— Pourquoi c'est comme ça ? Tu crois qu'on est punis ? me demande Hortense en agrippant mon bras et en balayant la salle du regard.
Je lui réponds avec un haussement d'épaules, ne sachant pas quoi lui dire. Anxieuse, je jette un œil autour de moi, les tables et les bancs ont été poussés contre les murs de chaque côté du réfectoire et toutes les personnes travaillant ici sont réunies sur l'estrade à l'autre bout de la pièce.
— Pourquoi ils nous ont demandé de quitter la classe maintenant ? continue Hortense toujours aussi inquiète. Il est même pas encore onze heures. Et pourquoi les tables sont comme ça ? Ça veut dire qu'on ne mange pas ?
Le son paniqué dans sa voix, fait grandir la crainte en moi, m'empêchant de prononcer un mot.
— Quelqu'un a dû faire une bêtise et la directrice cherche le coupable, intervient soudain Adeline en s'approchant de nous.
— Et si elle ne le trouve pas ? Alors elle va tous nous punir ? demande-t-elle d'une voix tremblante.
Je la sens raffermir sa prise sur mon bras, me faisant presque mal. Pour essayer de la faire lâcher mon membre qui va bientôt être privé de sang, je pose une main sur la sienne. Je la regarde dans les yeux, en prenant une grande inspiration pour ne pas avoir moi aussi la voix qui tremble et être la plus rassurante possible pour cacher ma propre angoisse, je murmure :
— On n'a rien fait nous, donc on ne risque rien...
Hortense ne dit rien, elle se contente de me regarder quelques secondes dans les yeux, avant de lâcher mon bras pour essuyer ses yeux qui se sont embués de larmes.
— Tu es sûr ? Je ne veux pas être punie, moi...
— Mais quelle peureuse celle-là, s'écrie soudain Gaëtan en tapant dans le dos de Hortense.
— Eh vraiment t'as peur de tout, toi, enchaîne Julien en se mettant à droite d'Adeline.
D'un coup d'épaule, Hortense dégage de la main de Gaëtan avant de venir s'installer entre moi et Adeline. En se retournant elle lance un regard noir aux deux garçons, en grognant :
— Je ne suis pas une peureuse.
Ils pouffent de rire.
— Oh non bien sûr, t'es même la plus courageuse de l'orphelinat, se moque Gaétan en donnant un coup de coude complice à Julien.
— Mais oui, t'as pas vue c'est elle qui a fait fuir les chiens sauvages qui avaient réussi à passer le portail !
— Elle ne fait pas du tout partie de filles qui sont parties en courant pour aller pleurer dans les bras d'Annie !
— C'est bon arrêter, vous êtes lourd, soupire Adeline en levant les yeux aux ciels, clairement agacé qu'ils se moquent ainsi de Hortense.
Mais ça ne fait pas taire les garçons, qui continuent à se moquer de Hortense. Cette dernière baisse la tête, honteuse. La voir ainsi me fait un pincement au cœur, je n'aime pas voir mes amis comme ça. Alors je passe un bras autour de ses épaules pour la soutenir.
— Elle n'est pas la seule à avoir peur en plus, dis-je en essayant d'avoir une voix qui se veut assurée.
— Oui, continue Adeline qui avait elle aussi mit sa main sur la taille de Hortense, c'est normal d'avoir peur, moi non plus je veux pas être punis !
— Moi non plus, murmuré-je en la regardant dans les yeux.
Les garçons s'arrêtent net de rire en nous regardant chacune notre tour. Voyant qu'on fait bloquer, Gaëtan lève les yeux aux ciels avant de déclarer d'une voix lasse :
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La petite orpheline
Science FictionLorsque l'on est une jeune orpheline en 1922, la vie est loin d'être un jeu d'enfant. Surtout, quand on habite dans un orphelinat où la règle principale est le silence. Où il est défendu de jouer et de rire. Où les enfants sont cloîtrés en attendant...