Mercredi 8 Février 1978.
Dans deux heures nous avons un test de Potions donc tous mes amis ont la tête dans leur livre. Je suis la seule à manger en regardant dans le vague. J'ai un mauvais pré-sentiment depuis que je me suis levée. Les hiboux rentrent et celui qui porte mon exemplaire de la Gazette se pose devant moi. Je le paie en prenant le papier de sa patte. À la Une, il y a encore une attaque de Mangemorts mais cette fois-ci à Liverpool. J'ouvre précipitamment la page où doit se trouver le nom des victimes. L'angoisse s'empare de moi sans que je ne puisse l'arrêter. Mon regard parcourt les noms inscrits sur le papier et un vide s'empare de moi.
Le journal tombe à terre. Mon crâne s'écrase contre le sol. Des hurlements me parviennent difficilement aux oreilles. Mon corps est soulevé et transporté ailleurs. Des larmes coulent silencieusement sur mes joues. Mon cœur se sert d'une telle violence que je suis prise de nausées. On me pose sur un matelas et des gens s'agitent autour de moi. Des mains serrent les miennes. On me fait avaler des potions et tout s'arrête. Tout dévient noir.
Help! résonne fortement dans mes oreilles mais je reste impassible. Ce lit est inconfortable mais je ne bouge pas. On me parle systématiquement mais je ne fais rien. Je reste là, sans un geste, sans un mot. Mon esprit est toujours présent mais reste enfermé dans sa prison qu'est mon corps. Ma respiration est lente presque inexistante, mon cœur n'est plus. Je reste stoïque face à l'agitation du monde. Mes yeux ne regardent que droit devant, certaines fois j'y vois du gris, vert, marron et même bleu. Tant de couleurs pour un corps chétif.
Ils ne sont plus là. Ils les ont eus. Et je n'ai rien pu faire. J'aurais dû être avec eux, les protéger. Mais je n'y étais pas et maintenant eux non plus. Tout est maintenant calme. Il n'y a plus rien.
J'ouvre les yeux avec précipitation. Le rose du soir se fait apercevoir dans le lointain. Le matelas me broie le dos mais je ne réagis pas. Si ce lit me fait mal, cela veut dire que je vis. Si je vis cela veut dire que c'est bien réel. Et cela voudrait donc dire que le temps avance, qu'il continue sans se soucier de ce qu'il se passe dans le monde. Que leurs disparitions n'affecteraient pas le temps. Qu'elles seraient réelles. Que je continuerais à vivre mais pas eux. Je ne mérite pas de respirer. J'ai échoué à les protéger. C'est de ma faute s'ils ne sont plus.
Yesterday remplace le bruit de la vie autour de mon corps. Aucuns de mes muscles ne se contractent, tout reste de marbre. Si une réaction vient perturber mon corps, mon esprit pourrait en sortir. S'il en sort, il constatera que c'est vrai. Il verrait que mon cœur continue à battre. Une forte pression se fait ressentir dans ma main. Mon corps en fait l'impasse. Je n'entends que les paroles que chantent les Beatles. Je fixe toute l'attention qu'il me reste sur ces voix chantantes. C'est le seul lien avec la réalité que je garde. La seule chose que j'accepte dans la bulle que j'ai construite. Rien d'autre n'a le droit d'y entrer. Il y risquerait beaucoup trop. Je ne sais pas comment mon esprit pourrait réagir s'il devait être confronté au monde extérieur.
La cassette se fini. Je ne fais pas un seul geste pour la changer. Le soleil disparaît dans des éclats roses. Ils ne verront plus jamais ça, ne ressentiront plus jamais la chaleur sur leur peau. Et je suis là, absente mais présente, contemplant la vie. Cette vie que je refuse de rejoindre. Cette vie qui pourrait m'anéantir. Une potion se loge dans ma gorge. Tout devient noir autour de moi.
Jeudi 9 Février 1978.
Et je rouvre les yeux. Le soleil est présent. Il baigne la pièce d'une douce couleur orangée. Ce lit me fait toujours aussi mal. Mais ce gris si présent n'est plus là. Il a disparu pour être remplacé par un doré. Pourquoi n'est-il plus là ? Un son se fait entendre mais Strawberry Fields Forever commence. Les paroles sont si proches et loin de moi. Une main se pose sur mon épaule. Mon corps se fait secouer comme une poupée. Le gris réapparaît. Je reste là, déconnectée du monde. Une voix forte retentit par-dessus la chanson des Beatles. Le sens des mots m'échappe. Mes doigts effleurent le drap. Mais je retourne dans ma torpeur. Du vert mélangé à du rouge se place devant mon champ de vision.
Les premiers accords de Penny Lane se font entendre. Ils recouvrent tous les sons qu'émettent ces deux couleurs. Ces sons criards de vérité mais que mon esprit ne peut accepter. Mon subconscient lui les comprend. Des larmes roulent sur mes joues. Mais je n'ai toujours aucune expression. Je suis spectatrice. Je ne peux interagir tout comme je n'ai pas pu le faire pour eux. Pour les sauver. Leur dire que je les aime.
Une nouvelle cassette. Hey Jude. Devant moi se trouve la fenêtre. Rien ne perturbe cette image. Tout est calme. Mes doigts caressent doucement ce matelas inconfortable. Mon cœur se serre lentement mais fortement. Les larmes commencent à tomber imperceptiblement. J'agrippe les draps. Mes yeux se ferment sous la violence d'un sanglot. Tout mon corps se raidit. Ma bulle grossit de plus en plus. La douleur fait de même. Je ne les reverrais jamais. Je ne jouerais plus jamais avec eux dans la neige. Les folles descentes de pistes ne se feront plus jamais. Mon estomac se tord. Ils les ont tués. Ils sont morts. Mon cœur explose en même temps que ma bulle. Un cri déchirant sort de ma bouche. Les larmes redoublent. Ma respiration devient saccadée. Carl est mort. Je me recroqueville sur moi-même. Lucie est morte. Je pousse un énième hurlement de douleur. Ma tante Sophia est morte. Je frappe violemment ce lit horrible. Mon oncle Alexander est mort. Ma respiration se coupe. Ils sont morts tous les quatre. Je m'écroule.
Je hurle à m'en déchirer les poumons. À quoi bon ? Ils les ont tués. Pour leur sang. Car ils n'étaient pas comme leurs assassins. Des bras puissants m'emprisonnent. Ils n'avaient pas le droit de décider de leur vie. Ils étaient innocents. Je n'ai peut-être pas pu les protéger mais je les vengerais. Même si cela me coûte la vie. Mon cœur n'existe plus. Il a été remplacé par ce désir ardent de rendre justice.
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Pour finir ce chapitre, je vous annonce que j'ai créer un compte Instagram pour cette fiction, c'est "Sukeine". J'y poste des photos illustrant les actions des personnages dans ce tome mais surtout dans le prochain. J'espère que vous allez aimer.
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Fighting The Storm
FanfictionUne année de répit avant de se faire projeter en plein cœur de la guerre. Tous droits réservés. ©2017 Sukeine #1 dans la catégorie SiriusBlack