28- Hypocrisie

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AIDAN

- C'est vrai? demande Estrella, visiblement enchantée à l'idée.

Oh non, je ne la laisserai certainement pas avoir ce qu'elle désire.

- Je n'y vois pas de problème, poursuit mon père. Aidan est encore sous un choc culturel, un peu de filrt ne lui fera certainement pas de mal.

Mais qu'est-ce qu'il en sait, bon sang?!

- Vous savez, quand on était en Suisse, Aidan faisait beaucoup la cour aux...

- Et April, elle? m'exclamai-je pour m'interposer dans cet échange absurde.

- Quoi, April? demande Estrella en croisant les bras.

Je me tourne vers sa direction, seulement pour m'apercevoir que sa chaise est vide. Mais où a-t-elle donc pu aller? Les plateaux sont pourtant encore sur la table...

Peu importe, je dois prouver mon point.

- Ne fait-elle pas partie de vos adorables filles?

J'ai horreur de dire ça, mais je n'ai pas le choix.

- April n'est pas ma fille.

- Oh, vraiment? Je n'en avais pas la moindre idée. Elles ont pourtant toutes trois un air de famille assez frappant, vous ne trouvez pas? Et que dire de ce charme incomparable!

Mandy et Idrissa croisent leurs bras sur leur poitrine. Pauvres petites, elles détestent quand le projecteur n'est pas directement sur elles et rien que sur elles.

- Hum, non, April n'est absolument pas ma fille. C'est celle de... mon défunt mari...

Elle penche tristement la tête et renifle, jouant très mal la comédie.

- Oh! Je suis désolé, je n'en avais pas la moindre idée!

- Ça va, je m'en sors... Heureusement que j'ai mes deux amours pour me supporter dans cette terrible épreuve.

- Vous voulez dire trois.

Je ne suis pas près de lâcher le morceau.

Elle relève la tête, outrée.

- Non, deux. Malgré tout l'amour que j'ai pour April, elle ne m'aime pas en retour. Elle ne s'est jamais inquiétée pour moi, ou mes filles...

Elle renifle à nouveau et se tapote les yeux avec sa serviette de table. 

- Si tu savais tous les efforts et sacrifices que j'ai fais pour elle... Jamais elle ne m'a remerciée.

La pièce est soudainement plongée dans un lourd silence; seuls les semblants de sanglots d'Estrella résonnent entre les murs. J'ai vraiment réussi à rendre tout le monde mal à l'aise. 

Mandy et Idrissa se lèvent et vont étreindre leur mère en guise de soutien moral. 

- Je suis... sincèrement navrée, dis ma mère. 

Une fois l'étreinte terminée, l'actrice replace ses cheveux et assure que ce n'est rien, et bla-bla-bla. Je me mets à me demander si ma mère y croit vraiment. 

Elle se râcle la gorge:

- En tous les cas, merci pour cette belle réception. 

Se levant, elle empile quelques couverts et ajoute:

- Je vais vous aider à débarrasser tout ça. 

- Oh, je vous en prie, ce n'est pas la peine. 

- Non, j'y tiens, insiste ma mère. Vous me permettez que j'aille déposer tout ça en cuisine? 

- Comme c'est aimable à vous! Je vous en prie, faites comme chez vous. 

Ma mère n'a dû faire la vaisselle que deux ou trois fois au maximum au cours de sa vie, ayant toujours laissé cette tâche aux domestiques. Même mon père y a plus souvent contribué, sachant pertinemment qu'elle déteste cette corvée. Alors pour qu'elle aie cette volonté soudaine de laver des assiettes, c'est soit qu'elle ne peut absolument plus supporter la tension qui règne, soit qu'elle a quelque chose derrière la tête. 

Mon petit doigt me dit qu'il s'agit d'un beau mélange des deux. 

Reine du BalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant