XIV

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AUGUSTIN

"Mon père... mon père... père Augustin..."

La voix qui pourtant était faible devenait de plus en plus clair. Je l'entendais à présent mieux lorsque je revins à la réalité, levant mes yeux vers la Mère supérieure du couvant de notre cathédrale. Je redressai mon tronc couché sur ma table de bureau de la sacristie, je ne sais depuis combien de temps je suis dans cette position. Je n'ai plus la notion de temps pour l'instant.

"Mon père vous devez aller vous coucher, il se fait tard déjà et demain vous avez une messe à l'aube." me suggérait la mère Anne-Marie.
"Et vous ma mère pourquoi êtes-vous encore debout?" Lui demandais-je massant légèrement les plis qui se formaient sur mon front.
"Nous avons une intersection avec les sœurs toute cette nuit mon père, l'avez-vous oublié?"
"Ah! Oui..."

J'étais vraiment épuisé de toutes mes forces et la Mère supérieure avait raison, j'avais besoin de me reposer pour être en forme pour la messe de ce matin. Je me demande depuis combien de temps déjà j'étais endormi sur ce bureau.

Je pus puiser assez de l'énergie qui me restait pour rejoindre la demeure dans laquelle les différents prêtres de notre église logent. Je m'excusai auprès de la Mère supérieure et traçai mon bout de chemin.

La cathédrale était sur le point de fermer, le Père Constantin assurait la dernière messe pour ces fidèles là qui n'ont pas eu assez de temps pour se recueillir auprès de notre Seigneur tout au long de cette journée. Il se faisait déjà tard et j'avais passé beaucoup de temps dans mon bureau, après la visite de Nicole.

Oui... c'est après mon échange avec Nicole que je me suis assoupis, et j'en avais vraiment besoin. J'avais besoin de reposer mes nerfs et de soulager mon esprit de toute cette souffrance qui m'anime depuis 23ans déjà.

Je savais que cette vocation n'allait point être une tâche facile, je savais que servir notre Seigneur n'allait pas être une pente sans embûche ou une eau claire telle celle de la roche. Je savais qu'en choisissant cette voie, la tentation et la persécution allaient être mes compagnons et mes ennemis de route mais c'est en Dieu que je trouve le réconfort et la force pour les surmonter et les écarter de mon chemin.

Nicole Richards visitait les lieux en fin d'après-midi et je ne pouvais lui cacher la vérité, mes convictions et ma vocation ne me le permettent pas et ma conscience non plus. Je ne savais comment s'est passé son échange avec Romina Morris parce que je m'étais réfugié dans la sacristie pour implorer la bonté de notre Seigneur face à ces deux âmes remplies de désirs qui ne glorifient pas son nom.

Nicole était remplie de colère une fois qu'elle rejoignit mon bureau. Cette colère qu'elle ressentait était tellement forte qu'elle ne savait comment l'évacuer si ce n'était que par des larmes. Ça faisait longtemps que l'avais vu ainsi, aussi remontée, agitée, dépitée et pleine de fureur. La présence de Romina seule avait suffit à refaire sortir ses démons que pourtant nous pensions avoir combattu depuis plusieurs années déjà. Je me doutais que pareille chose allait se produire mais je ne pouvais savoir le moment exact. C'était aujourd'hui et je ne m'étais aucunement préparé pour ce jour même si j'y songeais depuis le retour de la famille Morris dans notre chère ville.

Je ne pouvais mentir à Nicole sur cette question, ce n'était pas un secret de confession.
Elle pressentait déjà que je connaissais la famille Morris en particulier Romina, mais elle ne savait nullement que je savais que cette famille était de retour parmi nous.
Je sentis sa colère à ce moment sur moi, elle m'accusa de lui avoir caché telle chose mais était-ce dans mon droit de lui donner une information à laquelle elle ne s'était jamais proposée d'en parler avec moi? Nicole n'a jamais évoqué la question du retour des Morris avec moi alors pourquoi devrais-je lui donner une telle information sans qu'elle ne s'y intéresse? Ça ferait de moi une petite commère, là n'est pas l'objectif de ma vocation.

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