Elle me regarde droit dans les yeux, avec son sourire forcé, en me tendant la main après cette révélation. Elle a l'air de dire silencieusement "Pas touches, il est à moi!". Je m'efforce de ne pas paraître perturbée, mais je ne suis pas certaine de réussir. Je lui tend alors ma main, en essayant de faire comme si de rien était, lui rendant sa poignée de main, tout en me retenant de ne pas la lui briser... Sa fiancée? Je n'en crois pas un mot. Comment ça peut-être possible..? Comment il peut... avoir fait ça? Je n'ose même diriger mon regard vers lui, pourtant je le vois entrain de me fixer, attendant de voir une quelconque réaction de ma part. J'espère pour lui qu'il prend un malin plaisir à faire ça, il doit jubiler de me mettre cette nouvelle en pleine face. Mais je dois restée forte et ne pas flancher... Pas devant lui. Je ne me le permettrai pas. Il ne mérite pas de me voir ainsi. Je ne peux pas rester ici plus longtemps.
-"Bien... Je vous souhaite à tous les deux une agréable fin de journée et bon courage pour votre rendez-vous professionnel. Au revoir."
Je fais mine de sourire puis me retourne pour partir de cet endroit, de la manière la plus rapide qu'il soit... Les escaliers. Si j'avais pu, je me serai arrêtée dedans pour pleurer toutes les larmes de mon corps, mais je ne suis pas seule. D'autres personnes dévalent les marches pour regagner leurs bureaux. Ils parlent entre eux, rient. Et moi, je me retiens d'exploser. Je ne vais pas le nier... Malgré ce qui s'est passé entre nous, malgré ce qu'il m'a fait, malgré le fait d'avoir juré de ne pas le pardonner... J'ai été amoureuse de lui comme je ne l'ai jamais été de personne d'autre. Je me voyais vivre ma vie avec lui, et la finir à ses côtés. Nous ne faisions qu'un... Alors, je ressens quand même un mal-être profond quand je vois cette situation. Quand je le vois avec elle. Quand je sais ce qu'ils sont l'un pour l'autre. Maintenant, c'est du passé. Il a trouvé quelqu'un d'autre, quelqu'un qu'il aime plus que tout, et qui va finir sa vie avec lui. Ce ne sera pas moi... Ce n'est plus moi depuis longtemps, d'ailleurs. Il faut que je me fasse à cette idée.
Je pensais être passé à autre chose, mais ce n'est clairement pas le cas. En même temps, je ne sais pas pourquoi je serai étonnée de ça vu les termes dans lesquels nous nous sommes quittés... Je n'ai jamais pu avoir d'explications de sa part, au final. Et je pense que c'est ce qui me bloque. Ce qui m'empêche de passer à autre chose, de vivre heureuse et de retomber amoureuse. Je ne peux plus rester comme ça, je ne peux plus gâcher ma vie comme ça, tout ça pour lui. Il faut que je prenne le mal à la racine et que j'en finisse avec tout ça. Il faut qu'on est une discussion tous les deux. J'ai horreur d'admettre que c'est moi qui est tord de ne pas accepter de parler avec lui, mais je ne voulais pas me faire à l'idée que c'est lui qui est rationnel. Je dois le voir pour qu'on puisse s'expliquer et que je puisse enfin continuer à vivre en tirant une croix sur tout ça, le plus rapidement possible. La prochaine fois qu'on se croisera, j'espère. Et s'il ne vient pas à moi, je viendrai à lui.
Je retourne à mon bureau afin de continuer mon travail. J'ai réussi à me retenir et ne pas verser une seule larme. Je suis fière de moi, je n'ai pas flanché, pourtant j'aurai juré ne pas pouvoir le faire. La vie est tellement injuste. Nous nous préoccupons de certaines personnes et nous mettons dans des états pas possibles pour elles, alors qu'elles ne se soucient même pas de nous... J'aurai voulu être comme lui... J'aurai voulu ne plus rien en avoir à foutre de lui, ne même pas jeter un regard en arrière et me dire que tout ça ne me fait pas le moindre mal quand j'y repense. J'aurai aimé rire de cette situation et me dire que ce que nous étions était stupide et sans importance. Mais je n'ai jamais pu, j'ai simplement voulu m'en convaincre. Mais ce n'était qu'une façade temporaire qui s'est brisée à partir du moment où je l'ai revu. Tous les souvenirs sont revenus au même moment où j'ai recroisé son regard. J'aurai du l'écouter quand il m'a affirmé que nous devions discuter. Mais j'étais dans tous mes états, je n'ai pas pu. Je n'avais pas la force pour assumer le sujet qui allait m'être imposé. Mes cicatrices se sont réouvertes avec sa venue. Je crois qu'en réalité, ce qui m'empêchais de le faire, c'est la peur. J'ai peur d'entendre ses explications. Je n'ai jamais eu autant peur de ma vie. C'est ce qui me hante depuis des années, et ce sera bientôt la fin de toute cette souffrance. Je pourrai enfin songé à soigner mon cœur. Pour de bon. De toute manière, autant le faire vu qu'il risque de partir vivre à l'autre bout du monde pour être directeur dans un des nouveaux cabinets. Au moins, nous ne nous croiserons plus, et ce sera plus facile pour moi.
J'ai eu du mal à me concentrer sur mon travail cet après-midi. J'avais l'esprit ailleurs, comme j'aurai pu m'en douter. Je suis faible... Trop faible. Et ce n'est pas bon. La carapace que je m'étais forgée tombe à présent en lambeaux. Je suis tellement déçue de moi-même. Je décevrai toute personne qui serait au courant, de toute manière.
Tout à coup, quelqu'un tape à la porte en verre de mon bureau. C'est Michelle, la secrétaire que j'ai embauchée il y a peu de temps. Malgré tout, mon planning devient de plus en plus chargé, avec la promotion que j'ai reçue. Je lui dit d'entrer, ce qu'elle fait rapidement, en prenant soin de fermer la porte derrière elle. Michelle est une splendide femme afro-américaine, soignée et adorable. Je l'ai choisie car derrière cet air angélique se cache une femme pleine de convictions et qui est énormément investie dans ce qu'elle fait. Et son culot aussi! Lorsque je lui est demandé pourquoi est-ce que je devais la choisir, elle m'a répondu "Quelqu'un d'autre pourrait m'arriver à la cheville? Je ne pense pas. Je suis la meilleure dans mon domaine." C'était à double tranchant pour elle, mais moi, ça m'a plu. Alors je lui ai dit qu'elle n'avait plus qu'à annuler mes rendez-vous suivants. Je ne regrette absolument pas mon choix, même si ça ne fait pas très longtemps qu'elle a prit son poste, elle fait déjà des merveilles.
-"Excusez-moi mais vous venez d'avoir un rendez-vous à l'improviste avec le directeur financier. Une demande express par mail. Vous devez y être le plus rapidement. C'est au 46ème. Vous devez demander le directeur financier à la secrétaire de l'étage. Je vous est envoyé un mail il y a quelques minutes, mais vous ne l'avez pas ouvert."
-"Merci Michelle. Effectivement, je ne l'avais pas vu. J'y vais de ce pas."
Elle sort de mon bureau en faisant un signe de tête. Foutues pensées qui me mettent la tête ailleurs. Je ne sais pas du tout ce que me veut le directeur financier. Peut-être que les budget de mon étage ne sont pas respectés? Je sors et vais prendre l'ascenseur. Une fois sur le palier, personne ne se trouve à l'accueil. La secrétaire doit être occupée autre part. Je décide donc de m'aventurer directement dans le couloir, à la recherche du bureau concerné. Alors que je tourne à l'angle, je manque de percuter quelqu'un; je m'excuse directement, complètement confuse. Mais quand je relève la tête, je le vois.
-"Qu'est ce que tu fais là?"
-"Mégan... Il faut qu'on parle. Vraiment. Laisse moi t'expliquer."
-"M'expliquer quoi? On a rien à se dire, si?"
-"S'il-te-plaît, suis-moi."
-"Pourquoi est-ce que je ferai ça? Et même si je voulais, c'est impossible. J'ai rendez-vous avec le directeur financier. Je cherche son bureau là, la secrétaire n'était pas là."
Il me jauge du regard quelques instants puis me lance:
-"Justement, suis-moi. Je sais où il se trouve."
Il se met à marcher dans le fond du couloir. Je le regarde, perplexe, avant de décidé de le suivre. Puis il s'arrête au fond, dernière porte, devant une porte en verre dépoli, qui ne permet pas de voir à l'intérieur. Il ouvre la porte, sans même frapper. Il est culotté! Il me tient la porte, et alors que je m'avance, j'entre dans le pièce, avec le trac.
Mon regard se pose instinctivement sur le bureau, vide. Pleins d'incompréhension, je fini par me plonger dans ses yeux qui affichent un air grave. Quand je me décide de lire la plaque en acier accrochée à l'extérieure de la porte, je tombe de haut.
"Eric Johnson - Directeur financier."
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Another chance (with you) T.1 (en Pause)
RomanceLorsque Mégan quitte la France pour exercer son métier d'avocate dans le plus prestigieux cabinet de New-York, elle n'a alors aucune idée de ce qui l'attend: un bond dans le passé pour le moins éprouvant, des souvenirs douloureux qui refont surface...