. La famille est ce qu'il y a de plus précieux dans ce monde...

À la Vie, à la Mort !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant