23. R-Hak-user

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Sherlock

Si j'ai promis à Hakan que je parlerai à John dès mon retour à Londres, elle n'a pas trouvé le courage de demander plus d'informations à mon père avant un bon moment. Deux jours pour être exact. Et encore ! Je l'ai forcée jusqu'à ce qu'elle cède.

Ce matin-ci, après le petit déjeuner, Hakan s'est empressée de rejoindre mon père dans le salon. Il est temps pour elle de connaître la vérité sur les déboires de la famille Selens. Comme si c'était essentiel au bon déroulement de l'entrevue, elle a négocié pour que je reste avec elle. Et elle a obtenu gain de cause.

En fait, j'accepte seulement pour valider mes propres théories sur le fameux oncle David et satisfaire ma curiosité. J'espère juste que Hakan ne finira pas par pleurer, j'ai horreur de ça. Je ne sais jamais quoi dire, ni quoi faire. Soit, recentrons-nous.

– Par où tu veux commencer ? demande mon père très sérieux.

– Greenfield, déclare Hakan sans broncher. Tout doit avoir un lien avec la Greenfield High School.

– En effet, confirme l'homme, tout a commencé dans ce pensionnat. Nous débutions justement nos études.

– Comment vous avez atterrit là-bas ? Comment mon père a terminé à cet endroit ?

– J'étais déjà à Greenfield alors que j'étais lycéen. David aussi. Fatalement, quand la pension a proposé ses services pour nous héberger durant la suite de notre parcours scolaire, nous avons sauté sur l'occasion. Or, nous avions une chambrée de quatre garçons, il nous fallait accueillir deux autres étudiants. Parmi eux, ton père.

– Vous vous entendiez bien ?

– On était un excellent quatuor, bien sûr ! Ça aurait pu être le cas encore aujourd'hui si... S'il n'y avait pas eu toutes ces bêtises.

– Quelles bêtises ?

Mon père semble réfléchir un moment, embêté par la nature de la conversation. Enfin, il fait une proposition :

– Peut-être devrais parler de ta mère, pour cela. Si tu es d'accord, bien entendu.

À son tour, mon amie hésite. Elle se tourne vers moi pour me consulter du regard, ce à quoi je réponds par un haussement d'épaules. C'est son histoire, alors ce sont ses décisions.

– Vous n'allez pas salir sa mémoire ? s'inquiète-t-elle.

– Ce n'est nullement dans mes intentions, dit mon père.

– Alors c'est d'accord.

– Malgré que nous nous entendions tous très bien, tous les quatre, nous sortions peu souvent ensemble. Chacun avait ses petites habitudes, ses projets. Ton père avait une petite amie qu'il rejoignait dès qu'il le pouvait, par exemple. Maximilian, le quatrième garçon qui partageait notre chambre, faisait souvent le mur pour sortir le soir on ne savait jamais où, ni avec qui. Quant à David, il n'avait pas de famille, hormis cette institution. De mon côté, je passais beaucoup de temps avec un petit groupe du conservatoire de Londres avec qui je m'entendais bien, dont faisait partie ta mère. Je me suis dit que ça pourrait coller avec David qui était toujours si seul et réservé. Lawrence et moi, nous avons donc organisé une sortie avec plusieurs filles du conservatoire, dans le but de les faire se rencontrer.

– Ma mère et l'oncle David ?

Mon père acquiesce silencieusement en ayant un petit rire gêné.

– Pourtant, insiste Hakan, vous avez dit que mon père avait déjà quelqu'un dans sa vie...

– Je sais, continue l'homme, l'amour ne s'explique pas. La magie a opéré entre tes parents ce soir-là précisément. Lawrence n'avait d'yeux que pour Victoria. C'était comme si ces deux-là s'étaient toujours connus ! Une alchimie incroyable à laquelle je n'aurais jamais cru sans le voir. Ils étaient pourtant différents.

Les Amis ProscritsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant