26. Confrontation

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26. Confrontation

Tu peux le faire, pensai-je en arrivant devant le commissariat. Tu peux le faire, tu peux le faire, tu peux le faire.

Il fallait que je le fasse.

Près d'un mois était passé depuis mon petit séjour chez Antoine. Je n'avais pu rester longtemps chez lui, malheureusement, car nous avions tous les deux des obligations dans des pays différents, mais il me manquait vraiment. Je n'avais jamais vécu de relation à distance. Cependant, après mon histoire avec Jordan, je sentais que j'avais besoin d'un peu de temps pour réapprendre à être avec quelqu'un, et Antoine se montrait assez patient et attentionné pour cela.

Je ne lui avais toujours pas parlé de ma convocation au poste de police et, finalement, je trouvais cela inutile. Je n'osais pas le lui avouer, il s'était déjà bien assez inquiété pour moi.

Mes rendez-vous avec ma psychologue m'avaient redonné cette force. Je voulais faire les choses seules, je voulais prendre ma vie en main et arrêter de me reposer sur les autres. Je ne voulais pas les faire souffrir.

Et surtout, je ne voulais pas être un poids pour Antoine.

Prenant une grande inspiration, je sortis de ma voiture pour rentrer dans le bâtiment, avec l'impression terrible d'imploser. La dernière chose dont j'avais envie, c'était de me confronter à Jordan, parce que je ne savais pas à quoi m'attendre. J'étais dans l'appréhension. J'étais partagée entre le sentiment de l'avoir trahi, et celui d'avoir eu raison.

- Suivez-moi, m'enjoignit le Sergent Richard après que j'aie demandé à le voir.

Mon cœur tambourinait contre ma poitrine. Je me sentais au bord du malaise, mais il fallait que je me montre forte. Je ne pouvais plus m'effondrer quand tout allait mal, je ne pouvais plus dépendre des autres.

J'essayais de me convaincre.

Je réajustai mon sac sur mon épaule tandis que je suivais le policier qui me conduisait dans une salle semblable à celle dans laquelle il avait pris ma déposition, et cela réveilla la rancœur que je ressentais à son égard. Il avait eu l'air si compréhensif, la dernière fois, et désormais, il semblait complètement détaché. Et son soudain silence, son retrait, étaient pour moi comme une accusation. Il me réduisait au silence.

- Votre ex-conjoint ne devrait pas tarder à arriver, me dit-il en s'installant derrière son bureau. Vous avez des questions sur la procédure qui va suivre ?

C'était le moment ou jamais de m'affirmer.

- Oui, justement, commençai-je en tenant mes mains tremblantes, je comprends vraiment pas comment on peut classer ma plainte sans suite, je ne vous ai pas menti, vous avez eu les rapports des médecins –

- Ecoutez

- Bonjour, excusez-moi, le coupa Jordan en faisant irruption dans la pièce, accompagné d'un autre policier que je ne connaissais pas.

Ma respiration se bloqua dans ma gorge et diverses sensations contradictoires m'assaillirent tandis que je le regardais entrer dans la pièce. Il était vêtu d'un costard gris anthracite sur une chemise blanche dont les premiers boutons étaient défaits, fidèle à lui-même, toujours avec ce faible sourire de circonstance. Il m'inspirait tant de choses, à cet instant.

La peur. L'angoisse. La colère.

Et il y avait cet insupportable sentiment de trahison qui m'étouffait. Cette impression que je lui faisais une offense en portant plainte contre lui. A cette pensée, mes mains se crispèrent et mes ongles s'enfoncèrent dans mes paumes.

Sous le maillot Bleu || GriezmannOù les histoires vivent. Découvrez maintenant