Chapitre 31 : Eden

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Le seul et unique endroit où je suis bien en ce moment, c'est sous ma couette. Malgré le magnifique temps de ce début d'automne, je ne rêve que d'une chose, c'est passer ma journée ici.

Ça fait déjà plus une semaine que je suis revenu de Californie. Une semaine que je n'ai pas revu Aria et elle me manque terriblement.

J'ai beau me repasser sans arrêt nos derniers moments dans ma tête, je n'arrive toujours pas à comprendre ce qui a pût se passer. On était si bien tous les deux, alors pourquoi du jour au lendemain tout s'est effondré ?

Alors que je rumine encore mon amour perdu, quelqu'un frappe à la porte de ma chambre.

– Qui que ce soit, dégagez !

Mais la porte s'ouvre sur Paul. Depuis que nous sommes rentrés, il reste collé à mes basques, il a peur que je replonge dans la drogue, mais même ça, je n'en suis pas capable.

– Il est l'heure de se lever Eden. On a rendez-vous avec Déborah Honey.

– Annule !

Je ne veux voir personne, je veux rester seul avec mes pensées noires.

Sans écouter mes demandes, Paul se dirige vers ma fenêtre et ouvre en grand les volets que je m'efforce de maintenir fermé. Aussitôt le soleil m'éblouie.

– Eden, je suis sérieux, tu ne peux pas continuer comme ça. Tu dois te bouger. J'ai même été obligé de payer un journaliste pour qu'il fasse un article sur toi.

Intrigué, je relève la tête de mon oreiller pour regarder mon agent. J'espère qu'il n'a pas parlé de cette histoire avec Aria.

– Comment ça ?

– Il a fait un article sur ton retour en studio qui, pour être honnête, est complètement fictif puisse que tu passes ton temps ici.

– Je ne me sens pas prêt à enregistrer.

Paul vient s'assoir à côté de moi. Je sais ce qu'il s'apprête à faire, je vais encore avoir droit à une leçon de moral.

– Je sais que tu as mal vécu ta rupture avec Aria, mais...

Mais je le stoppe tout de suite.

– Non, Paul, c'est ça le problème, il n'y a même pas eu rupture. Elle n'a pas eu le courage de me le dire en face.

– Elle devait avoir ses raisons, je suppose.

– C'est une lâche, c'est tout ! Après tout ce qu'on a vécu elle aurait dû m'attendre et me dire la vérité au lieu de partir pendant que j'étais sur le bateau.

Paul me regarde mais ne répond pas. On a eu cette conversation au moins une centaine de fois depuis notre retour et je suis sûr que je dois le souler à force mais je n'arrive pas à me sortir Aria de la tête.

– Il faut que tu passes à autre chose Eden.

– Oui, je sais.

– Et si tu commençais par te lever et aller prendre une douche ? Je te le répète mais on un rendez-vous.

Me sortir Aria de la tête est mission impossible. Pour autant Paul à raison, je ne peux pas rester plus longtemps enfermé chez moi. Je dois essayer de reprendre ma vie en main malgré le trou béant qu'elle a laissé dans mon cœur.

Il faut que je trouve la force de continuer...

Faisant un effort surhumain, je me décide à écouter mon oncle. Je me lève et par sous la douche.+


***


Deborah Honey est une fille plutôt jolie et sympa. Elle a tout pour elle, et je pense que c'est, finalement, une très bonne idée de faire ce duo avec elle.

Nous sommes tous, son staff et le mien, dans l'une des salles de réunion de ma maison de disques en train de parler de notre projet. Même si me trainer ici n'a pas été chose facile, ça me fait du bien de reprendre le travail et de pouvoir proposer une nouvelle chanson.

– Je pense qu'on peut faire un gros coup médiatique avec vous deux.

Georgia est à fond dans son rôle d'attaché de presse. Elle est persuadée que ce rapprochement avec Déborah peut nous rapporter, aussi bien à elle qu'à moi, une bonne couverture médiatique. Et qui dit couverture médiatique dit publicité gratuite pour notre duo.

– Je pense même qu'on peut aller plus loin.

– Tu penses à quoi Georgia ? Demande Paul.

Deborah est assise en face de moi et me dévisage.

C'est une fille bien, mais malheureusement, elle n'accepte pas qui elle est. La presse commence à se poser des questions sur son homosexualité, mais elle ne se sent pas prête à faire son coming out. Elle a donc besoin de faire croire qu'elle est en couple avec un homme.

– On peut faire croire à une relation amoureuse entre vous. Les gens vont s'attacher à votre histoire et les émissions télé vont s'arracher votre présence.

– Non, je ne suis pas d'accord.

Pour je ne sais quelle raison, je n'ai pas envie de jouer au petit couple parfait avec elle. Je ne veux pas faire semblant d'être amoureux d'une fille alors qu'une autre vient de me briser le cœur.

– Eden, ça pourrait être une bonne chose pour Déborah et toi, ajoute l'agent de cette dernière.

– On ne vous demande pas de coucher ensemble, mais juste d'avoir quelques gestes intimes devant les photographes qui peuvent laisser croire que vous êtes ensemble, sans en donner la confirmation.

Paul insiste mais je n'arrive pas à m'imaginer avec une autre fille dans les bras. Finalement, à bout de nerf, je me relève du canapé en cuir de ma maison de disque et fait les cent pas devant la fenêtre.

– Veuillez-nous excusez, j'aimerais parler avec Eden seul à seul.

Je me retourne pour regarder Paul. A quoi il joue ? Il ne va pas encore faire la morale même ici, parce que, honnêtement, je ne le supporte plus.

Lorsque tout le monde a quitté la pièce, mon manager s'approche de moi et se plante à mes côtés, devant une magnifique vue de New York.

– Faire croire que tu sors avec une fille comme Deborah, c'est le genre de chose que tu aurais fait il y a quelques temps. Alors pourquoi pas aujourd'hui ? Et ne me ment pas.

Mes mains dans les poches de mon jeans, je continue de contempler l'horizon. Cette ville est vraiment le seul endroit où je me sens chez moi. Mais je sais qu'elle est ici, quelque part. Elle doit peut-être même lire des journaux qui parlent de moi...

– Aria...

Je n'arrive même pas à finir ma phrase, rien que de prononcer son nom me met dans un état de colère immense, mais de tristesse encore plus absolue.

– Eden, je t'arrête tout de suite. Elle t'a quitté, je sais que c'est triste, que c'est la première fille pour qui tu as eu de vrais sentiments. Mais elle est passée à autre chose et je pense que tu devrais faire pareil.

Je reste sans bouger, à pincer les lèvres. Au fond de moi, je sais bien qu'il a raison, mais je n'arrive pas à admettre que tout soit réellement fini. Que je ne la reverrais probablement plus jamais.

– Au moins si elle voit que tu as quelqu'un d'autre, elle croira que toi aussi tu es passé à autre chose.

– Je ne sais pas trop Paul...

– Au moins tu auras eu ta revanche si elle voit la presse.

En définitif, ce n'est peut-être pas une si mauvaise idée que ça. Paul à raison, de me voir avec Déborah la fera peut-être réfléchir. Même s'il y a peu de chance que cela marche, je peux toujours essayer.

Et de toute façon il faut aussi que je pense à ma carrière, c'est maintenant la seule chose qui me reste.

– Bon, c'est d'accord, Déborah et moi allons jouer au couple parfait.

Notre destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant