Ils chevauchaient dessus depuis deux jours sur la route qui reliait Anbes à Lynn, quand ils virent un groupe de cavaliers, loin devant eux. Ils étaient nombreux, une douzaine environ. Parmi eux, ils pouvaient voir une petite jeune femme aux cheveux blonds. Les renseignements de Banerd étaient de première force. À leur vue, Saalyn devint toute excitée, mais son groupe était trop inférieur en nombre pour les affronter de face. Sans compter la présence d'Hester qui les handicapait. Il allait falloir jouer serré. La guerrière libre passa des consignes pour qu'ils jouent les simples voyageurs qui se rendaient dans les provinces sud du royaume.
Lentement ils les rattrapèrent et les doublèrent. Saalyn en profita pour jeter un coup d'œil à ces étrangers qui les dévisagèrent de même. La joie de la stoltzin se mua en désespoir. Öta qui connaissait bien son maître devina aussitôt son changement de moral. Dès qu'ils eurent suffisamment distancé les autres, il posa la question.
— Que se passe-t-il ? demanda-t-il.
— Ce n'est pas Deirane, répondit-elle.
— Vous êtes sûr, intervint Banerd, elle correspond à la description dans les moindres détails.
— J'ai vécu avec elle pendant huit mois. Je la connais. Son rubis est incrusté dans sa peau, pas porté par un bijou.
— Parce que c'était sérieux cette histoire de pierres précieuses greffées dans sa peau ?
— Oui.
— Je croyais que c'était juste une image, dit Banerd.
— C'est la réalité, répondit Öta, je l'ai vue. C'est étrange, mais c'est la réalité.
— Si ce n'est pas Deirane, où est-elle ?
— Je me le demande, répondit Saalyn. Nous leur poserons la question ce soir à la veillée.
— Tu penses qu'ils sont liés à cette histoire ?
— C'est une coïncidence étrange je trouve. Nous pistons la mauvaise personne depuis Karghezo. Ça ne peut pas être le fruit du hasard. Ils savent peut-être où est Deirane.
— Je n'en suis pas sûr, intervint Banerd. Si j'avais utilisé un leurre pour brouiller une piste, je ne lui aurais surtout pas dit où j'irais moi-même.
— Je le pense aussi, mais on n'a pas beaucoup d'autres solutions.
— En tout cas, voilà qui explique pourquoi on les a rattrapés si facilement, remarqua Öta. Le séjour chez Sarhol nous avait mis presque une douzaine dans les dents.
Saalyn accéléra le trot pour arriver à la prochaine aire de repos avant la fausse Deirane et son groupe. Mais si les autres choisissaient le refuge qu'ils venaient de croiser, ils ne pourraient rien leur faire. Ces zones étaient sanctuarisées. Tout acte agressif y était interdit, même une opération policière. Et même les hors-la-loi respectaient cette paix. La menace de rester à l'extérieur lors des pluies de feu était suffisante pour brider leur agressivité, surtout en Nayt qui était à la limite du désert empoisonné. Lorsque la nuit tomba, ceux qu'ils poursuivaient n'avaient toujours pas atteint leur campement. À la déception de Saalyn, ils avaient choisi le refuge. Ils organisèrent le bivouac pour la nuit.
L'attaque survint au cœur de la nuit. Öta était de garde. Enveloppé dans son manteau noir, à l'écart du feu, il était totalement invisible. Un craquement attira son attention. Il écouta attentivement, mais le silence était revenu. Quelque chose le mettait mal à l'aise pourtant. Ils étaient trop près du désert pour que les gros animaux puissent vivre. Il y avait bien des lézards ou des insectes, mais trop petits, ils n'écrasaient pas les branches. Fixant le rabat du manteau sur son visage qui seul aurait pu le trahir, il se déplaça plus silencieusement qu'un fantôme jusqu'à Saalyn. Une main sur la bouche pour qu'elle ne crie pas en se réveillant, il la secoua doucement. Elle ouvrit les yeux dès qu'il lui toucha l'épaule. Comme lui, elle ne dormait profondément que quand elle se sentait en sécurité, ce qui n'était pas le cas à la belle étoile sur une route dans un pays étranger. En quelques gestes, il lui expliqua ce qu'il avait entendu. Elle hocha la tête pour manifester sa compréhension. De la tête, elle lui désigna Banerd, allongé juste derrière elle. Puis elle souleva son duvet pour lui montre Hester qui dormait, blotti contre elle. Un problème qu'il allait falloir résoudre.
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L'esclave (La malédiction des joyaux - Livre 2)
FantasySoixante ans se sont écoulés depuis la guerre qui a mis fin au règne des tyrans. Une civilisation a pu renaître sur les ruines, malgré la subsistance de poches de chaos. Mais la plus grande partie du continent reste mortelle. Vivant en limite de la...