3. Se remotiver

10.7K 381 195
                                    

3. Se remotiver

Antoine et moi courions ainsi ensemble depuis de longues minutes, bavardant joyeusement. Nous discutions d'un peu tout et rien, nous ne nous connaissions pas vraiment : je ne savais de lui que les bribes que j'avais pu lire ou voir à la télévision, et lui ne me connaissait pas du tout. Il était agréable et intéressé - fallait dire que le foot n'était pas non plus quelque chose d'inintéressant pour lui - se montrant parfois gêné lorsqu'il abordait son propre jeu ou quand je lui posais des questions à propos de lui-même.

De la même manière, je ne parlais que de mon équipe et du foot en général. C'était agréable de pouvoir en parler avec d'autres personnes que mes amies, parce que c'était différent avec Antoine : ce n'était pas comme si nous étions deux joueurs discutant de la technique de ceux que nous allions affronter. Je me sentais comme une « simple » fan de foot me chamaillant à propos des meilleures équipes, avec un autre fan de foot.

- Tu plaisantes ou quoi, Arsenal fait une saison monstrueuse ! m'offusquai-je tout en continuant à trottiner à ses côtés.

- Peut-être, mais tu peux pas me dire que Manchester United est une équipe minable, on va pas être d'accord ! répondit-il en me faisant les gros yeux.

- T'as vu leur début de saison, c'est n'importe quoi !

- Tu peux pas juger sur trois matches, rétorqua-t-il d'un air renfrogné.

- Ouais ben toi non plus, je te signale.

Il me fit une grimace, fronçant le nez, ce qui me fit rire parce que je savais que j'avais au moins gagné ce round. Il fit mine d'être vexé et me poussa doucement sur le côté, ce qui me fit d'autant plus rire. Il rit à son tour.

C'était vraiment amusant et revigorant comme échange, et pendant ces deux heures que durèrent la course, je ne pensai pas à Jordan et à son comportement distant.

Lorsque nous arrivâmes à un croisement indiquant deux directions différentes, je regardai ma montre et vis que j'avais couru pendant environ une heure et quarante-cinq minutes, j'avais donc été un peu plus rapide que prévu.

- Bon, c'est pas que ta compagnie me déplait, commença Griezmann en s'arrêtant, tandis que je faisais de même, mais je dois aller dans cette direction pour rejoindre Clairefontaine et le reste de l'équipe.

Il me fit un clin d'œil.

- C'était un plaisir, répondis-je avec un sourire en reprenant mon souffle, mes mains sur les hanches.

- Pour moi aussi.

Nous nous sourîmes mutuellement avant de détourner la tête en même temps. J'étais gênée par son regard. J'avais toujours eu du mal à soutenir le regard des gens qui avaient les yeux bleus, parce que je les trouvais totalement transparents. C'était, à mon sens, le regard le plus changeant qui soit : il pouvait refléter une froideur extrême autant qu'une chaleur intense. C'était perturbant, et les yeux de Griezmann n'échappaient pas à la règle.

Je me raclai la gorge pour reprendre une contenance et le regardai à nouveau, sourire aux lèvres.

- On aura peut-être l'occasion de se recroiser, dit-il avant que j'aie pu ouvrir la bouche.

- Peut-être, oui, répondis-je en lui souriant.

Il glissa sa main sur sa nuque, comme gêné, et je lui fis un vague geste de la main avant de partir dans la direction opposée à la sienne.

- A la prochaine, Griezmann ! lançai-je.

- Hé, mais je connais même pas ton nom, moi ! s'indigna-t-il tandis que je m'éloignais en rigolant de sa remarque.

Sous le maillot Bleu || GriezmannOù les histoires vivent. Découvrez maintenant