— À quoi peut servir un tel objet, à part battre la mesure ? remarqua quelqu'un.
— C'est déjà pas mal. Mais je pense que tu as raison, et ce système tel quel ne trouvera guère d'utilité. Mais imagine, si on arrivait à transformer ce mouvement oscillant en mouvement circulaire, on pourrait actionner les roues d'un chariot. Après tout, dans nos moulins on sait faire le contraire. Où encore imagine qu'il y ait une ou deux longes entre la pile et la tige, tu pourrais envoyer un signal. Qui dit signal, dit message. Un message plus rapide que le plus rapide des chevaux. À mon avis, nous venons d'assister à la naissance d'une nouvelle ère. Une ère où nous ne dépendrions plus uniquement de la nature pour vivre.
La jeune scientifique rayonnait. Elle buvait les paroles de la Bibliothécaire comme du petit lait. Elle avait trouvé son dispositif amusant, suffisamment intéressant pour être montré à ses pairs. Mais elle n'avait imaginé qu'il emballerait à ce point son archonte. Elle n'avait pas vu toutes les potentialités de ce qu'elle avait créé, contrairement à cette dernière. Et dire qu'elle avait failli ne pas inviter Calen à la présentation, la trouvant trop puérile pour une aussi grande dame.
— Alors je continue ? demanda-t-elle sans trop y croire malgré les affirmations de son aînée.
— Bien sûr que tu continues, répondit Calen.
— Dans cette voie ?
— Je voudrais bien voir ce dispositif évoluer pour en faire quelque chose d'utilisable. Mais je ne voudrais pas non plus brider ton imagination. Si tes autres idées sont aussi prometteuses que celle-là, il faut que tu passes rapidement ta maîtrise, que l'on puisse te donner une équipe.
Calen se tourna vers Laxkil.
— Puisque tu es là, tu vas réorganiser les plannings de mon secrétariat pour l'y intégrer. Une fois par mois devrait suffire.
— À vos ordres, répondit Laxkil instinctivement.
Après l'appréhension qui avait suivi la présentation de l'expérience, la joie qui éclairait maintenant le visage de la jeune scientifique était saisissante. Secrétaire de Calen, une fonction qui avait peu à voir avec le secrétariat. En fait, elle offrait aux jeunes scientifiques l'opportunité de bénéficier des conseils de la Bibliothécaire. C'était la voie assurée vers la maîtrise.
Ternine se pencha vers Littold.
— Comment a-t-elle su que Laxkil était là ? chuchota-t-il.
— Je suis aveugle, mais pas sourde, répondit Calen.
Les étudiants se dispersèrent. Seule resta Calen, la jeune scientifique qui rangeait son appareil dans une boite pour l'emporter et un homme qui transpirait la fierté par tous les pores de sa peau, certainement le maître qui l'avait formée. La belle mathématicienne se dirigea vers eux.
— Kelyätmetae le Littold, ça faisait longtemps.
— Kelyätmetae le Calen.
Les deux femmes s'enlacèrent.
— Que fais-tu en compagnie d'un esclavagiste d'Orvbel ? demanda-t-elle quand elles se séparèrent.
— Mais... commença Ternine.
— L'accent, répondit simplement Calen.
— Je ne suis pas d'Orvbel pourtant.
— Du Salirian, confirma Calen. Mais l'influence de l'Orvbel se fait bien sentir dans votre façon de parler.
Littold prit la parole, laissant l'ancien espion se remettre de son étonnement.
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L'esclave (La malédiction des joyaux - Livre 2)
FantezieSoixante ans se sont écoulés depuis la guerre qui a mis fin au règne des tyrans. Une civilisation a pu renaître sur les ruines, malgré la subsistance de poches de chaos. Mais la plus grande partie du continent reste mortelle. Vivant en limite de la...