Chapitre 14 - L'attaque

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Les Sans Peuples s'enfuyaient de toute part dans la profondeur des bois sombres, les branchages se prenaient dans les jupes des femmes qui se déchiraient, et les enfants ne sentaient plus leurs jambes sous l'effort inhabituel qui leur était demandé. Ils avançaient en groupe, essayant de ne pas s'éparpiller. Stephen et cinq autres jeunes guerriers qui, sur ordre de Tiliana, avait pris la tête des fuyards, essayaient d'aider les plus âgés à avancer sur un terrain pentu et difficilement praticable.

Une quarantaine de soldats était restés au camp. Ils étaient bien moins nombreux que le bataillon envoyé par le roi et tous étaient de très jeunes gens qui parfois n'avaient même pas fini leur entrainement. Tiliana regarda les hommes qui sur son ordre, s'étaient dispersés derrière les arbres et sur la plateforme rocheuse devant les grottes. Ils n'étaient pas armés pour supporter une telle attaque, et leur équipement était bien trop léger pour être efficace, mais il fallait qu'ils retiennent les gardes d'Arcin le plus longtemps possible. Ce camp là n'avait pas été conçu pour devenir être une zone de combat, mais bien un lieu de vie. Elle n'avait pas le temps d'aller chercher de l'aide. L'ennemi était trop près. Louve mit un petit coup de langue sur sa main gauche, lui rappelant sa présence à ses côtés. Réconforter, Tiliana tenta de motiver ses troupes tant bien que mal.

— Ecoutez-moi Messieurs, nous devons les retenir ! Plus nous fournirons de temps à vos femmes, vos enfants, vos mères, plus ils seront en sécurité ! Vous avez été formés pour cela, il est temps de mettre en pratique ces techniques durement appris. Tuez sans sommation, car ils feront de même !

Un cri d'approbation générale fit écho à son discourt, mais l'attitude générale des hommes ne trompait pas. Il s'agissait bien de peur, rien d'autre. Autrefois, ils étaient de pauvres bougres sans le sou, des petits escrocs perdus dans un monde où la richesse était maitresse. Du haut du promontoire, elle aperçut les chevaux qui approchaient. Louve, qui sentait les vibrations des sabots sous ses coussinets, se mit à hurler. En tête, Tiliana distingua Lucas d'Arcin. Elle pesta intérieurement. Bien qu'elle se soit doutée qu'il irait retrouver ses hommes après avoir quitté le camp, elle avait espéré qu'après les journées passées parmi eux, il n'en fit rien et qu'il rentra directement à Erramore.

— Archers en position ! Hurla-t-elle, alors que les cavaliers fonçaient sur eux.

Les arbres constituaient des obstacles importants, elle ne pouvait donner l'ordre de tirer avant qu'ils ne se soient rapprochés et soient à portée de tire. Une boule s'était formée dans sa gorge et la lui obstruée complètement. Pour la première fois de sa vie, elle était inquiète pour quelqu'un. Jusqu'à présent, elle ne s'était jamais vraiment fait du souci que pour Tory et la petite Rose, mais Lucas chargeait en tête, il était beaucoup trop exposé à son goût, et elle ne pouvait prendre le risque qu'il soit gravement blessé, ou pire tué, il était capital qu'il reste en vie, pour le bien de tous.

Ils n'étaient plus qu'à cent cinquante mètres de ses premiers hommes. C'était le moment.

— Tirez !

Les flèches fusèrent entre les troncs. Les premiers soldats tombèrent. La bataille commençait.

— Deuxième volées, encochez ! Tirez !

Les cris des premiers blessés se mêlaient au martèlement des sabots. Lucas était toujours en tête, hurlant de rage en voyant ses hommes tomber au sol sous les tirs précis de leurs opposants.

— Dégainez les épées ! Hurla Tiliana.

Elle sauta de la plate forme, se réceptionna avec agilité et s'élança en avant.

— Avec moi ! Retenez-les ! Il faut gagner du temps !

Louve bondit souplement à ses côtés, tous crocs dehors. Les épées s'entrechoquèrent. Les Sans Peuple se battaient bravement. L'envie de liberté et de donner protection de leurs familles leur donnait la force d'avançait encore et encore. Tiliana se jeta dans la cohue avec toute la détermination qui la caractérisait. Elle était plus petite et moins puissante que la plupart des hommes qu'elle affrontait, mais nettement plus souple et plus rapide. Depuis son plus jeune âge, elle avait appris à mettre à profits ces qualités. Sa lame contrait habilement celles qui s'habitaient sur elle. Elle n'était concentrée sur rien d'autre, continuant à avancer avec détermination. Un poignard vint se figer juste à côté de sa tête, elle échappa de peu à une pointe qui passa à quelques millimètres de son ventre, mais à chaque fois, elle restait debout, et en vie.

Tiliana d'Ovra - Les Sans PeupleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant