Il lui fallut plusieurs jours pour peaufiner la chute de sa blague. Harley avait vérifié chaque détail, peaufiné tous les rebondissements, afin que son diable puisse sortir de sa boîte. Elle s'amusait de la minutie dont le chaos avait besoin pour émerger. C'était sans doute cela qu'on appelait la théorie du chaos pensa-t-elle. Ironiquement elle avait besoin d'établir un cadre bien précis que son double ferait exploser et éparpillerait aux quatre vents. A l'abri dans un vieux cirque abandonné depuis pas mal d'années, elle s'amusait de voir le monde s'affoler. Harley, avait entendu les journalistes relayer les SOS désespérés de la police de Gotham, depuis qu'elle s'était évadée de l'hôpital. Gordon suait à grosses gouttes durant ses multiples conférences de presse, à mesure que des nouveaux cadavres, broyés par la masse, étaient découverts çà et là. Il tentait d'expliquer, tant bien que mal, pourquoi l'enquête n'avançait pas. Les journalistes râlaient sur l'incompétence de la police et s'interrogeait sur l'absence de résultats de Batman. Le justicier, tout comme Gordon, semblait incapable de mettre la main sur elle. Harley en était plutôt fière, souriant amusée par l'idée de voir le chevalier noir aussi impuissant. Et ce n'était que le début, la presse et la télévision avait évoqué la mystérieuse jeune femme déguisée en clown et de son goût prononcé pour le vol d'explosifs. Mais qui pouvait-elle si les denrées explosives se faisaient de plus en plus rares ? Harley avait eu toutes les peines du monde à amasser son matériel. Mais à présent elle était fin prête.
Se faufilant jusqu'à sa voiture, elle emporta dans un sac tout ce dont elle aurait besoin pour faire sortir le Joker des Ténèbres. Lui aussi allait renaître. Elle roula euphorique, le cœur battant une chamade désordonné jusqu'aux collines derrière l'hôpital. Là, elle dissimula sa voiture puis, de son pas dansant et gracieux, s'immisça par le système de ventilation dans la partie la moins sécurisée d'Arkham, celle que les employés appelaient « la cave aux trésors ». C'était un espace gigantesque, au sous-sol de l'Aile Est, où étaient entreposés les archives de l'hôpital ainsi que les effets personnels des patients. Alors qu'elle frappait de toutes ses forces contre la grille rouillée de la ventilation, Harley contempla le bric-à-brac croupissant sous la moisissure. La grille retomba dans un bruit sourd dont l'écho se répercuta aux quatre coins de l'immense salle. La jeune femme se figea et attendit une quelconque réaction qui ne vînt pas. Il n'y avait pas de gardien, c'était bien ce qu'elle avait imaginé. Pourquoi envoyé un homme surveiller toutes ses reliques quand le personnel manquait cruellement aux étages supérieurs ? La lacune la fit sourire. Elle sauta prestement au milieu du fatras indescriptible et commença sa recherche. A mesure qu'elle avançait elle aspergeait les hautes étagères remplie de documents, de bijoux, de vêtements et de tout ce que pouvait contenir les cartons numérotés. Elle déambula ainsi en sautillant, au milieu des larges allées, en fredonnant un air enfantin, ses grelots tintant joyeusement autour d'elle, accompagnant sa démarche saccadée d'une musique entraînante, comme une invitation à la danse.
Arkham était probablement l'hôpital psychiatrique le plus sécurisé du continent américain. L'Alcatraz de la psychiatrie, comme elle l'avait décrit au professeur Pierce, dans son autre vie. Mais aussi impressionnant fut le système de sécurité, il n'en restait pas moins un système. Et tout système avait une faille, cette idée lui dessina un sourire gourmand. Celui d'Arkham était la ventilation vétuste, hérité de la lointaine époque de la famille Arkham, du temps où la bâtisse leur appartenait. Harleen l'avait compris en étudiant le plan que Lyle lui avait fourni lors de son premier jour, qu'elle avait retrouvé dans son « home sweet home ». Soudain elle s'arrêta. Là sur une étagère, un carton portait la mention « JX-007-13 ». Les affaires du Joker ! Trépignant de joie, elle se jeta sur la boîte et la vida sur le sol. Il faudrait sans doute qu'elle remise le costume. La chemise vert sombre était déchirée, tout comme le veston noir ainsi que le pantalon violet. Néanmoins la veste et le manteau long, étaient toujours en bon état. Ravie de sa trouvaille, elle l'engouffra bien vite dans son imposant sac en bandoulière, déjà rempli. Heureuse, elle se dirigea rapidement vers la voie d'aération et une fois à l'intérieur elle s'assit en tailleur pour pouvoir fouiller plus confortablement dans son sac. Elle en sortit une petite poupée représentant un clown.
