Chapitre 1

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Charis était en train de coudre, chantonnant joyeusement tandis que Blanchefleur et son petit frère jouaient aux échecs. Les boucles rousses de la jeune femme retombaient dans son dos alors que son adversaire frottait doucement sa barbe, ses sourcils froncés dans un effort de concentration avant qu'un sourire ne déforme ses lèvres tandis qu'il avançait sa tour. Elle râla légèrement, attrapant un de ses pions avec son cavalier, qui lui même se fit avoir par la tour déplacée précédemment.

« - Ma chère soeur, vous êtes si prévisible ! »

- Pas du tout. Vous êtes juste plus doué. » maugréa-t-elle en faisant la moue.

« - Des nouvelles de Rosalie ? » renchérit-il aussitôt.

« - Oh, le bla-bla habituel. » répondit la rouquine en haussant les épaules. « Toujours pas de bébé en vue, et sa belle-mère aussi aimable qu'une porte qui grince remet encore en cause sa place auprès du seigneur Hector. »

« - Des nouvelles classiques, en soi. »

« - C'est cela. Elle espère nous voir l'été prochain. »

« - J'ai hâte. » affirma le jeune homme avec un maigre sourire. « Cette fois, je lui apprendrai à tirer à l'arc.

Ils se sourirent, reprenant tranquillement leur partie d'échecs. Blanchefleur continuait à se plaindre contre son cadet bien plus doué qu'elle à ce jeu stratégique. Il se moquait d'elle, la taquinant en disant qu'elle voulait aller trop vite et que ça n'aidait pas, recevant des oeillades meurtrières de la jolie rousse qui lui faisait face. La porte s'ouvrit brutalement, interrompant leur jeu au profit de Brenn, le visage tiré d'inquiétude et les joues rougies par l'effort. Ils froncèrent les sourcils, la même moue étonnée sur le visage. Si il n'avait pas été si horrifié, le maître d'armes aurait souri.

« - Votre père veut vous voir. Maintenant. »

Les deux enfants du Duc se levèrent de concert, partant le plus vite possible vers le bureau de leur paternel. Il était rare que ce dernier les convoque, et il ne faisait cela qu'en situation d'urgence ou de menaces ; et c'était bien cela qui les angoissait terriblement. Ils montèrent quatre à quatre les escaliers, entrant sans même frapper dans le bureau de leur père. Ce dernier avait le visage défait, et Mélissandre était pâle comme la mort. Erec se précipita vers sa chère mère pour serrer ses mains dans les siennes tandis que la rouquine se stoppait face à eux, raide comme un piquet.

« - Père. Que se passe-t-il ? Quelqu'un a tiré l'épée, c'est ça ? »

« - Pire. » souffla Dorian. « Bien pire. »

Le jeune homme agenouillé face à sa mère releva la tête vers le duc, son sourire taquin ayant totalement déserté son visage encore juvénile. Brenn avait serré ses bras autour de lui comme si il avait froid, et Charis avait couru vers sa dame pour poser un châle sur ses épaules, ses frêles mains frottant son dos pour tenter de la rassurer. Blanchefleur ne détachait pas son regard de son père, tentant de comprendre ce qui pourrait être plus terrible encore que quelqu'un d'autre que le Roi Arthur au pouvoir -mais était-il encore roi ?-. Tout cela est si confus. Le Duc finit par prendre une grande inspiration pour se donner du courage.

« - Il est mort. Le Roi Arthur est mort. »

Brenn serra brutalement la mâchoire et quitta la pièce d'un pas vif, ces mots étaient trop atroces à entendre et à supporter, Charis se précipitant aussitôt à sa suite pour tenter d'apaiser sa peine. Erec resta muet de stupeur, l'enfant en lui ne réalisant pas alors que Blanche se laissait tomber sur une chaise, les yeux écarquillés d'horreur. Ces réactions arrachèrent un sanglot à Mélissandre, et son mari posa une main tremblante sur sa nuque. Il semblait sous le choc, et il l'était, réellement. Le Roi Arthur n'était qu'un gamin la première fois qu'il l'avait vu, alors imaginer ce même gamin sur son lit de mort lui brisait le coeur et lui donnait des hauts-le-coeur. Sa fille adorée crispa ses poings sur ses braies.

Les Pétales d'une Vie Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant