Chapitre 29

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~ Matteo ~

Assis à mon bureau, portable posé devant moi, j'attends qu'on me donne des nouvelles de Luna, tendu et anxieux. Maena sur mes jambes sert son doudou contre elle, les yeux encore rouges à cause de sa dernière crise de larmes. La calmer a été impossible. Elle s'est arrêtée seule sûrement à cause de la fatigue.
Il est six heures du matin. Et elle n'a pas dormi de la nuit. Tout comme moi. Elle recommence à gesticuler un peu, en poussant de petits gémissements. J'essaie de la prendre dans mes bras en position allongée pour la bercer mais elle ne se laisse pas faire, et je reçois un coup de pied violent dans le coude, m'obligeant à la remettre à sa position initiale.

- Tu es aussi têtue que ta mère...soupiré je, en souriant tristement.

Elle repose sa tête contre mon torse, des larmes silencieuses parcourant ses joues.
Luna lui manque. Et c'était de ma faute. J'ai joué au con en les séparant avant hier. Je savais que c'était trop tôt. Luna n'était absolument pas prête, je le voyais et le sentais mais je vivais avec rancune... Je voulais lui faire payer le mal qu'elle était sensé m'avoir fait et tous les prétextes étaient bon pour la blesser... Ce que je ne savais pas, c'est que je ne faisais pas que la blesser. Après ce qu'elle avait pu vivre, en lui imposant mes caprices, j'étais sûrement en train de la réduire à néant.
J'ai déjà dû la détruire en la rejetant il y a huit mois...
Alors qu'elle disait la vérité.
Uniquement.
La vérité.
Les images de cette nuit, où je l'ai abandonné, n'ont fait que tourner en boucle dans ma tête. Et je vois les choses différemment. Je revisualise des détails que j'avais mal interprété... Comme la main de Diego, la maintenant fermement contre ce mur. Le gémissement qu'elle a laissé s'échapper contre les lèvres de ce connard... Qui n'était autre qu'un cri plaintif, ou désespéré, sous la douleur qu'il devait lui provoquer.
L'expression de son visage lorsque je les ai interrompu... Les phrases et mots qu'elle a prononcé, d'une voix peu assurée.

" Il était sur le point de me violer Matteo..."

Et je lui ai répliqué de se taire, trop jaloux et blessé à cet instant. Comme j'avais noté un rapprochement entre elle et lui, et que Luna se montrait distante envers moi en ce temps, j'ai tout de suite été sûr de mon raisonnement. La voir dans cet état, complètement débraillée, la chemise a moitié ouverte... Ça m'a rendu fou. La tristesse et la peur que je lisais dans son regard, et que j'avais interprété comme une sorte de pitié envers moi, ou simplement dû au choque de mon arrivée, était en fait réel. Elle était juste épouvantée et horrifiée par ce qu'elle venait de vivre et je n'ai pas su être là pour elle, la protéger, la rassurer, comme j'aurais dû le faire. J'ai préféré croire Diego... Un gars que je connaissais à peine. Qu'elle connaissait à peine. Elle me l'avait dit et assuré. Comment aurait-elle pu me faire ça ? Qu'est ce qui m'a prit de croire ce type plutôt qu'elle ?
Mon cœur se sert, j'ai du mal à trouver mon souffle en même temps que des larmes menacent de parcourir mes joues.

" Il va revenir... Ne me laisse pas..."

Mais je suis parti. Je ne l'ai pas écouté et je suis parti. Elle a pourtant insisté, a voulu tout m'expliquer à l'aéroport alors que je cherchais à m'éloigner d'elle. Je pense que ce jour là, elle voulait aussi me dire qu'elle était enceinte. Mais je l'ai rejetté. Quand je m'imagine ce qu'elle a pu vivre, j'ai envie de me tuer. Je ne mériterais que ça pour lui avoir fait autant de mal. Et ce qu'il s'est passé hier soir... C'est de trop.
Savoir qu'il l'a touché et blessé me met dans une rage folle. Contre lui mais avant tout contre moi-même. On s'était mutuellement promis de veiller sur l'un et sur l'autre... J'ai lamentablement échoué et rompu cette promesse.
Je suis restée à ses côtés dans l'ambulance jusqu'à ce qu'on arrive à l'hôpital... La voir comme ça... J'ai essayé de rester maître de mes émotions. Mais rien n'a été plus compliqué que ça.
Quand je l'ai trouvé sur son lit, nue, tremblante, recroquevillée sur elle même, c'est comme si mon monde avait volé en éclat. J'étais venue lui ramener Maena, qui n'avait pas arrêté de pleurer de la soirée parce qu'elle avait été malade. J'étais sur le point de critiquer pour la énième fois sa façon de faire avec notre fille, en prétextant que si elle était tombée malade, c'était bien de sa faute d'un côté...
Mais j'ai vite été remis à ma place. J'ai l'impression que tout ça n'est qu'un mauvais rêve et que je pourrais me réveiller d'un temps à l'autre mais non.
Luna est bien à l'hôpital.
Sa mère m'a gentiment fait comprendre que je serait plus utile en gardant Maena... Et j'ai accepté sans trop de résistance... Premièrement parce que j'avais besoin de prendre un peu de distance par rapport à tout ça, essayer de remettre de l'ordre dans mon esprit... Et aussi parce que Miguel a très mal réagit en me voyant et je ne voulais pas créer plus de problèmes. J'ai aussi juste été très lâche, je ne me sentais pas capable d'affronter Luna à son réveil et la voir sur ce lit d'hôpital, en sachant très bien que si elle se trouvait là, c'était de ma faute.
Me voilà donc à surveiller ma petite insomniaque, dévoré par les remords et aussi larmoyant qu'elle.
Mae' ferme de temps en temps les yeux mais se réveille à chaque fois quelques secondes plus tard en sursaut, comme si elle luttait contre le sommeil.
Je tourne la tête vers mon lit où Eliana s'est endormie. Elle est restée près de moi à essayer de me rassurer une bonne partie de la nuit...
Je sais que la soirée est loin d'avoir était facile pour elle aussi. Elle sait que tout ce qui s'est produit risque de soulever bien des questions dans notre couple... Je l'aime.
Après cette rupture avec Luna, elle a été la seule à avoir réussi à me redonner le sourire. Et aujourd'hui, je veux qu'elle continue de faire partie de ma vie. Mais peut-être plus comme ma petite amie...
Elle sait combien mes sentiments pour Luna étaient fort... Et le sont toujours. Elle en a toujours eu conscience. Seulement je me bornais à les refouler. Et maintenant que je vois que je n'avais pas de raison de le faire... C'est comme si tout ce que je me forçais à oublier m'étais revenu dessus et violemment.
À partir du moment où j'ai serré son corps complètement gelée contre le mien en la couvrant comme je le pouvais, j'ai été envahi par tellement d'émotions à la fois. Mais surtout de la peur. Elle ne bougeait quasiment plus, avait plusieurs hématomes et les lèvres d'une teinte légèrement bleutée. J'ai été terrorisé à l'idée de la perdre. Et c'est comme ça que je me suis rendue compte que j'aurais beau eu faire ce que je voulais pour la sortir de ma tête, de mon cœur ou même de ma vie... Mes sentiments étaient restés intact. Je l'aimais et l'aime, et la simple idée de la perdre m'a paralysée, jamais je n'ai autant été pris d'angoisse qu'en attendant cette foutu ambulance.
Tout ça pour en venir au fait que je sais, nous savons que rien ne sera plus comme avant. Eliana a voulu essayer d'aborder le sujet hier soir mais avec Maena, ça n'a pas vraiment été possible... Et je ne me sentais pas d'en parler non plus.
Je ne veux pas voir cette discussion arriver en vérité. Celle qui traitera de ce que nous allons devenir. Je lui ai assuré, il y a deux jours, que j'étais prêt à tout pour elle. Que je l'aimais. Et c'est vrai. Elle est devenue extrêmement importante pour moi. La question que je me pose maintenant: est ce vraiment de l'amour ce que je ressens pour elle ?
J'ai déjà la réponse. Mais l'assumer est quelque chose de difficile après tout ce temps passé à me mentir à moi même. Et je ne veux pas la blesser...
Je me sens soudainement impuissant et perdu. Parce que j'ai mal agis, pendant beaucoup trop longtemps, envers deux personnes qui compte pourtant beaucoup. Et je ne sais plus comment me sortir de cette situation sans faire plus de conneries...
Maena agite ses bras nerveusement et se met à crier, rejetant sa tétine. Elle est épuisée. Moi aussi. Sa mère lui manque... Et à moi aussi. Elle est sûrement stressée. Je le suis autant qu'elle, même si les raisons ne sont pas les mêmes...
J'inspire profondément. Si je veux la calmer elle, il faut déjà que j'arrive à me poser moi...
Je me lève et sort de la chambre en essayant de ne pas faire trop de bruit. Je sers un peu plus Maena contre moi, imitant la façon qu'avait de le faire Luna, et attrape un plaid sur le canapé pour nous couvrir. C'est presque dans un geste automatique que Mae' appuie sa tête sur mon épaule. Même si elle est toujours secouée par de légers sanglots, je sais que c'est un signe de décontraction chez elle.
Je me dirige dans le garage, et me pose sur les dernières marches d'escaliers permettant d'y accéder, juste après avoir allumer la lumière.
Aussitôt, ma grosse boule de poils blanche vient nous rejoindre. Il a pris un certains temps à se lever, surpris de me voir ici. Surtout si tôt. Tout content, il renifle un peu Maena, qui le regarde étrangement, ne bougeant pas pour autant. Echo finit par s'asseoir en face de nous et couine légèrement en me regardant comme s'il sentait que quelque chose n'allait pas. J'affiche un léger rictus. Il a toujours été très sensible à nos états d'âme. C'est pour ça que Luna l'aimait tant. Je le caresse lentement. Il pose sa tête sur mes genoux et ferme les yeux. Je reconnais l'avoir un peu délaissé dernièrement...
Il serait en fait temps de changer beaucoup de choses... Et j'espère y arriver...

***

Hey 😄

Comme il m'a beaucoup été demandé, exceptionnellement, ce chapitre est sous le point de vue de Matteo.
J'espère qu'il vous a plu 🤗 j'ai eu quelques difficultés à l'écrire 😅

Matteo qui prend enfin conscience de ses erreurs... Vous me direz, avec ce qu'il a vu, il n'a pas trop eu le choix... 😕😅

Je vous laisse donc sur cette fin de chapitre relativement vague, mais qui rend bien compte du fait que Matteo veut se rattraper... =) Et il va devoir ramer un petit peu 😅

Je vous dit au prochain chapitre et/ou dans les commentaires ☺️

Entre Tú y Yo Où les histoires vivent. Découvrez maintenant