Emilie: la pluie

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Jim nous a invités pour passer trois jours chez lui avant notre départ pour un festival quelque part en Angleterre. Nous voilà tous embarqués à bord du train direction Fort William.

Monsieur Ours est grognon malgré un sursaut de bonne humeur cette après-midi dans la cour...

Bref, je suis ravie que sa sœur nous accompagne ! Dans le train, les garçons somnolent. Ils cuvent leur bière de la veille alors que Meghan et moi avons seulement risqué la crise de foie. Miam, quelle glace !

Il est tard lorsque nous arrivons à destination. Une femme sans âge, aussi rousse que moi, coiffée avec élégance semble nous attendre. Son visage délicat s'éclaire à la vue de Jim.

-James ! S'exclame- t-elle, ravie ! James Lochlin ! Espèce de fils indigne ! Viens embrasser ta mère !

Lorenzo et Neil ricanent à la vue du visage empourpré de leur ami. Mais qui s'empresse de rendre son étreinte à sa maman !

Ça fait plaisir à voir ! Je me détourne un peu, par respect et par égoïsme, car cela réveille de mauvais souvenirs en moi...

« Emilie, n'approche pas trop de ta mère, tu vas lui faire ma l! Emilie, laisse maman se reposer »

Maman, toujours malade et fatiguée même en période de rémission. Allongée, dans son canapé, ses lèvres dessinaient un pauvre sourire sur son visage émacié. Elle me caressait tendrement les cheveux avant de laisser tomber son bras, épuisée par ce mouvement.

-Emi, on avance ! S'écrie la voix de Meghan.

Je me secoue et prends mon sac avant de suivre les autres.

...

Le manoir de James Lochlin Junior, quatrième du nom, monsieur a des origines aristocrates, est tout simplement à vous couper le souffle.

Sa famille, aussi, est extraordinaire ! Il y a la maman de Jim, Carrie Lochlin, toute douce mais qui visiblement mène son petit monde à la baguette, le papa de Jim, James plus taciturne, le plus jeune frère de Jim, Keith, un adorable bout de chou de six ans rempli de taches de rousseur et, enfin, Logan, adolescent, aussi ténébreux que Neil, ne répondant que par monosyllabe. Il est tellement ravi de voir les P.O.Y. qu'il les harcèle de questions.

Mais celui que je trouve génial, c'est James Sénior ! Un monsieur extraordinaire et pertinent ! Je retrouve un peu de Grand-papa chez lui. Mon chez moi me manque beaucoup.

Nous mangeons un peu de pain et puis dodo!

Alors que l'extérieur du manoir fait penser aux demeures hantées des contes, l'intérieur est très moderne et décoré avec goût. Nos chambres sont simples et spacieuses. Je me retrouve avec Meghan et nous nous écroulons de fatigue sur le lit confortable.

Le lendemain, nous partons en balade près du Ben Nevis, le point culminant de l'Ecosse. Chez moi, il y a Baraque Fraiture mais c'est moins haut et moins beau. Ce qui ne nous empêche pas d'en être fiers !

C'est magnifique ici. Le respect se lit clairement dans les yeux de Jim et son père pendant qu'ils nous parlent de leur région. Nous nous enfonçons dans la forêt, accompagnés des taquineries qui fusent de toute part entre les garçons.

Meghan est parfaitement équipé pour cette balade et avance d'un pas décidé.

Carrie a dû me prêter un pantalon et pour une fois je ne dépareille pas.

Gabe et Ethan marchent à mon côté alors que Darren colle aux basques de Meghan. Il est tenace, c'est bien mais Neil ne va pas céder si facilement !

-Tu as pensé quoi du concert Emi ? Me demande Ethan en me regardant gentiment.

-Oui parce que, miss j'ai un avis sur tout, est bien taiseuse ces jours-ci, renchérit Gabe, fier de sa formulation.

-J'ai beaucoup apprécié leur intervention mais c'est dommage qu'on ait eu besoin d'eux.

Au moins, je suis honnête. Je ne suis pas obligée d'avouer qu'après une dispute, je me suis jetée sur Neil. Oh, il faut que j'oublie cet épisode peu glorieux de mon histoire. Quoi que ce fût si...si...

J'entends Neil qui grogne une réponse à Lorenzo et je souris en me moquant de moi-même. En tous cas, cela ne l'a pas transformé en prince charmant !

-Je pense que nous devrions remanier notre setlist. Il faut penser à ce qui fait notre succès en spectacle.

Soyons un peu professionnels !

Intéressé, Gabe se tapote la joue.

- Pas bête Emi. Je pense qu'on pourrait plancher sur une version rock de Sia notamment. Tu es fabuleuse avec ce morceau. Il faut faire dans la différence ! Acquiesce Ethan.

-Oui, pour l'instant, nous sommes un bon groupe lambda c'est à dire ni bon ni mauvais mais nous devons nous différencier et proposer d'autres choses tout en ne s'éloignant pas de trop de notre identité. Dit Gabe pensif.

La pluie s'est mise à tomber tout doucement. Nous sortons les imperméables.

-Oh des chaperons rouges! Je m'écrie en tapant des mains.

-Attention au grand méchant loup ! Nous avertit le papa de Jim en imitant la méchante bête ce qui déclenche l'hilarité générale.

Mais nos rires ne durent pas longtemps. La pluie devient vite un rideau impitoyable et se transforme en gros grêlons douloureux.

-Courez !

On ne voit plus rien ni devant ni derrière ni sur les côtés.

J'entends un hurlement «Tous à la cabane! » Mais je ne vois pas où elle pourrait être, cette cabane!

Une main attrape la mienne et me dirige sur un sentier. Sûrement Ethan, il y a plein de callosités sur la pulpe de ses doigts et je sens la sensation de bracelets en tissus sur mon bras. Il n'y a que lui, à ma connaissance, qui en porte.

J'entends le bruit de nos souffles et la grêle qui tombe sur les arbres. J'ai peur et en même temps il y a quelque chose de libérateur à courir sous la pluie pour se mettre à l'abri. Nous nous arrêtons brutalement. J'entends une porte qui s'ouvre et je me retrouve propulsé à l'intérieur.

Ouf, ça fait du bien. J'essuie l'eau qui ruisselle de mon capuchon sur mon visage. Et puis, je tilte...

La cabane est vide !

Elle est toute petite contenant deux couchages dont une avec une couverture, un bureau vide et des sièges. Ça sent le renfermé et la poussière. Où sont les autres?

Ethan est derrière moi, je me retourne pour lui poser la question à voix haute quand je m'arrête net.

Ce n'est pas Ethan.

Neil, sombre et dégoulinant de pluie. Oh non...

-Où sont les autres ?

-Sûrement dans la cabane où nous devions aller. Répond monsieur Ours, le bougon.

-Et ce n'est pas celle-ci ?

-Bravo, miss Marple. Non, ce n'est pas celle-ci. L'autre cabane est immense, il y a de quoi de manger et boire. Et les autres y sont.

Il s'installe sur un couchage me laissant l'autre avec la couverture .Je grelotte en m'asseyant à mon tour et tire la couverture sur moi.

Neil me regarde d'un air exaspéré. Qu'est-ce qu'il est beau, le bougre, avec ses cheveux trempés qui lui tombent dans les yeux. Il grimpe à côté de moi, me prend contre lui et me frictionne vigoureusement.

Je n'ai plus froid du tout.

J'ai même très chaud appuyé contre le torse dur de Neil. Quand il sent que je me détends, il arrête de frotter et se met à fredonner un air connu. Je fonds...


Dans les yeux d'Emilie( en réecriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant