Tu tomberas avec moi

Chapitre 16

Hans

Je poussai la porte du bar du village, une rose à la main. Mes pieds s'élançèrent vers le comptoir à la seule vue de Marie-Irène. J'avais décidé de l'accaparer pour une après-midi après son service. Elle ne m'avait toujours pas remarqué :

- Une bière, s'il vous plaît ! Fis-je à son intention.

Elle se retourna en sursaut avant de me sourire comme à son habitude :

- Tu bois pendant ton travail. Bah bravo, je te félicite.

Elle l'avait dit avec cette petite pointe sarcastique que j'aimais tant. Je m'empressai de lui répondre :

- Figures toi que aujourd'hui, je ne pas travailler.

Elle me tendit la boisson alcoolisée avant d'attraper un chiffon pour nettoyer le zinc :

- Que fais-tu ici ?

Je lui tendis la fleur, qu'elle prit aussitôt :

- Je t'emmener avec moi faire une petite balade.

Une lueur de malice anima son regard :

- Je ne suis pas sûre que mon parton me laisse partir comme ça.

Elle s'amusait avec les pétales de la rose, tout en me défiant du regard, toujours un petit sourire en coin. Je bus mon verre cul sec, il faut dire que j'avais une bonne descente :

- Il n'aura pas choix car je te kidnapper.

Elle n'eut pas le temps de répondre que je lui pris la main, direction ma voiture. Elle se mit à rire tout en me suivant. Je ne pouvais m'empêcher de l'imiter, le rire c'est contagieux. Arrivés dans le véhicule je m'empressai de démarrer, roulant à toute allure sur les sentiers. Quand nous fûmes à destination, elle se mit à rire de plus belle :

- Un champs ! Mais c'est génial !

Cria-t-elle avant de se mettre à courir à toutes jambes. Je la suivais, débutant une course poursuite.

Au bout de quelques minutes, nous tombions au sol son corps sur le mien, m'empêchant de bouger. Elle en était satisfaite et en profitait pour me narguer. Puis elle se tourna pour atterrir à mes côtés. Nous étions alongés sur le dos observant le ciel sans dire un mot.

Les heures qui suivirent nous avons parlé, longuement parlé. Mais je n'avais pas encore abordé un sujet qui était important à mes yeux. En fait j'hésitais.

Ma tête posée sur son cœur, elle jouait avec des mèches de mes cheveux tout en me taquinant. Je crois bien que j'avais peur de détruire ce beau moment.

Finalement je pris mon courage à deux mains avant de me livrer. Je me mis à lui raconter tout dans les moindres détails, ce qui s'était passé le jour de la rafle dans l'orphelinat, que je ne voulais pas faire cela et que je me sentais forcé, que j'avais été touché par le seul mot "méchant" prononcé par une enfant et que j'avais peur de la perdre, vraiment peur de la perdre.

Contrairement à ce que j'avais imaginé, elle était restée attentive jusqu'au bout de mon récit, ses yeux plongés dans les miens. Elle m'avait rassuré, pris dans ses bras quand j'avais éclaté en sanglots avant de me susurrer des mots doux à l'oreille. J'étais enfin soulagé et c'était grâce à elle, à sa présence. Tout d'un coup elle se leva en sursaut après avoir regardé sa montre :

- Mince ! Il est tard il faut que tu me ramène. Je danse ce soir.

Dans ce mouvement rapide elle fit tomber un bout de papier au sol que je ramassai avant de l'ouvrir. C'était un prospectus de propagande contre les nazis réalisé par des résistants. Mon cerveau avait fondu dans mon bloc crânien. Elle déposa sa main sur la mienne à la vue de ma réaction :

- Je ne voulais pas que tu l'apprenne comme cela, je te le jure. Je suis tellement désolée.

Mon regard se posa sur elle. Elle était calme affichant un léger sourire compatissant :

- Te rendre tu compte de ce que te feront les autres, quand ils te découvrir. Te rendre tu compte ? Je criai, toute ma rage sortait. Je m'avençai vers elle mais elle ne reculait pas.

- Je ne pouvoir rien faire ! Rien pour te protéger, tu m'entends ! Des larmes de rage coulaient sur mes joues, pendant que je la serrais fort contre moi, comme pour la garder à tout jamais dans mes bras. Elle me répondit dans un murmure :

- Alors, rejoins-moi !