Tome 1 Pouvoirs Lunaires Moitié (En cours de révision)

Prologue

– Où suis-je? Qui suis-je?

L'avait-elle dit ou l'avait-elle seulement pensé... la fillette l'ignorait. Il y avait tant de bruit brouillon qu'elle avait du mal à penser, pourtant, les sons semblaient venir d'un gouffre sans fond. Des bruits étouffés rebondissant contre les murs fades d'un endroit où personne, pas même les plus courageux, oserait y mettre le bout du nez. Tant de gens bougeaient dans la pièce vaste et éclairée d'une faible lueur d'un jaune affreux qui s'allumait et s'éteignait par intermittence désagréable. Ce fait, pourtant ridicule, lui donnait tellement mal aux yeux qu'elle aurait voulu les arracher de ses orbites, alors que, bien entendu, elle aurait simplement ressenti un autre mal.

De l'autre côté du solide transparent à la teinte nuageuse dans lequel elle se trouvait, se tenaient des monstres flous tout de blanc vêtu dont les tissus larges frottaient leur corps fatigué de leurs course effrénées, à l'intérieur des pièces étouffantes. On aurait dit des anges qui couraient dans tous les sens, mais la comparaison ne concordait pas aussi bien en ce qui concernait leur dur labeur et leur visage sombre. La fillette tentait de se retourner, mais son mouvement était au ralenti, un peu comme si elle vivait trop lentement pour ce monde.

– DOCTEUR FÉLIX, DOCTEUR FÉLIX, LE SUJET NUMÉRO DEUX S'EST RÉVEILLÉ, ELLE S'EST RÉVEILLÉE, criait anxieusement une femme d'âge moyenne dont la longue couette blonde et mal coiffée pendouillait lamentablement contre ses traits tirés par le manque flagrant de sommeil.

Alors qu'elle se tenait fébrilement à côté d'une machine complexe qui bipait bruyamment, rappelant le cri d'une chouette effarouchée, un homme à haute stature arrivait d'un pas nonchalant, comme si le bruit incessant était une habitude à laquelle il s'était rapidement accoutumé. Son air serein et assuré contrastait avec l'ambiance pesante de fatigue du laboratoire.

– Calmez-vous, Léa. Elle va se rendormir dans une minute. Elle n'est pas encore prête à ce qu'on la sorte du VeraSylver, sinon l'eau d'argent serait déjà tout en elle, disait calmement l'homme maigrelet en se passant une main paresseuse dans ses cheveux blonds sables et bouclés.

– Ouf... j'ai vraiment eu une peur bleue. Elle s'est réveillée pendant que je rentrais les dernières données du sang de Zeus, disait la dame en jouant avec ses cheveux d'un air aguicheur en battant des cils beaucoup plus que nécessaire.

– C'est... normale, elle a dû être perturbée par le trop plein des gènes de son paternel. Laissez-moi m'en occuper et retournez voir le sujet un.

Il faisait un geste dédaigneux de sa main pâle pour chasser la femme.

– Bien docteur.

Celle-ci, pas le moins du monde perturbé par l'attitude distante de l'homme, l'embrassait comme si sa vie en dépendait... comme si toute son anxiété s'était évaporée à la simple vu de celui-ci. Avec un grand sourire qui défigurait son visage gracieux en une étrange grimace, elle partait d'un pas joyeux, gambadant telle une nunuche qui découvrait le monde. L'homme marmonnait quelque chose que la fillette ne comprenait pas. Doucement, la fatigue s'emparait de son petit corps de bébé et elle sombrait aveuglément dans un sommeil profond, incapable de résister à la force qui s'emparait d'elle.

– Dans quelques mois, disait l'homme en s'approchant du VeraSylver contenant une étrange eau argentée où se trouvait le nourrisson endormi. Dans quelques mois, nous pourrons te donner à une famille... mais... nous te garderons sous surveillance le plus longtemps possible... jusqu'à ton plein potentiel...