Chapitre 17 : Je me déteste

230 40 1
                                    

Un bref coup d'œil en direction des lettres lumineuses qui forment l'enseigne du Motel Bayview et Alex entre sur le parking. Il y a toujours aussi peu de voitures. Et celles qui étaient là à son arrivée quelques jours plus tôt sont déjà parties. Ce n'est clairement pas le genre d'endroit où l'on s'attarde si on a le choix. Mais Alex sait que ce n'est pas son cas. Elle doit rester loin de River Hill jusqu'à ce qu'elle éclaircisse toute cette histoire. Enfin, si elle y arrive. Les doutes s'accumulent au fur et à mesure que la situation se complique. Et elle vient tout juste de grandement se compliquer.

Elle enclenche le frein à main et coupe le moteur une fois garée dans la place qu'elle a sélectionnée. Un long soupir émane de son corps tandis qu'elle colle son front au volant. Elle est épuisée. Pas physiquement, mais mentalement. Sa conversation téléphonique avec Nick a durée moins de cinq minutes, mais un nombre impressionnant de nouvelles informations ont été lâchées à la minute.

Il a commencé par expliquer le comportement étrange d'Aiden depuis la mort de Charles, puis s'est tout de suite excusé de n'avoir rien dit jusque-là. Puis, il a parlé du message sur le téléphone prépayé, de la filature, du rendez-vous secret avec Lucas et de l'agression d'Eliza. Tout ça en l'espace d'une minute. Aucun mot n'était parvenu à sortir de la bouche d'Alex ; Elle ne faisait que cligner des yeux d'un air ébahie, tout en essayant de ne pas perdre le fil de la conversation. Ou plutôt, du monologue.

— Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit, continua Nick. J'ai passé en revue tous les pires scénarios dans ma tête. Je déteste ne rien savoir, c'était de la torture.

Alex ne le sait que trop bien. À chaque fois qu'il devait attendre des résultats d'examens — aussi bien médicaux que scolaires — Nick entrait en mode panique totale. Et ce mode inclut toujours une remise en question de tous les choix qu'il a fait dans sa vie, même les plus insignifiants. D'ordinaire, Alex est toujours là pour le calmer et le soutenir jusqu'à ce que la tempête passe, mais pas cette fois. Elle n'avait aucune idée de ce qui se passait dans la vie de son meilleur ami. Et même si elle avait su, elle ne peut pas affirmer avec certitude qu'elle aurait été d'une quelconque aide. Car elle est toute aussi incertaine que lui face à ce merdier, si ce n'est encore plus.

— Puis, il est rentré le lendemain matin. Il avait l'air aussi épuisé que moi. Il m'a dit que sa sœur allait bien, hormis le choc de l'agression et quelques hématomes, alors j'ai tout de suite voulu reprendre la conversation là où on l'avait laissée. Je voulais savoir ce qu'il me cachait.

Enfoncée dans le siège en cuir de sa voiture, Alex ressentit alors le besoin de contribuer à la conversation. En partie pour qu'il sache qu'elle l'écoutait toujours, mais aussi car elle mourrait d'envie de savoir la vérité, elle aussi.

— Et alors ? demanda-t-elle d'une voix impatiente. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?

— Lucas et lui parlaient en cachette parce qu'ils se faisaient du souci pour Eliza. Elle a déjà eu des problèmes avec sa santé mentale par le passé. Des épisodes de dépression nerveuse.

Alex en déduisit alors que son séjour à White Oak il y a un an et demi n'était pas la première fois qu'Eliza était en proie à des problèmes de santé. Mais elle laisse Nick continuer pour qu'il en vienne à ce qu'elle ignore.

— Elle va mieux aujourd'hui, mais ils avaient peur que la mort de Charles et toute l'enquête autour de son meurtre ne la... perturbe. Ils se donnaient des nouvelles via des téléphones prépayés parce que la police doit éviter de savoir qu'on est tous en contact. Mais aussi pour éviter qu'ils tombent sur les messages et qu'ils se disent que le passé d'Eliza et sa... relation avec Charles pourrait être un mobile pour le tuer.

Notre meilleur ennemiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant