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Septembre 1975.

Dans ma chambre, au quatrième étage de mon fichu immeuble, j'avais la tête sur mon fichu oreiller qui gratte. Et j'écoutais les gouttes d'eau s'écraser contre mon matelas. Je ressentais chacune d'elles taper contre mon visage. Et j'étais bien. Il pleuvait à torrent car nous vivions dans une ville pourrie où il pleut sans arrêt parce que dans le Nord, c'est comme ça. Et quand il pleut il est difficile de suivre la rivière, elle devient glissante et agitée alors parfois on s'y noie.

Mes pensées vagabondaient loin au-delà de la pièce, je repensais à l'été que j'avais passé. À mes journées de baignade, aux dîners animés, à mes grasses matinées. Et à mon fichu coup de foudre. Car oui, cet été là, j'avais été foudroyé pour la première fois. Boum.

Ça avait été grandiose, ça avait été sensass !

Été 1975

《La tête posée sur mon oreiller de plûmes, j'avais entendu la vieille Ford de mon père rugir dans l'allée principale. Un coup de frein intense avait retenti puis le bruit des portières qui claquent. Et le chant des cigales était revenu.

- Bonjour Madame, avait retenti une voix masculine avec un ton qui sonnait bien trop poli pour être sincère.

- Bonjour mon garçon, le voyage c'est bien passé ?

- Excellent, [...].

- Augustin ! Ça y est, le garçon est arrivé ! avait hurlé mon petit frère en passant sa tête à travers le battant de la porte de ma chambre.

- J'ai entendu, Élie, pas la peine de me hurler dessus, avais-je grogné.

Je n'avais pas envie d'avoir un frère de plus pour l'été, c'était comme ça.

La tête encore assommée de la sieste qui m'était tombée dessus en ce début d'après-midi, je m'étais levé pour me diriger vers le couloir où étaient entassés tous mes frères et sœurs surexcités à l'idée de rencontrer enfin ce garçon qui avait obtenu un poste au travail de mon père. Ma grande sœur Elijah m'avait bousculé violemment pour descendre la première les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée, suivie de près par Judith.

- Tu penses qu'il est beau ? ne s'était pas gênée de crier Eli'.

- Forcement, avait crié à son tour Judith, il vient de Paris !

Et toutes deux avaient pouffé ensemble avant de disparaître dans la cour. J'avais poussé délicatement le reste de ma fratrie resté entassé dans l'escalier pour descendre à mon tour.

- Je n'ai pas envie d'un nouveau frère, m'avait avoué Élie en chuchotant.

- Moi non plus.

Personne n'avait été réellement ravi de savoir que notre été habituellement chanté en famille allait être bouleversé par un nouvel arrivant. Seuls mes sœurs et mes parents avaient paru heureux, s'ils avaient su...

J'avais donc débarqué dans ce vieux salon vacancier, et j'avais été confronté à mon premier coup de foudre. Un choc terrible. Je m'étais senti terriblement honteux, timide, et bizarrement heureux. La vie était cruelle de m'affliger une telle épreuve.
Cela m'avait vraiment fait bizarre la première fois. Tout simplement car je ne pensais pas ressentir un seul coup de foudre dans ma vie. Après tout, la plupart des êtres humains de cette Terre se marient sans réellement donner de sens à ce sentiment qu'est "l'amour", enfin le vrai. Ils se contentent de fréquenter le premier venu, de se marier et de se construire une descendance solide et la plus saine possible. Pathétique.
Mais le coup de foudre, le vrai, l'unique, vous fait mal. Il vous arrive dessus sans crier gare et il vous sort de la rivière avec une force sans précédente, c'est un fait (car rester les pieds dans l'eau près d'un éclair peut vous faire griller en un instant). Boum.

L'invitation au VoyageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant