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Je taille vigoureusement un morceau de bois ramassé un peu plus tôt dans la forêt, à l'aide de mon plus fidèle ami, mon couteau de chasse. Mon carquois se vide à vue d'œil, et je passe la plupart de mon temps à tailler de nouvelle flèche, en regrettant amèrement ma vie sur l'Arche. Elle n'était absolument pas idyllique, au contraire. Mais j'étais loin d'être aussi seule.

La solitude.

D'aussi loin que je me souvienne, elle à toujours été présente, tapie dans l'ombre en attendant ma déchéance. Elle semble me coller à la peau. Pas seulement depuis ces six dernières années, où j'ai été condamner à l'isolement. Mais depuis ma naissance. Délaissée par ma mère, étiquetée comme "fille de la trainée de l'Arche" à l'école, on ne peut pas dire que j'ai un jour été entouré. Paradoxalement, cette même solitude m'a tenu compagnie.
Seule, du berceau à la tombe.

J'ai pourtant eu l'occasion d'enfin y mettre un terme, lorsque j'ai été expulsé de notre station orbitale, utilisé comme un vulgaire cobaye et envoyé sur une Terre irradié avec cent autres détenus. Mais, n'écoutant que ma lâcheté et ma peur, je me suis enfui. Une fois de plus.

Je jette un dernier coup d'œil satisfait à ma nouvelle flèche, avant de la glisser dans mon carquois et de reprendre mon chemin, pour sortir de cette forêt infernale et dangereuse et me rendre sur la plage, où j'ai établi mes quartiers depuis quelques mois.

Alors que je marche tranquillement, un bruissement anormal dans le silence presque sacrée de la forêt me pousse à m'arrêter. J'ai appris -à mes dépens- qu'un bruit étrange ne présage rien de bon. Mon instinct réagit aussitôt. Analyse les alentours. Rien. Lève la tête et observe les arbres, ces enfoirés aiment s'y cacher. Mais toujours rien.

L'appréhension me gagne. Peut-être était-ce uniquement un animal, mais j'en doute fortement. Après un dernier coup d'œil, mes jambes s'élancent automatiquement. Je cours aussi vite que je le peux, pressée de regagner la plage.

Je sens deux mains se refermer sur mes hanches avant de me propulser au sol. Ma tête heurte une pierre, et mes lèvres se tordent en un rictus de douleur tandis qu'un liquide chaud s'écoule sur mon front.

Je me relève d'un bond, jetant des coups d'œil affolé dans tous les sens pour découvrir mon assaillant. Il n'est plus là. Enfin, il se cache, plus tôt.

- Sors de ta cachette, connard !

Je porte ma main vers mon arc et réalise avec effroi que mes doigts caressent uniquement le vide. J'ai dû le perdre lors de ma chute. Peu importe. Déterminée, je sors de ma poche mon fameux couteau de chasse. Je me mets en garde en attendant que mon adversaire daigne se montrer. Il sort enfin de derrière son arbre, une épée à la main.

《 - Et si tu dégageais de mon chemin, lui proposais-je.

- Tu devras passer sur mon cadavre, répond-il d'une voix caverneuse.

- Donne moi quelques minutes, ça ne devrait pas être très long, répliquais-je légèrement amusée. 》

Pour toute réponse, il se rue vers moi. Je m'accroupis et lui assène un coup dans le ventre. Malheureusement, l'entaille n'est pas assez profonde pour le faire fléchir. À peine ai-je eu le temps de me redresser qu'il me fauche les jambes. Ma tête cogne violemment le sol et tout devient flou. Je ne parviens pas à rassembler l'énergie suffisante pour me redresser.

Il s'approche et serre son épée entre ses deux mains. Tandis qu'elle fend l'air, je parviens à me dérober de justesse en roulant sur le côté, mais pas assez rapidement pour éviter une entaille au bras.

Bellamy et Calliopée, le Feu et La Glace - The 100Où les histoires vivent. Découvrez maintenant