12 • À quoi ressemble le paradis

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Michael

J'avais tenu ma promesse et l'avais ramenée jusqu'à Jackson Street plus fatiguée qu'autre chose. Je m'étais réveillé vers dix heures, et c'est vers onze heures que l'on sonna à la porte d'entrée. Agacé que personne n'aille ouvrir, je m'en chargeai en lâchant quelques jurons.

– T'as bien dit dix dollars et deux douches ? J'ai eu mes dix dollars, j'aimerais avoir mes douches.

J'en revenais pas, cette fille était complètement incroyable. Elle était là, en pyjama devant moi, ses habits en main et ses cheveux totalement décoiffés. Je ris de surprise et la fis entrer sans plus attendre. Pour éviter d'avoir à répondre aux questions de ma famille (Joe, en particulier), je l'accompagnai au plus vite à l'étage pour lui montrer la salle de bain.

– Merde, j'ai oublié ma serviette... Attends-moi là, j'v...

– Laisse, j't'en prête une. Elles sont dans le placard sous le lavabo, la coupai-je.

– Oh euh... Merci...

Elle suivit mes indications et déplia une serviette avant de s'exclamer :

– Wouah, une grande serviette ! Ça faisait longtemps que j'en rêvais ! fit-elle semblant d'être émue.

Je ris encore une fois. Décidément, elle était vraiment merveilleuse...

– Bon, j'te laisse te laver, du coup. Prends ton temps, hein.

– Merci encore ! sourit-elle comme une enfant.

J'avais un énorme sourire qui étirait mes lèvres. Je dévalai promptement les escaliers pour vérifier si, parmi le courrier reçu, l'un d'eux m'était adressé, mais fis demi-tour en constatant que non.

– Je rêve ou c'était Alex en pyjama que t'as laissé entrer ? me taquina Tito.

Dieu merci, Joe n'était pas aux alentours.

– Qui est Alex ? s'intéressa ma mère depuis la cuisine.

– La fille de madame Holloway, maman, lançai-je.

– Michael est tombé sous son charme, ajouta mon aîné en gloussant.

Je lui lançai un regard noir.

– N-n'importe quoi ! tentai-je de mentir.

Ma mère ne nous connaissait que trop bien, et savait parfaitement quand nous lui mentions. Je la vis sortir la tête de la cuisine, où elle passait la plupart de son temps, elle aussi souriant malicieusement.

– Elle est mignonne, au moins ?

– Ouaip ! me devança Tito.

– Chut ! J'vous rappelle qu'elle est dans la maison ! les réprimandai-je en chuchotant.

Mais au lieu de m'écouter, ma mère sembla attendrie.

– Oooh ! Je n'avais jamais vu mon petit Michael amoureux !

– M'man ! m'offusquai-je.

Tito était mort de rire. S'il continuait, il allait mourir tout court.

Je décidai de les ignorer tous les deux et me remis à monter les marches. Soudain, je fis volte-face.

– Pas un mot à Joe. Promis ?

– Promis, dirent-ils en même temps avant de vaquer à leurs occupations.

J'avais absolument besoin d'aller aux toilettes, mais ceux-ci se trouvaient dans la salle de bain et Alex y était encore. Je l'avais entendue couper l'eau mais elle semblait maintenant se sécher les cheveux et prenait des heures. Pourquoi lui avais-je dit de prendre son temps... ?

– Pisse dans une bouteille, me suggéra Tito.

– Nan. Je saurais pas quoi en faire après. Puis j'ai pas de bouteille vide.

– Bah demande lui de se dépêcher, ou d'aller se sécher les cheveux ailleurs !

– J'lui ai dit de prendre son temps, Tito ! Je vais pas me contredire !

Mon grand frère secoua la tête et reposa ses yeux sur la guitare de Joe. Lorsque ce dernier était absent, il la lui empruntait souvent. Et pour être honnête, il était très doué, surtout qu'il avait appris seul. Mais si Joe découvrait que son instrument avait été utilisé sans son accord, Tito aurait pu connaître la sensation d'être coupé en morceaux et éparpillé aux quatre coins du monde.

J'essayais de me concentrer sur ce qu'il jouait pour oublier que ma vessie m'implorait pour que j'aille la vider. J'avais les jambes croisées et m'impatientai plus que jamais. Il fallait qu'elle sorte tout de suite ou j'allais me pisser dessus.

Enfin, comme si mes prières avaient été entendues, le sèche-cheveux finit par s'arrêter et je me précipitai vers la porte de la salle-de-bain. À peine entendis-je le verrou tourner que je pris la poignée pour ouvrir rapidement la porte, étant plutôt pressé. Mais c'était sans compter Alex qui avait ouvert en même temps que moi et qui se trouvait maintenant à à peine trois centimètres de mon torse.

Mon Dieu, ses yeux confus... Son visage qui rosit à vue d'œil... Ses quelques mèches de cheveux encore mouillées... Et Seigneur, sa bouche...

J'en avait totalement oublié mon envie pressante.

J'étais allé plus vite que mon cerveau. Je n'avais même pas eu le temps de réfléchir à ce que je faisais.

D'abord, sa joue m'avait paru si douce que ma main n'avait pas résisté à l'envie de se loger dans sa nuque pour caresser sa pommette de mon pouce. Et elle n'avait pas bougé, mon Dieu, elle n'avait pas protesté, juste rougit de plus belle.

J'avais osé. J'avais osé pencher doucement mon visage vers le sien. Ses yeux s'étaient alors fermés. Ça n'était pas un rêve, ses yeux s'étaient réellement fermés.

Alors l'adrénaline me poussa à laisser nos fronts et nos nez se toucher. Mon cœur s'emballait.

Enfin. Mes lèvres entrèrent en contact avec les siennes. C'était magique, mieux que dans un rêve. Encore plus quand elle répondit à ce baiser. Et pendant une courte minute qui me sembla durer qu'une milliseconde, on s'embrassa.

Jusqu'à ce que nos lèvres se détachent difficilement, qu'on ouvre lentement les yeux et qu'on rougisse. Son regard croisa le mien, et je n'eus le temps de réaliser ce qu'il arrivait. Tout ce que je sais, c'est que je me retrouvai avec sa serviette dans les mains après qu'elle soit partie tranquillement, ayant du mal à me remettre de mes émotions.

Oh. Mon. Dieu. Que venai-je de faire ?!

– Ça va ? Elle était toute rouge quand elle est sortie...

Tito venait de monter les escaliers et me tira soudainement de mes pensées.

– Aussi rouge que toi... plissa-t-il les yeux. Il s'est passé quoi ? Tu l'as surprise à poil ?!

– Q-quoi ?! Tito, non !

Mes yeux retombèrent dans le vide. Ce qui venait d'arriver était tout simplement irréel.

– Putain, Tito... Ses lèvres... Elles étaient parfaites... J'te jure que maintenant je sais à quoi ressemble le paradis...

SummerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant