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Les jours passaient toujours aussi lentement, rythmés par les visites de son médecin et celle de la femme qui lui pose des questions, visite qui ne lui était pas encore tout à fait familière. Il ne savait toujours pas pourquoi elle venait le voir deux fois par semaine, et encore moins pourquoi elle lui posait toujours les mêmes questions. En tout cas, il trouvait ça de plus en plus agaçant. Même si petit à petit, il commençait à s'habituer à son odeur. Mais seulement son odeur. Au moins, cela changeait du propre et du désinfectant qu'il avait l'habitude de sentir, vers une odeur plus fleurie et féminine. Tandis que ce soit sa voix, trop aigu, sa façon de marcher, trop rapide, ou encore sa façon d'écrire, trop bruyante, l'énervaient.

Les questions qu'elle lui posaient été répétitives, mais pas désagréables, et elle n'insistait pas pour avoir une réponse, en se contentant simplement de monosyllabes ou de hochement de tête. Donc d'un effort minime de sa part. De plus, Jungkook n'avait pas usé de ses cordes vocales depuis bien longtemps, et s'y habituer n'avait pas été simple. Après les quelques mots prononcés lors de sa première visite, le patient avait eu une soif atroce et une douleur horrible. Si horrible qu'il aurait pu s'en plaindre, mais la fatigue et la solitude l'avaient fait renoncer à cette idée absurde. Il en voulait beaucoup à la personne qui avait décidé de la compagnie de cette femme. Il n'avait eu d'autres choix que d'accepter. Et ce jour-là, il devrait en subir les conséquences.

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- Etes-vous prêt à mourir, Jungkook ? demanda t'elle.

Comme d'habitude, à cette dernière question, le concerné répondait affirmativement. Il avait l'habitude d'entendre les quelques secondes d'écritures qui suivait sa réponse. Et il savait que c'était le moment où il pourrait se rendormir et enfin avoir la paix qu'il attendait depuis qu'elle était arrivée. Pourtant, cette fois-ci, le grincement de la chaise, les sons provenant du sac de la femme, ou encore les bruits des talons contre le carrelage du sol n'arrivaient pas. Seulement un silence, pas même les respirations ne se faisaient entendre. Un silence long, pas vraiment gênant, mais plutôt ennuyant. Les yeux épuisés du patient ne voulaient pas vérifier l'absence de cette femme semblant avoir disparu sans un bruit. Mais sa présence se faisait encore ressentir, et après une longue inspiration, sa voix agaçante résonna à nouveau dans la pièce pour une ultime question :

- Si vous aviez la chance de pouvoir vivre à nouveau normalement, sans votre maladie, la saisiriez-vous ?

Cette demande, des plus étranges par rapport aux autres, avait pris le patient de court. Il ne s'attendait pas à une question supplémentaire après celle habituellement finale, et encore moins une question comme celle-ci. Il ne savait pas quoi répondre, surtout qu'il ne s'était jamais posé cette question. Il avait toujours vu la suite de sa vie comme une évidence, c'est-à-dire dans son lit d'hôpital, à ne plus pouvoir respirer seul, puis la mort. Facile, assez rapide, point final. Rien d'autre en dehors de la mort pour issue. Il attendait son décès depuis tellement longtemps, qu'il avait presque envie de répondre non. Mais en réfléchissant à cette interrogation, toutes les choses qu'il n'avait pas pu faire lui revenaient en mémoire, créant ainsi une très longue liste dans l'esprit du malade. Il mit ses dernières forces de la journée dans le hochement positif de sa tête pour répondre à cette fameuse et étrange question.

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Il avait dormi, d'une nuit sans rêve, comme il avait l'habitude d'en passer. Mais pour la première fois depuis qu'il était dans cet hôpital, il avait eu beaucoup de mal à trouver le sommeil qui ne le quittait jamais entièrement. Il avait eu l'esprit embrumé par le changement dans son quotidien. Il se demandait pourquoi lui avoir posé une telle question, comme si d'un claquement de doigt, sa maladie pourrait disparaître. En tout cas, s'il avait pu, il aurait souffert à cause de cette demande. Comme si on parlait du père Noël a un enfant dont on avait révélé tout le secret. Ou comme si on offrait une bouteille d'alcool à une personne qui se force de ne plus y toucher. C'est juste donner un espoir insupportable, presque réalisable, mais que l'on ne pourrait jamais atteindre. C'est cruel, voire même méchant, mais surement pas l'intention première de la psychologue.

Il s'était réveillé ce matin, comme tous les matins, et n'avaient pas ouvert les yeux. Il n'avait pas mangé le petit repas, ne sentant pas assez de forces dans ses membres pour pouvoir les mouver. Un repas de manqué n'était pas vraiment exceptionnel dans la vie du malade, mais pour tous les médecins qui le suivaient, c'était quelque chose d'horrible, qu'ils notaient à chaque fois, en prenant soin de faire passer toutes les vitamines ou protéines dans son prochain repas. Et ce plateau, qui repartait rempli de sa chambre une heure après avoir été déposé, fut le troisième du mois qui venait de commencer, ou plutôt de la semaine. De toute façon, il ne savait plus vraiment comment faire avec la nourriture, car une semaine sur deux, on lui disait qu'une demi-diète ferait du bien à son corps et qu'il ne souffrirait plus, pour finalement lui dire la semaine suivante que cela ne faisait qu'aggraver son cas. Rien que pour toutes ses histoires de nourritures où les autres de l'hôpital, il voulait être normal, ou mourir ailleurs.

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Son infirmier venait de passer pour s'occuper pendant quelques minutes de lui. Il était donc au alentours de quinze heures trente. Le patient ressentait aussi cette heure du début d'après-midi par la luminosité provenant de l'extérieur. Même en ce mois d'hiver, le soleil continuait d'illuminer sa chambre, sans vraiment la réchauffer, au plus grand plaisir du malade, qui avait horreur de la chaleur. Mais il avait aussi en horreur d'avoir froid. Le printemps et l'automne était donc des saisons parfaites pour lui, qui ne pouvait pas quitter sa couverture. Celle-ci était trop chaude pour l'été, mais trop légère pour les hivers enneigé. Et le chauffage de sa chambre ne lui permettait pas d'avoir une bonne chaleur, tandis que la climatisation n'avait pas put être installé dans son aile du bâtiment lors des travaux de réaménagement. Le corps du patient, de plus en plus faible, ne parvenait plus à créer sa propre chaleur et a le tenir à la température normale, vitale.

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Les bruits de pas résonnaient dans les couloirs blancs et vides de cette partie de l'hôpital. Les trois personnes adultes marchaient côte à côte, une en blouse blanche avec des documents sous le bras, et les deux autres habillées de façon ordinaire, et pourtant extrêmement stressés. Tandis que les trois personnes avançaient, le couloir semblait s'allonger pour devenir infini. Sur les côtés de celui-ci, les portes défilaient, toutes identiques les unes des autres, avec pour seules distinctions des numéros croissants a côté de chacune. Ils le savaient, ils s'approchaient de leur objectif, la chambre 539. Quand ils furent devant celle-ci, le médecin en blouse ouvrit la porte et les trois s'engouffrèrent dans l'étroite pièce carrée où régnait un seul lit, avec un malade semblant être endormi dedans.

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Une nouvelle chance ~JiKook~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant