Chapitre 36 : Leurs fautes

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Les minutes se transformaient en heures pour Emil, toujours prisonnier de la glace de Virgil.

L'ingénieur sentait la fin approcher. Le froid lui brûlait les entrailles, s'immisçait jusqu'aux tréfonds de son être. Respirer s'avérer de plus en plus difficile, ses poumons refusant l'air glacé émanant du sarcophage.

Le visage de l'homme, seule partie de son corps à l'air libre, ne pouvait même pas profiter de la chaleur d'un soleil à son zénith, masqué par les quelques arbres fruitiers du jardin de son terrible hôte.

Emil ne comprenait pas ce que Virgil attendait de lui. Contrairement à ses camarades, il n'était pas doté d'habilités hors du commun. Il débloquait les situations par la ruse et le bluff, cela permettait à son groupe de sortir des pires situations. Ces traits se révélaient inutiles quand il s'agissait de devoir s'échapper d'une prison de glace. Virgil ne lui laissait aucune liberté d'action.

– "Réfléchis... J'ai beau tourner ça dans tous les sens, je ne vois pas d'autres issues que de crever de froid."

Le dhampire lui avait également demandé de se souvenir, l'ingénieur avait cherché dans sa mémoire s'il avait déjà entendu parler d'un homme survivant à une prison de glace, mais rien ne lui venait à l'esprit.

Alors Emil patientait. La mort finirait bien par le cueillir. Il avait déjà accepté l'idée de ne pas faire de vieux os depuis longtemps. Sa vie depuis son entrée dans l'armée de Lonesam n'était qu'une injuste rallonge.

– "J'aurais dû les rejoindre depuis longtemps..."

L'esprit attaqué de toute part par le froid, Emil se laissa porter vers ses jours les plus heureux, aussi brefs furent-ils. L'image d'un bâtiment délabré flottait dans son esprit. En bordure de Massiglia, un atelier empestant la poudre. Un homme occupé à transporter des marchandises, pendant qu'une femme lui gueulait dessus.

– "Helena... Hernando..."

Les membres de sa guilde. Leurs rêves. Même leurs incessantes chamailleries lui manquaient. Les feux d'artifice aussi. L'opportunité d'une vie à la tête de son propre commerce qu'il avait gâché de ses propres mains. Ses plus amèrs regrets, celui d'un meurtrier.

— "Eh ben ! T'es tout bleu !" Railla tout à coup la voix d'Okar. "T'as froid ?"

Sorti de sa torpeur qui l'aurait conduit jusqu'à la mort, Emil baissa les yeux et repéra Virgil, qui se tenait devant la prison de glace. L'ingénieur ne l'avait pas vu approcher, et comprit qu'il revenait de loin.

– "Je constate que tu n'es pas sorti." Déclara le dhampire.

– "Non, non, tu te trompes. Je viens de faire un détour par une taverne. Je suis revenu pour éviter de te vexer."

– "Et t'as rien ramené ?" Renchérit Okar de bon cœur.

– "Tu comptes mourir avec un sarcasme aux lèvres ?" Demanda Virgil. "Soit, cela sied bien à ta force de caractère. Je m'attendais pourtant un peu plus de ta part."

– "Tenter de me tuer a certainement affecté ma motivation."

L'ingénieur cracha pratiquement la fin de sa phrase. Plus besoin de montrer le moindre respect au dhampire qui attentait à sa vie. Il ne se soumettrait plus à ses humeurs. Il les avait d'abord envoyé à une mort certaine, puis leur avait fait miroiter de nouvelles compétences, avant de les replonger au fond du gouffre. Il ne serait plus son jouet. S'il devait périr ici, alors il ferait de son mieux pour lui pourrir la vie du dhampire avant de trépasser.

– "Ce serait dommage de perdre un autre membre de votre groupe." Lâcha finalement Virgil, sourire aux lèvres.

Emil cessa de chercher des mots cinglants à lancer au dhampire. Il sentit ses organes se serrer à la remarque du monstre, qui venait de revenir avec Okar. Seuls.

L'aube d'une nouvelle èreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant