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Je commence à reculer, tout doucement, mais ma cheville proteste. Je vais devoir survivre encore quelques minutes.

Je m'arrête, et détaille sommairement mes adversaires.

Le premier qui est sorti du buisson, est un homme grand, aux courts cheveux de jais et aux pupilles comme deux puits sans fond. Tout dans sa démarche est calculé, il dégage une impression de contrôle permanent, et je me surprends à avoir le réflexe de baisser le regard.

Comme je m'en rends compte, je le fixe avec détermination dans les yeux. Une brève lueur de surprise les traverse, mais s'évanouit aussitôt.

Ses deux acolytes me donnent une impression plus effacée, comme soumise, et ils ne regardent pas leur chef. Leurs cheveux sombres et leurs regards noirs me font penser à une fratrie.

Ils s'avancent doucement, d'une démarche féline et sûre, pour commencer à m'encercler.

Je recule de plus en plus, sans lâcher le meneur du regard. Rien ne transparaît sur son visage, c'est comme si rien ne peut l'atteindre. Il se contrôle parfaitement.

Les deux frères se trouvent à présent chacun d'un côté. Si je veux fuir, c'est maintenant ou jamais.

Mais à peine ai-je formulé cette pensée que le meneur prend la parole, d'une voix grave et profonde, avec des accents rocailleux :

- Si j'étais toi je me soumettrais. Tu ne sais pas de quoi je suis capable.

Je garde le regard figé dans le sien, et répond de la même manière, d'une voix que je ne me reconnais pas tant elle est grave :

- Vous n'êtes pas moi, et vous non plus vous ne savez pas de quoi je suis capable.

On ne sait pas qui il est, mais il ne nous marchera pas sur les pieds !

Cette pensée jaillit dans mon esprit à la vitesse de l'éclair. Je plisse les yeux, à cause de la légère douleur apparue. Cette voix... Ce n'est pas la mienne.

- Soumets-toi, et on ne te fera aucun mal, articule le meneur.

Ses yeux fixent toujours les miens. Je peux sentir une force qui m'incite à ployer, à baisser le regard, mais je n'en fais rien et la relègue dans un coin de ma tête. Je redresse même encore la tête, défiant ouvertement cet inconnu. Me soumettre ? Quelle drôle d'idée !

Mais il faut que j'agisse. Si je continue ce petit jeu, je finirai encerclée. Les deux frères du meneur sont de plus en plus derrière moi, et mon but est du même côté. Et en plus, le regard noir que je soutiens devient de plus en plus insistant, de plus en plus fort.

Je finis par buter dans une nouvelle racine, mais au lieu de m'étaler dans la neige, je saute par dessus. Je me raidis à l'atterrissage, craignant pour ma cheville, mais elle semble être de nouveau fonctionnelle.

Ni une ni deux, je fais volte-face, surprenant mes agresseurs et me laissant ainsi une ou deux secondes d'avance. Je vole par-dessus la neige, le cœur battant sous l'adrénaline. Mes pieds poussent sur le sol et mon visage est fouetté par le vent. Le froid qu'il me fait ressentir me revigore et me donne la force de bondir sur la porte d'entrée.

Fébrile, je sors les clefs, les introduis dans la serrure et fonce à l'intérieur, claquant la porte derrière moi en m'y appuyant, prête à contrer un assaut extérieur.

Mais rien ne vient, et je jette un coup d'œil prudent dehors. Personne. Seules les traces de pas dans la neige prouvent que je n'ai pas halluciné.

Je ferme la porte, ébranlée. Ma tête tourne, et mes jambes me lâchent, délaissées par l'adrénaline. Je me rattrappe au mur avant de tomber sur le carrelage et me traîne jusqu'aux escaliers, que je monte vacillante pour aller échouer sur mon lit, la tête dans l'oreiller, épuisée par ma course folle.

Prédation, L.1 : La dernière Louve Supérieure [FINIE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant