Chapitre 39

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~Matteo~

Après avoir vu la vidéo sur les réseaux sociaux, je m'en suis tellement voulu que j'ai hésité avant de poser un pied dehors et rejoindre tout le monde. Je me sens tellement honteux. Ma productrice m'a appelé, complètement furieuse après moi pour l'image que je m'étais donné. Je l'ai à peine écouté tant j'étais dévasté. Et si je suis dans cet état... Je ne veux même pas imaginer celui de Luna. L'a-t-elle vu à l'heure actuel ? Il est bientôt dix-sept heures... Elle devait rejoindre l'équipe il y a un moment. J'ai peur de l'affronter. Elle va sûrement m'en vouloir. J'aurais dû me tenir... Personne n'était vraiment au courant de ce qui a pu se produire, et ça aurait dû rester privée. Mais j'étais déchaîné, et ce connard est celui qui m'a poussé le premier, je n'ai pas tenu bien longtemps avant de péter un fusible. Je ne me rendais même pas compte de ce que je disais. 
Il faut que j'aille voir Luna. J'attrape mon téléphone et lui envoie un message pour savoir où elle se trouve. En attendant une réponse, j'arrête de me morfondre, prends un sac dans lequel je fourre mes chaussures, enfile un pull dont je rabats la capuche sur ma tête et sort de chez moi. Je sais que devant mon portail m'attendront une vingtaine de journaliste. J'ai donc eu la présence d'esprit de sortir mes rollers directement. J'escalade le mur donnant sur la rue opposé à mon entrée principale, non sans difficulté. Ça risque d'être plus long qu'en voiture mais tant pis. J'enfile mes patins avec précipitation sur le bord du trottoir et une fois fait, vérifie mes messages. Aucune nouvelle. Je contacte Simon et reçoit une réponse dans la minute.

De Simon
« Elle est encore ici et sait rien. Ça va pas durer. Elle va avoir besoin de soutien... Bouge-toi. »

Pas besoin de plus. Je m'élance vers le Jam & Roller sans même lui répondre. Jamais de ma vie je n'ai patiné aussi vite. Ma capuche finit évidement par retomber, dévoilant mon identité. On essaie de m'arrêter plusieurs fois. J'entends crier mon nom. Mais j'ignore, continue ma route en zigzaguant entre chaque personne, me mêlant même parfois à la circulation, débarquant sans prévenir sur la route. Comportement dangereux, j'en suis conscient... On me klaxonne, je manque de peu de me faire écraser, mais il faut croire que la chance est avec moi. J'arrive sain et sauf devant l'établissement, recouvre ma tête, m'assois sur un banc pour enlever mes patins avec rapidité et les mettre dans mon sac avant d'enfiler mes chaussures. C'est en courant que j'arrive dans l'espace bar. Je repère l'équipe. Et plus précisément elle. Malgré qu'elle me fasse dos, qu'elle se soit faite de jolies mèches blondes, je la reconnaîtrais entre mille. Elle paraît trembler. Yam et Ambre l'encadre, les visages qui l'entourent montrent une certaine inquiétude, Simon précisément est abattu. Mon coeur se sert. Je m'approche d'eux à pas lents, pris d'une peur bleue qu'elle me repousse et me fasse comprendre de nouveau à quel point j'ai été abruti. Qu'elle me dise qu'elle me déteste et me fusille du regard. Ambre s'écarte aussitôt en m'apercevant. Proche d'elle, je vois qu'elle pleure silencieusement. Respirer lui semble compliquée alors qu'elle fixe le sol, les bras croisés sur sa poitrine, comme pour se protéger du monde extérieur. Je me mords l'intérieur de la joue. Mon Dieu Luna... C'était un spectacle pour les gens du lieu. Je devais la sortir de là. Je ne réfléchis même plus, et l'attrape délicatement par la taille pour l'obliger à se tourner et l'attirer à moi. Son regard se relève brutalement. Et ce que je redoutais se produit : elle me repousse, mais j'attrape fermement son poignet et l'oblige à me suivre, la poussant à se mettre devant moi et à avancer, malgré ses murmures qui m'ordonnent de la laisser tranquille. Nous sortons du bâtiment, en essayant de se faire le moins possible remarquer, même si c'est peine perdu. Je l'entraîne dans le petit square placé juste derrière celui-ci. Elle est en train de suffoquer lorsque nous nous arrêtons. Elle pleure à chaudes larmes, et est secouée par celles-ci. Ma poitrine se déchire littéralement et bien qu'elle n'en ait pas envie, je finis par la prendre dans mes bras. Elle se débat un peu, chuchotant à demi-mot, que j'avais fait n'importe-quoi, que je n'avais eu aucun droit de le dire comme j'avais pu le faire... Mais épuisée, elle s'arrête rapidement et finit par se laisser aller contre moi, s'accrochant finalement à mes épaules comme à une bouée de sauvetage. Je sers un peu plus fortement son corps frêle contre le mien. Dans un souffle, je m'excuse, et enfouie ma tête dans ses cheveux, respirant doucement son odeur. Je ne sais pas si cela est dû à la fatigue, ou à tous ces événements qui d'un coup nous sont tombés dessus, mais je finis moi aussi par lâcher une larme. Je retiens toutefois les autres. Je n'ai juste pas le droit de pleurer. Par respect pour elle. Petit à petit je sens qu'elle se calme, essayant de caler sa respiration sur la mienne.

Entre Tú y Yo Où les histoires vivent. Découvrez maintenant