Sherlock
Il est 19 heures plus deux minutes quand Hakan s'expulse de la voiture pour me rejoindre.
– Tu allais être en retard, je commence, mais heureusement que la conférence est repoussée de quelques dizaines de minutes.
– Désolée, j'ai fait au plus vite ! s'excuse-t-elle. C'est compliqué de circuler en voiture avec cette foule.
– La prochaine fois, prends le métro.
– On ne me laisserait pas le prendre, m'explique-t-elle.
Dans la salle, nous ne croisons pas tant de monde que je l'imaginais. Ce qui nous permet d'avoir l'embarras du choix quant aux places disponibles. D'instinct, nous nous mettons en retrait dans un coin, côte à côte.
– Il y a quelques étudiants que j'ai déjà croisé sur le campus, remarque ma camarade.
– Je ne fais pas attention à tous les visages que je rencontre à l'université, je lui explique. Seulement ceux qui me semblent importants à retenir.
– Tu me reconnaîtrais ? demande Hakan d'humeur taquine.
– Canne de marche, cheveux longs et lâchés, yeux gris perçants... Je pense que ça devrait aller, oui.
Je souris en pensant à ma remarque. Bien sûr que je la retrouverais dans tout le campus : elle n'est pas qu'une étudiante parmi les autres pour moi. Je me tourne vers elle et, en y regardant de plus près, je constate quelque chose de changé chez ma partenaire. Elle continue de porter son sourire narquois aux lèvres.
– Tu t'es apprêtée ? je m'étonne. Tu ne mets jamais ce genre de tenue !
Elle me somme de me taire d'un geste. Après un instant, alors que la conférence va enfin débuter, elle se penche vers moi pour murmurer.
– J'avais un test pour mon cours de piano. On fait un effort de présentation pour ce genre d'occasion. Et pour ta gouverne, j'ai plusieurs tenues de travail que je n'enfile pas pour aller en cours.
– Pour la jupe, d'accord, je lui concède, mais le maquillage ! Jamais tu n'en fais autant...
– J'allais pas faire les choses à moitié non plus, elle rétorque.
Je laisse passer quelques minutes avant d'ajouter :
– C'est différent, mais ce n'est pas mal du tout. Au contraire.
– Tu trouves ? s'étonne-t-elle.
Un « chut » intempestif nous parvient pour réclamer notre silence. Alors, mon amie pouffe en se cachant dans ma chemise. Son souffle chaud traverse le tissu pour se fracasser sur mon corps, ce qui contraste avec le froid qui irradie sa peau en continu.
Hakan est mal à l'aise par ma remarque, embarrassée par le rappel à l'ordre aussi ; elle se cache contre moi pour dissimuler sa gêne. Elle ne peut plus rien me cacher sur elle. Je prends alors sa main dans les miennes et attend qu'elle reprenne ses esprits par elle-même. Elle réprime un fou rire de son mieux, mais je constate à regret que c'est loin d'être une facilité pour elle.
– Un peu de tenue, Hakan, je la réprimande.
– C'est ta faute, geint-elle.
– Ton mensonge est moins gros que ta mauvaise foi, je rétorque.
– Hé bien merci, s'offusque-t-elle.
Nous nous reconcentrons sur l'objet du débat : la psychologie. Nous oublions nos mains jointes, les unes dans les autres. Les doigts d'Hakan sont longs, particulièrement fins... mais glacés. Comment fait-elle pour être constamment aussi froide ? Et puis il y a la sensation que ce contact me procure : c'est aussi agréable que salvateur pour mon esprit. Les gens autour peuvent bien nous juger, même penser que nous sortons ensemble, tiens ! Ce n'est pas important pour moi, cela ne me dérange plus depuis l'instant où ma camarade n'en pâtit pas.
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Les Amis Proscrits
FanfictionRetrouvons Sherlock, Mycroft, John... mais aussi Hakan, Leif et tous les autres personnages fétiches d'« Une colocataire irascible » à l'âge de vingt ans. Dans cet univers particulier, le père d'Hakan est là pour former et diriger au mieux sa progé...