Le pantin portait un costume au pantalon bouffant multicolore et des pompons rouges. Il souriait dans le vide, ses grands yeux exorbités brillant de malice, savourant apparemment une blague que lui seul comprenait. Le haut de son crâne était lisse et totalement chauve, mais sur les côtés, deux touffes de cheveux verdâtres et hirsutes défiaient les lois de la gravité. Sur son visage, le maquillage agrandissait ses yeux, donnant l'impression qu'il passait en permanence d'un étonnement à un autre. Harley caressa tendrement du doigt la bouche rouge, démesurée et pinça le petit nez rond. Et dire qu'enfant, elle avait eu peur des clowns ! Quelle bonne blague ! Souriant tendrement à la poupée, pas plus grande qu'une main, elle repensa à ce que sa mère lui avait appris. Oui, songea-t-elle, les clowns n'étaient pas méchants, c'était du plaisant Arlequin qu'il fallait se méfier. Riant silencieusement, elle retourna la poupée et la dévêtit. Dans son dos, Harley avait dissimulé un engin explosif minuscule mais à l'efficacité redoutable. Elle avait eu l'opportunité de le tester en faisant en faisant exploser le hangar crasseux où sa vie avait pris un tournant...plus coloré. Elle n'avait balancé que trois charges dans l'imposante structure, mais le résultat avait dépassé toutes ses espérances. Le hangar désaffecté où Candice l'avait brisée, était littéralement parti en fumé et il avait fallu trois jours aux pompiers de Gotham pour arrêter l'incendie qui s'était déclenché et rapidement répandue à toute la zone industrielle au Sud-Est de la ville. La police n'arrivait toujours pas à déterminer l'origine du sinistre, ce qui inspira à la jeune femme une immense fierté. Elle avait bien travaillé. Et l'idée de voir Gordon et Batman en train de s'arracher les cheveux sur l'enquête, lui procurait un indicible bien-être.
Vérifiant que l'explosif était bien en place, elle rhabilla la poupée et appuya sur le nez rouge du clown. Elle regarda le réveil qu'elle avait emporté : vingt-deux heures. Humm c'était encore trop tôt ! Elle régla le détonateur sur minuit. Minuit l'heure du crime, l'heure de tous les possibles. Cette idée la réjouit. Elle enclencha le détonateur et le nez du pantin se mit à clignoter sans bruit. Elle le lança alors, aussi loin qu'elle le pouvait, dans la cave de l'Aile Est. Afin que son petit clown ne se sente pas trop seul, Harley lui envoya deux autres figurines qu'elle programma à la même heure. Satisfaite, elle s'éloigna et longea les voies silencieusement en traînant son fardeau. Elle se déplaça ainsi dans tout l'hôpital sans éveiller le moindre soupçon. A chaque nouvelle section, elle semait les petits clowns un peu partout, comme le petit poucet avec ses cailloux. Elle régla chaque détonateur individuellement, décalant les éclats de rires de ses petits coquins de deux minutes les uns des autres. Ca laisserait suffisamment de temps aux gens pour réaliser ce qu'il se passait, sans pour autant leur donner les moyens d'agir. Elle en plaçait dans les combles, dans les canalisations, dans les débarras de chaque de étage, elle continua ainsi jusqu'à ce que son fardeau devienne incroyablement léger et qu'il ne lui resta plus qu'une seule poupée. Tous ces petits clowns allaient faire exploser de rire tout ce beau monde qui se consumerait ensuite dans un brasier drolatique. Un vrai son et lumières grandeur nature !
Alors Harley sorti de sa cachette. Munie de son badge elle échappa à la surveillance des gardiens et se faufila dans l'aile Nord. A cette heure, la plupart des bureaux étaient déserts, l'écrasante majorité des infirmiers et des médecins passaient leur garde nuit dans l'Aile Ouest, avec les patients « ordinaires ». Personne ne voulait être dans cette partie de l'hôpital. Même les gardiens maudissaient le moment de leur ronde. A l'exception de Lyle... Au moindre bruit suspect Harley se réfugiait dans une cachette improvisée, craignant de se faire repérer, elle se tassait dans un recoin sombre et retenait sa respiration. Elle finit néanmoins par atteindre le bureau du Docteur Bartholomew et pirata son ordinateur. Le Directeur Général d'Arkham était le seul à posséder tous les codes, et à pouvoir activer leur programmation, ainsi que celles des portes automatiques depuis son bureau. La faille du système de sécurité automatique de l'hôpital était là. En faisant imploser l'ordinateur du Docteur Bartholomew, on déverrouillait toutes les portes des cellules des patients. Une véritable anarchie en perspective ! Harleen regarda l'heure sur la pendule fixée au mur en face d'elle. Vingt-trois heures cinquante-huit. Avec un petit sourire satisfait elle valida son choix et anéantit par la même tous les efforts de la société pour enfermer loin d'eux les monstres qui les terrifiaient.
Elle partit en sautillant à cloche-pied en direction de l'ascenseur. Alors que les portes se refermaient sur elle, Harley entendit la première explosion. Toutes les alarmes des bâtiments se déclenchèrent en même temps, plongeant les couloirs dans un clignotement rouge et noir, alors que les prisonniers, médusés voyaient les portes de leur cellules s'ouvrirent. Harleen sourit dans la cabine, en entendant de loin les agents de sécurité prit de panique, hurler des ordres dans le vent. Elle rit de voir que son plan fonctionnait. Mieux il fonctionnerait, plus facilement, le Joker pourrait tout détruire sans vergogne. Elle avait hâte d'y être. La seconde explosion redoubla l'intensité de son hilarité. Que le spectacle commence !
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Syndrom
Fiksi PenggemarAlors je veut juste vous prévenir , cette histoire n'est pas de moi mais d'une écrivaine très talentueuse , sa fiction étant publiée uniquement sur fanfic.fr, je trouve ça dommage donc j'ai eu envie de la partager avec vous . Voilà voilà , bonne lec...