XX- ~Iris~

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«I am in the mood to dissolve in the sky.»

Virginia Woolf

La mouche se débat énergiquement, empêtrée dans la toile collante de l'araignée. Cette dernière s'avance lentement mais sûrement vers sa proie qui est insouciamment tombée dans son piège mortel. Elle fait deux fois la taille de la mouche et Iris peut voir ses pattes velues de là où elle se trouve. Toujours en train de se débattre, l'insecte volant émet un bourdonnement désagréable en y mettant sans doute tout ce qu'il lui reste d'énergie pour se libérer, en vain. Soudain, l'araignée prédatrice se jette sur sa proie et commence à l'enrouler de ses fils gluants, diminuant de plus en plus ses forces jusqu'à ce qu'elle ne parvienne plus à bouger.

Iris reste hypnotisée par ce spectacle, ne quittant pas le petit recoin de sa fenêtre de chambre des yeux. La mouche est totalement à la merci de l'araignée, bientôt elle lui servira de casse croûte lorsque celle-ci aura faim et entre temps, d'autres mouches ou insectes se prendront dans sa toile, et cela dans un cycle sans fin. Iris ne peut s'empêcher d'y voir une métaphore des hommes et de la fin inexorable vers laquelle ils courent tous. Car si on y réfléchi bien, on se coince tous un jour dans cette toile géante, sans possibilité d'en ressortir. Enfin tous... sauf elle apparemment.

Ses pensées obscures sont interrompues par le vrombissement de son téléphone posé sur ses genoux. Elle esquisse un sourire radieux en voyant le nom de Lucas sur l'écran et le déverrouille pour lire son message.

« Iris Beaumont n'aurait-elle pas oublié de me répondre hier soir ? »

Elle tape immédiatement une réponse.

« Peut-être était-ce volontaire...;) »

« Et qu'aurais-je fait pour mériter ça Mademoiselle Beaumont ?»

« Si je le disais ce ne serait plus aussi drôle... »

« Et si je venais vous tirer les vers du nez de force ? Seriez vous coopérative ?

Iris s'imagine Lucas venir jusqu'ici et toquer à sa porte avec son air déterminé sans se préoccuper du regard désapprobateur et critique de sa mère, et après une minute de réflexion, elle se dit que ça ne la dérangerait pas le moins du monde.

« Vous n'avez qu'un moyen de le découvrir monsieur Petersen. » Répond-t-elle en souriant de toutes ses dents.

- Qui est donc la personne qui parvient le tour de magie de te faire sourire ? Demande la voix de sa mère derrière son dos.

Iris laisse tomber son portable et se tourne vers madame Hammond accoudé à l'encadrement de la porte, les bras croisés sur sa poitrine. Elle affiche un petit sourire timide et ses cheveux sont sauvagement relâchés autour de son visage portant des traces apparentes de fatigue. Aujourd'hui, elle ne porte pas de tenue chic, ce qui lui fait bizarre, mais un simple jogging et un tee-shirt ample avec les mots « Je suis une licorne » inscrit dessus qu'Iris lui a offert à son anniversaire il y a déjà plusieurs années. Les lettres R-É-C-O-N-C-I-L-I-A-T-I-O-N auraient tout aussi bien pu être écrites à la place, la signification reste la même : elle veut discuter.

- Personne. Marmonne Iris, qui reste toujours fâchée et dont la bonne humeur vient soudainement de retomber.

Le sourire de sa mère disparaît et elle décroise les bras avant d'avancer d'un pas et de franchir le seuil.

- À une époque tu me disais tout. Lui reproche-t-elle d'une voix attristée.

Iris lève les yeux à nouveau vers elle et mère et fille se dévisagent pendant de longues secondes.

Le cycle de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant