Chapitre 19 - Interrogations

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Ce ne fut pas un réveil habituel pour Lucas. Aucunes des pâtisseries chaudes, tout juste sorties du four de la cuisine ou corbeille de fruit ne lui furent apportées. A la place, un serviteur arborant encore son bonnet de nuit sur la tête entra en claquant la porte et en faisant de grands gestes affolés. Ça commencer à devenir une habitude.

— Votre Majesté, Votre Majesté ! Il faut vous lever ! Vous êtes attendus dans la grande salle. Il est arrivé quelque chose !

Lucas souleva difficilement une paupière en grimaçant sous cette intrusion brutale, et enfonça un peu plus ses oreilles dans le confort moelleux de son oreiller. Si seulement le rembourrage en plume avait suffi à étouffer les cris de si bonne heure. De mauvaise grâce, il finit par maugréer :

— Que se passe-t-il donc ? Parle !

— Un messager est arrivé, Votre Majesté.

— Voilà qui n'a rien d'exceptionnel.

— Mais votre Majesté, celui-ci ne porte aucunes des couleurs que nous connaissons, que ce soit amis ou ennemis, et j'ai ouïe dire que le message qu'il portait était extrêmement important et urgent.

Lucas se redressa brusquement. Voilà enfin une information qui l'intéressait. Un messager inconnu portait un message de si bonne heure, et à peine un jour après l'arrivée du convoi de prisonniers. Ce ne pouvait pas être une coïncidence. Un sourire s'étira sur ses lèvres, à la fois tendre et malin. Il savait que Tiliana ne resterait pas sans rien faire, mais il ne s'attendait pas à ce qu'elle réagisse aussi rapidement. En revanche, il ne comprenait pas pourquoi elle avait envoyé un messager. Il pensait qu'elle aurait attaqué de front, en essayant de s'introduire dans le château. Il commençait à se prendre au jeu du chat et de la souris qui s'était progressivement instauré entre eux, et cela rendait ses journées intéressantes, encore plus que celles que celles durant lesquelles il se consacrait à l'exercice de ses fonctions de futur monarque.

— Apportez-moi mes vêtements et aidez-moi à m'habiller, faites vite. Donnez-moi la tenue officielle.

L'homme l'aida à se préparer et en peu de temps, il fut rendu à la grande salle. Son père était déjà assis sur son trône, et les conseillers arrivaient les un après les autres, prenant leur place de chaque côté de la pièce en deux troupeaux informes. Leurs longues bleues se mélangeaient aux armures et tuniques des capitaines et lieutenant. Tous avaient été prévenus. Lucas vint se mettre aux côtés du Roi Pierre, là où était sa place. Celui-ci le salua aussi froidement que la décence le lui permettait.

— Faites-le entrer, ordonna-t-il aux gardes qui se tenaient devant la porte.

Un homme à la tenue raffinée, mais néanmoins conçue pour se battre s'avança dans l'allée. Il s'inclina respectueusement devant le roi, alors que son accoutrement suscitait déjà de nombreuses réactions au sein de l'assemblée.

— Votre Majesté, je suis présent en ce jour afin de vous délivrer un message de la part de son Altesse Royale la princesse Tiliana d'Ovra.

Le roi tressaillit à l'évocation de ce nom, et encore plus à celle de ce titre qu'il jugeait des plus infâmes.

— Dois-je en déduire que vous êtes l'un des hommes de Périphènes d'Ovra ? Demanda-t-il d'un ton doucereux.

— Non votre Majesté. Je n'en fais aucunement partie. Je représente bien Tiliana d'Ovra. Elle m'a chargé de vous remettre ceci, dit-il en tendant un parchemin à deux mains.

Le roi fit signe qu'on le lui apporte. Il était hors de question qu'il se lève lui-même pour le prendre.

— Intéressant finit-il par lâcher en se caressant le menton, très intéressant. Mon fils, peux-tu le lire à voix haute s'il te plait.

Tiliana d'Ovra - Les Sans PeupleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant