VII- ~Lucas~

47 8 6
                                    

«'But people are oceans.' she shrugged.'You cannot know them by their surface.'»

Beau Taplin

Lucas monte les marches de l'immeuble en traînant les pieds, jusqu'à parvenir à l'appartement où il vit avec son père. Son père... deux syllabes que Lucas a en horreur. Il sait déjà comment il va trouver l'habitation : en bordel, son père assit devant la télé, une bière (ou deux) à la main, empestant l'alcool à dix mètres. Une irrépressible envie de faire demi tour et de retourner avec ses potes pas très fréquentables le tient en haleine tout le trajet jusqu'au numéro 13. Ce numéro est censé être un chiffre qui porte chance ou l'inverse. Et Lucas n'a pas un seul doute sur l'effet qu'il a sur lui.

Sachant la porte ouverte, il l'ouvre avec nonchalance et pénètre dans l'appartement en soupirant. Sans se soucier des devoirs qu'il a à faire, il jette son sac sur le côté et se dirige vers le salon. Comme il l'a deviné, une forte odeur d'alcool flotte dans l'air mêlée de fumée de cigarette. Lucas ne peut pas critiquer sur ce point là car il fume lui aussi, et pas que du tabac. Mais il a au moins la décence de fumer à l'extérieur contrairement à son père.

En parlant de lui, il est bel et bien assit sur le canapé, devant la télévision allumée sur un match de foot, sans oublier la bière à la main. À en juger par le nombre de bouteilles à ses pieds et sur la table il n'en est pas qu'à une petite deuxième. Lucas trouve la scène incroyablement clichée et pathétique. Il fait mine qu'il s'en contre fiche et part se chercher un soda dans le réfrigérateur. Une fois revenu, il ouvre la fenêtre et s'y accoude se qui fait entrer l'air frais à l'intérieur de la pièce. Il a arrêté de neigé mais vu les nuages gris foncés dans le ciel et la chute de température, ça risque de tomber pendant la nuit.

Il sort une cigarette du paquet qu'il a acheté avant de rentrer et l'allume. Une fumée particulièrement blanche à cause du froid s'échappe d'entre ses lèvres et il profite de sentir l'air frais et pur contre sa peau.

- Lucas ! Putain ferme cette fenêtre ça caille !! Rugit Monsieur Petersen d'une voix qu'on aurait dit enrouée, mais qui est sûrement dû aux nombreuses années passées à fumer deux paquets par jour.

Le court moment de bien-être de Lucas vient d'être interrompu par son père et il doit se retenir pour ne pas lui envoyer son poing dans la figure. Il fait appel à la violence sans hésiter d'habitude, mais il a apprit depuis longtemps qu'avec son père c'est peine perdue. Il perd à coup sûr. À chaque fois. Même si celui-ci est saoul, il ne fait pas le poids et cela le met en rage.

Il se tourne vers son paternel et rétorque :

- Ça ne ferait pas de mal d'aérer un peu pourtant. Ça pu l'alcool dans tout l'appart' !

Son père pose pour la première fois ses yeux noirs sur son fils depuis qu'il entré. Mais son regard est remplit de défit et de méprit.

- Je m'en balance. Si t'aime pas l'odeur de l'appart', tu dégages. Ou alors tu ferme cette putain de fenêtre.

Lucas garde les bras le long du corps, les poings serrés. Il les serre jusqu'à ce que son envie de meurtre s'atténue. Sauf que là il n'y arrive pas. Son père le défit du regard alors que la fenêtre est toujours ouverte et que sa cigarette repose sur le rebord, éteinte. Le jeune homme n'a pas envie de rester une seconde de plus dans ce taudis avec son alcoolo de père. Il préfère dégager.

Il reprend sa veste en cuir noire qu'il avait posé sur une chaise et l'enfile avant de sortir d'ici. Ce n'est pas la première fois que ça lui arrive de faire ça et il sait qu'il reviendra dès le lendemain. Il n'est pas encore majeur et n'a pas assez d'argent pour se tirer de cet appartement miteux mais dès que le pourra, c'est ce qu'il fera.

Le cycle de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant