Chapitre 29,5.

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29,5.

«On hésite à être soi parce que demain il faudra mentir» - Jean Rostand

Noa

Je ferme mon sac avant de le lancer sur mon dos pour me mettre à courir vers la porte d'entrée. Mon bus arrive dans moins de cinq minutes, alors qu'il m'en faut plus encore pour atteindre l'arrêt. Si je cours suffisamment vite, j'ai peut-être une chance de l'attraper.

- Noa ! Tu ne viens pas me faire un bisou avant de partir ? me lance la mère au moment même où je m'apprête à refermer la porte d'entrée.

Putain de merde.

Je fais demi-tour, de pose un léger mais rapide bisou sur sa joue et repars dans le sens inverse. Mais ça ne suffit pas. Lorsque j'arrive à l'arrêt de bus, je le trouve vide et le prochain bus est programmé dans plus d'une demi-heure.

Re putain de merde.

Je fais les cents pas le long de l'arrêt, passant et repassant devant le banc en plastique. Ma main tire sur une courte mèche de mes cheveux, tandis que mes dents triturent ma lèvre inférieure. Je ne peux pas me permettre d'arriver encore en retard, surtout que je veux maximiser mon dossier scolaire. Mes chances d'intégrer l'école de commerce de mes rêves sont deja minimes, mais ce n'est pas en ajoutant des retards les uns après les autres que je vais l'améliorer.

Je ne vois qu'une seule solution. L'appeler.

Au bout de quelques sonnerie, il décroche enfin à mon plus grand soulagement.

- Ouais ?

- Salut c'est Noa ! je m'exclame d'une voix qui se veut sure d'elle.

- Je sais, c'est écrit sur mon téléphone.

- JM, je sais que je vais te paraître minable là tout de suite, mais... J'ai loupé mon bus et faut vraiment pas que j'arrive en retard. Tu pourrais faire un détour ? je demande avec une toute petite voix, et en croisant les doigts de ma main gauche.

- J'arrive.

Il raccroche soudainement, si bien que je n'ai même pas le temps de le remercier. A peine quelques minutes après, je vois sa voiture arriver. Il s'arrête à ma hauteur et j'entre par la portière passagère. Il me lance un léger sourire, que je lui rends, puis il démarre sans tarder.

J'ai envi de lui crier que je m'en veux, j'ai envi de lui crier que je lui en veux, j'ai envi de crier ma colère contre le monde entier. Mais pourtant, je reste silencieuse.

- Noa.

Il prononce mon prénom, ce petit mot si futile qui me représente et le résumé, ces trois lettres misent les unes après les autres sans grand enchaînement, cette syllabe si familière à mes oreilles. Et je frissonne, sans savoir quoi répondre.

L'atmosphère tendue m'étouffe.

- Oui ?

- Il faut qu'on parle. Je veux dire, vraiment parler, sérieusement quoi.

Je baisse les yeux, fixe mes mains qui tremblent, puis réponds positivement. Oui. Il faut qu'on parle.

Si seulement Eli était là ! Elle pourrait m'aider, me conseiller, avec toute la douceur qu'elle utilise pour chacune de ses phrases. Elle ne me jugerais pas, et me soutiendrais plutôt. J'aimerais tant qu'elle soit là, qu'elle ne soit pas partie si vite. Sa présence à été si rapide dans ma vie, mais ce n'est pas pour ça qu'elle n'y a pas laissé une marque bien profonde. Eli est un tout, et impose sans même le vouloir sa présence comme essentielle.

La voiture s'arrête, et je me rends compte que nous sommes déjà arrivé au lycée. Ma montre me permet de prendre conscience qu'il me reste un bon quart d'heure avant le retentissement de la sonnerie stridente.

JM se plante devant moi, et croise les bras. Si nous avions été dans une tout autre situation, je pense que j'aurais rigolé. Les bras croisés, il semblait attendre que je dise quelque chose.

Être avec JM, c'était plonger dans un autre monde, devenir peutetre quelqu'un d'autre. Sortir de ma zone de confort, et découvrir de nouveaux horizons. Mais justement, l'hésitation s'emparait de moi depuis des jours entiers, chaque minutes me faisait hésiter.

Puis je pensais de nouveau à Eli. Elle n'avait pas hésité une seule seconde avant de partir. Pourtant, de nombreux éléments la retenaient ici, et pourtant, elle s'était jetée à l'eau. J'admire sa force et son courage.

Alors comme pour suivre le chemin de mon amie, je pose une main sur la joue de JM. Ses yeux me montrent son étonnement, mais je continue.

- JM. Pardonne moi. Pour tout ce que je t'ai dit. Je regrette tellement. Je ne veux que toi.

Il prend quelques secondes pour comprendre les mots maladroits. Puis ses bras se serrent autour de ma taille, m'emprisonnant contre lui. Je relève alors la tête pour poser mes lèvres sur les siennes. Je sors de ma zone de confort. Mais à ce moment là, je m'en fou. Tout va bien, et je suis pleinement heureuse, dans ses bras.

Accroche Toi [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant