L'aube d'une nouvelle ère

Chapitre 2 : Être aventurier

— C'est une chèvre, Hugoi, fit la voix désespérée d'Emil, alors que le groupe de quatre aventuriers empruntait un sentier tortueux.

— Regarde l'intelligence qui brille dans ses yeux, rétorqua le chevalier magique. Elle prépare quelque chose, prudence.

— Elle se moque de nous, s'agaça Lily, assise sur un rocher.

— Parce que nous restons comme des ahuris à la dévisager, lâcha Aren qui partageait l'avis de l'homme de Lonesam. Nous devons nous dépêcher, le temps presse !

— Hugoi, répéta Emil. Je comprends ta méfiance, c'est clair qu'on a pas la côte avec les animaux. D'abord l'aigle, puis les copains des loups qu'on a bouffés en chemin... Ca fait beaucoup. Mais là, tu vois, on est censé sauver des gens. C'est déjà pour toi qu'on fait ce détour. Pourrais-tu simplement oublier cette bique et avancer ?

— J'en ai ma claque, cracha Lily qui après avoir bondi de son rocher, décida de reprendre l'ascension.

Elle progressa sur le chemin à peine praticable, pentu, et qui n'offrait aucun abri potentiel tant il était dépourvu de végétation. Plus que la route, le comportement stupide de l'humain tapait sur les nerfs de la fillette. Ils perdaient assez de temps avec cet écart sur leur route initiale, et ils devaient trouver une crevasse supposée menant vers une mine d'Eleburn.

Après deux jours de marche forcée, sous le soleil brûlant, à se nourrir exclusivement de viande de loup, ils avaient finalement atteint Eleburn. La jeune assassin espérait un repas correct dans une auberge décente. Ses modestes rêves avaient vite été brisés, tout s'était passé si vite.

Des femmes prises de panique, Hugoi qui avait volé à leur rencontre. Et les voici en mission. Une partie de la mine s'était effondrée la veille. Les hommes du village s'étaient alors tous retrouvés piégés à l'intérieur, ou pire encore. Une vieille leur avait indiqué l'existence d'un passage à même la montagne, où plus personne ne se rendait de nos jours.

Lily n'avait dans un premier temps pas compris l'intérêt pour eux de se rendre sur place. Si un mineur tout aussi âgé faisait parti des effectifs de travailleurs, il allait sans doute les guider jusqu'à cette providentielle sortie. Cependant, la vieillarde avait ajouté que s'ils évitaient cette portion de la mine, c'est qu'elle était infestée de créatures indésirables... Et de morts. Selon ses dires, en tout cas. Lily n'avait pas mordu à l'hameçon, et un regard vers Emil l'avait rassuré quant à la position de l'ingénieur sur ce sujet.

Aren leur avait soufflé qu'il n'était pas crédible pour des aventuriers de refuser une mission aussi simple, d'autant plus avec deux elfes suspects dans le groupe. Hugoi avait accepté de porter secours aux malheureux mineurs, et Emil avait fini par négocier une prime de quatre pièces d'argent. Une misère, dans un village de pouilleux. La fillette n'avait pas imaginé être ralentie par une chèvre avant même d'atteindre la mine.

Lorsque Lily passa à côté de l'animal, celui-ci se contenta de la regarder, et de l'ignorer. Aren ne tarda pas à lui emboîter le pas, ayant perdu la patience de traiter avec les caprices de Hugoi.

— C'est une feinte, expliqua le chevalier magique. Ca fait parti de son plan, pour nous séparer.

— Je peux toujours lui mettre une balle entre les deux yeux, suggéra Emil en dernier recours.

— Tu n'y penses pas malheureux, s'alarma Hugoi, le visage tendu par la rencontre. Tu vas attirer ses compagnons avec le bruit, nous serons encerclés par leur surnombre.

— Tu peux pas être sérieux.

— Ne sous-estime pas les chèvres.