- Cette fille ne te causera que des ennuis, mon fils !
- Maman, laisse Arès tranquille. Ce n'est pas normal que l'état de Laure ait empiré.
- Je disais seulement...
Ces voix donnèrent à Laure un mal de crâne comme elle n'en avait jamais connu. Son nez était bouché et sa gorge brûlante. Elle battit péniblement des cils.
- Elle se réveille !
Elle reconnut la voix enthousiaste de Maia. Laure ouvrit les yeux et la première chose qu'elle vit, fut le regard bicolore d'Arès, penché sur elle. Il était si près !
- Laissez-moi seul avec elle, ordonna t-il.
Il attendit qu'ils ferment la porte de leur chambre à coucher pour lui poser des questions.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé, Laure ?
Elle se rendit compte qu'il prononçait son prénom pour la première fois.
- Je ne sais pas.
Déboussolée, elle vida un verre d'eau. Elle se sentait toujours aussi nauséeuse.
- C'est de pire en pire, admit-elle lugubrement.
La jambe d'Arès tressautait le long du lit. Soit il réfléchissait, soit il était furieux. Sûrement un peu des deux. De son côté, elle tâcha de camoufler son anxiété.
- Je vais t'emmener chez un autre médecin, décida -il.
- Combien de temps ai-je dormi ?
- Une journée et une nuit. Quand je suis arrivé, hier soir, ma mère disait que tu étais sur ton lit de mort.
Son regard brillait - de soulagement ? Mais Laure avait du mal à croire qu'il pourrait regretter sa mort. Elle ne fit pas de commentaire pour autant.
Arès la porta jusqu'au carpentum qui devait les conduire chez l'autre docteur. Ce carrosse en bois était conduit par Maximus. Laure profita de la situation pour se reposer sur Arès sans que cela n'apparaisse inapproprié. Elle posa sa tête au creux de son bras. Pas un seul moment, la pression de ses doigts autour de sa taille ne se desserra. Laure se rendit compte qu'il inhalait son parfum. La dernière fois, ça avait vite dérapé...
Quand ils arrivèrent devant le palais, Laure fut estomaquée. Ne pouvant parler devant les gardes, elle fit les gros yeux à Arès, qui la porta sans faire attention à ses interrogations silencieuses.
Le médecin royal avait obtenu la permission de soigner Laure. C'était un tel privilège ! Arès avait-il insisté ? Comment avait-il convaincu l'empereur en si peu de temps ?
- En effet, quelque chose ne tourne pas rond, releva le vieux médecin en fronçant les sourcils.
Après plusieurs minutes, il révéla à Arès - et à Laure qu'il crut sourde - que le remède de Sextus Cassius comportait du poison. Encore une semaine et elle aurait succombé. La jeune fille se retint d'hoqueter. Arès avait l'air si enragé qu'elle prit peur. Et s'il décidait de commettre un meurtre ?
Le médecin prépara des herbes pour nettoyer l'estomac de Laure. Elle le remercia d'un signe de tête et marcha derrière Arès jusqu'au carrosse. Il n'était plus dans son état normal. Ce regard de meurtrier était le même qu'au Colisée. Rien de bon n'était envisageable.
Laure dû attendre qu'ils soient seuls à l'intérieur du véhicule pour parler.
- Arès, qu'est-ce que tu as l'intention de faire ?
- Découvrir la vérité.
Elle comprit qu'il essayait d'écourter la discussion. Il ne la touchait plus et fixait l'épée clipsée à sa ceinture. Laure se pencha vers lui.
- C'est-à-dire ?
- J'ignore qui de Paulla ou Sextus a tenté de te tuer. Je dois le découvrir et me venger.
- Pour un deuxième exil ? Ça n'en vaut pas la peine.
Arès la regarda droit dans les yeux.
- Bien sûr que si. À présent, tu es une Octavius et j'ai déjà tué pour ma famille. Je le ferais de nouveau si nécessaire.
Laure sentit un sentiment inconnu s'emparer d'elle. De la reconnaissance ? De la fierté ? Elle n'aurait su le décrire.
Être une Octavius valait peut-être mieux qu'être une Cornix, finalement.
Elle s'approcha davantage d'Arès, si bien que leur genoux se touchèrent. Après ce qu'il avait dit, elle ressentait le besoin - ou l'envie ? - de le toucher. Elle serra sa main, si grande comparée à la sienne. L'expression sévère d'Arès se fissura devant sa surprise.
- Je te remercie, Arès. Mais personne ne devrait mourir par ma faute.
Il l'écoutait à moitié, absorbé par le croisement de leur doigts. Puis son regard s'assombrit.
- Cesse de me contredire, pour une fois, lâcha t-il en serrant davantage ses doigts.
- Quand tu écouteras ce que moi, je dis, je ferais peut-être un effort.
Arès eut l'air mi-agacé, mi amusé par sa réplique. Sans prévenir, il tira Laure vers lui. Dans l'espace déjà exiguë du carrosse, elle se retrouva écrasée contre lui et son front heurta sa mâchoire.
- Tu es fou ? s'écria t-elle en espérant que Maximus, qui conduisait, ne l'avait pas entendue.
Arès la maintenait fermement contre lui et la força à le regarder. Ses prunelles bleue et verte la sondaient calmement. Dans cette position suggestive, où elle était assise sur ses genoux et où ses poings étaient retenus par ceux d'Arès, Laure n'était clairement pas à l'aise. Elle vit les pupilles d'Arès se dilater.
- Tu es insupportable et teigneuse, mais je ne les laisserai pas te tuer, dit-il à quelques millimètres de sa bouche.
Laure sentit son cœur battre douloureusement vite. Si elle s'évanouissait encore, ce serait à cause de lui. Elle essaya de se libérer mais la poigne d'Arès ne fit que redoubler autour de ses poignets. Son murmure résonna contre sa peau.
- Je n'arrive pas à résister. Pourquoi me fais-tu cet effet, Laure ?
- Arès, je...
- Accepte-le, ajouta t-il en l'attirant encore plus près, : tu es ma femme.
Les lèvres d'Arès s'emparèrent de celles de Laure sans lui laisser une seconde. La jeune fille eut l'impression de s'enflammer. Il en était toujours ainsi avec lui.
Quand elle s'écarta pour reprendre son souffle, elle vit combien il la désirait et cela lui fit peur. Il lui vola un deuxième baiser, plus brutal, qui fit presque saigner sa lèvre. Il entreprit d'embrasser ses épaules mais Laure, bien qu'emportée par une vague d'émotions indescriptibles, mit un terme à sa fougue.
- Arès. Lâche-moi.
Il poussa un râle avant de la relâcher. Laure n'affronta pas son regard avide. Elle croisa les bras en espérant qu'elle n'avait pas trop rougi. Elle étouffait. Sa peau et ses lèvres brûlaient. C'était un baiser inoubliable à travers Arès lui avait transmis plus qu'avec les mots. Elle avait perçu un mélange de colère, d'envie et d'espoir.
Les choses allaient davantage se compliquer, elle en était certaine. Arès voudrait se venger. Mais pour le moment, une seule chose la préoccupait : l'envie d'embrasser Arès à nouveau.
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Couronne de laurier
RomanceRome antique, Un combattant dans une arène. Ce qu'il veut ? Gagner pour sortir de son exil et retrouver sa place parmi les siens. Ce qu'il ignore, en revanche, c'est qu'il n'y a pas seulement une couronne de lauriers à remporter, mais aussi la main...