Chapitre 8 : J'étais inquiète

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Eleanor est assise sur une chaise métallique, à la table d'une des salles d'interrogatoire du poste de police. Sa jambe agitée laisse transparaître sa nervosité. Elle se force donc à rester immobile avant que l'inspecteur Turner n'entre dans la pièce et la voit dans cet état. La fatigue se lit facilement sur le visage de la jeune femme. Tout l'anti-cernes du monde ne serait pas suffisant pour venir à bout de cette mine de déterrée. Elle n'a dormi qu'à peine trois heures au cours de la nuit. Tourner et virer dans son lit, regarder l'heure et vérifier ses notifications... tout sauf un sommeil réparateur. Et elle en aurait bien eu besoin après la journée de la veille. L'enterrement de Charles était moralement épuisant pour elle. Non pas parce qu'elle avait pleuré durant la cérémonie, mais parce qu'elle avait contenu toutes ses émotions à l'intérieur. Comme si elle avait tout rassemblé dans une boite avant de la fermer à double tour. Eleanor se dit toujours que c'est la façon la plus simple de gérer ses émotions — si personne ne voit ce qu'elle ressent, elle n'est pas forcée d'en parler.

Mais l'inspecteur Turner entend bien faire en sorte qu'elle parle.

La porte de la salle s'ouvre et ce dernier salue Eleanor, avant de s'excuser pour son retard. Il prend place de l'autre côté de la table, sur laquelle il dépose son porte-document. En regardant toutes les pages à l'intérieur, Eleanor ne peut s'empêcher de se demander si l'une d'entre elles peut prouver son lien avec la mort de Charles...


LA NUIT DU MEURTRE

23H04

Alors que Charles discute avec un groupe d'invités, Eleanor lui fait signe d'approcher depuis l'autre côté du hall de l'hôtel. Sans attendre, le jeune homme coupe court à la conversation pour la rejoindre, jetant d'abord un regard aux alentours afin de s'assurer que personne ne l'observe. Eleanor arbore un air sérieux, mais Charles sourit tout de même en la retrouvant.

— Je croyais qu'on devait être discrets et ne pas se voir ce soir, chuchote-t-il dans le creux de son oreille. Tu as changé d'avis ?

Charles s'approche alors pour embrasser Eleanor. Cette dernière fait en sorte que le baiser soit seulement furtif, mais ne le repousse pas pour autant. Elle pose les mains sur le torse de Charles pour qu'il comprenne que l'heure est grave.

— J'attendais qu'ils ne puissent pas nous voir, explique-t-elle d'un ton solennel. Et il fallait que je t'en parle de vive voix, pas par message.

Charles fronce les sourcils dans la confusion. Il s'attendait seulement à un moment de tendresse volé, loin des autres invités.

— De quoi tu parles ? l'interroge-t-il, en sachant pertinemment qu'il ne va pas aimer ce qu'il s'apprête à entendre.

Malgré une hésitation furtive, Eleanor lâche un soupir. C'est le moment. Plus moyen de faire marche-arrière.

— Ils ont un plan pour se venger de toi, révèle-t-elle. Je n'ai pas tous les détails, je sais juste qu'il fallait que je fasse gagner du temps en m'assurant que tu restes loin de ton penthouse. Quel que ce soit l'objectif final... c'est pour ce soir.

Pendant que le cerveau de Charles tente de gérer cette information, qui fait l'effet d'une bombe, un moment de silence s'installe entre les deux jeunes amants. Cela change absolument tout. Charles est maintenant au courant pour le plan.


PRÉSENT

Après avoir laissé son esprit vagabonder l'espace d'un instant, Eleanor se demande si elle aurait mieux fait de se taire ce soir-là. Si je n'avais rien dit, Charles serait peut-être toujours en vie.

Notre meilleur ennemiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant