Lucas avait passé plus de cinq jours à sillonner les bois à la recherche de sa sœur, sans aucun succès. Bien que le peuple d'Arcin ait fini par se résoudre et se faire à l'idée qu'il allait surement falloir attendre une demande de rançon pour récupérer la princesse, il n'avait pu trouver le sommeil depuis ce jour fatidique. Assis dans la bibliothèque, il étudiait les différents plans de la forêt lorsque l'un des gardes du palais entra en trombe dans la pièce, complètement essoufflé, les joues rougies par l'effort qu'il venait de fournir dans sa précipitation à se rendre aux côtés de son prince pour lui annoncer la nouvelle.
— Votre Altesse, Votre Altesse ! Nous l'avons retrouvé !
N'osant y croire, il se leva brusquement, faisant basculer le tabouret sur lequel il était assis en arrière.
— Elle est revenue ?
— Oui votre altesse. Elle est là, nous l'avons conduite à la grande salle.
Lucas se précipita. Jamais il n'avait parcouru aussi rapidement la distance qui séparait les deux pièces. Elle était bien là, plantée en plein milieu de la salle, ses longs cheveux couleur de jais tombant en cascade dans son dos, exactement tel qu'il l'avait laissé une semaine auparavant. Il se rua sur elle et la fit tournoyer dans les airs. Astride, toute à la joie d'avoir retrouvé son frère, se mit à l'embrasser aussi fort qu'elle le pouvait. Le roi lui-même vint accueillir sa fille, faisant pour une fois preuve, si ce n'est d'affection, d'une joie contenue à son égard. Il lui fit même venir de quoi se restaurer, et s'installa à ses côtés lorsqu'elle commença son repas.
— Que vous est-il arrivé mon enfant ? Où étiez-vous donc passées ?
— J'étais dans la forêt. De gentilles personnes m'ont aidé à revenir jusqu'à Erramore.
— Qui était ces gens, Astride?
— Je ne saurais le dire. Ils ne m'ont jamais laissé voir leurs visages.
Le roi acquiesça de la tête, pensant que sa fille devait être sous le choc de ce qui lui était arrivée ces derniers jours. En revanche, Lucas n'était pas dupe. Il ne connaissait que trop bien sa sœur pour savoir qu'elle mentait. Elle détournait toujours le regard vers la droite lorsque cela était le cas. Ne voulant pas la confondre devant leur père, il attendit patiemment qu'elle ait fini son repas avant de la reconduire lui-même à sa chambre. Il la borda dans son lit, avant de finalement lui demander :
— Que t'est-il réellement arrivé Astride ? Ne me mens pas. Tu sais que je peux discerner le vrai du faux.
La petite fille soupira et se mis à genoux sur les couvertures, se collant contre son frère qui la prit volontiers dans ses bras d'un un geste protecteur.
— J'ai rencontré une amie, et elle m'a aidé. Mais je n'ai pas le droit de te dire qui c'est.
— Très bien, alors peut-être peux-tu me la décrire ? Comment était-elle, cette amie ? Etait-ce une vieille dame ?
— Oh non pas du tout ! Elle était jeune ! Et belle aussi ! Elle avait les cheveux comme les pelages des renards de la forêt.
— Ah oui, vraiment. Et que peux-tu me dire d'autre qui ne soit pas un secret ? C'est très important Astride. J'ai besoin de tous les détails que tu pourras me donner.
— Elle a été très gentille avec moi. C'est vraiment mon amie maintenant tu sais. Elle m'a même laissé caresser son loup.
— Est-ce que c'est elle qui t'a ramené jusqu'au château ?
— Oui. Elle m'a ramené jusque devant la porte pour que je sois en sécurité.
Lucas détourna la tête afin qu'Astride ne puisse voir les sombres pensées qui l'agitaient. Le peu qu'elle venait de dévoiler ne laissait aucun doute sur l'identité de la fille qui l'avait recueillit ces derniers jours. Elle correspondait en tous points aux dires du vieux sage. En revanche, son attitude bienveillante envers la fillette l'intriguait. Pourquoi une princesse d'Ovra avait-elle fait ça ? Avait-elle réussi à soutirer des informations à la petite princesse ? Et plus inquiétant encore, cette fameuse Tiliana d'Ovra avait réussi à pénétrer dans la cité et à remonter jusqu'au château sans jamais être aperçu. Cela ne pouvait signifier qu'une chose, elle connaissait très bien les rues d'Erramore et avait dû les arpenter un grand nombre de fois sans se faire remarquer. Il fallait qu'il donne des ordres afin de renforcer tous les contrôles.
Il sentit un poids se faire plus lourd sur sa cuisse. Astride s'était endormie et bavait maintenant abondamment sur son pantalon. Attendri, il regarda pendant un long moment la fillette qui avait rejoins le pays des rêves, avant de regagner ses propres appartements, apaisé pour la première fois depuis plusieurs jours, et une large trace humide s'étalant sur sa jambe gauche.
Valentin, qui avait été prévenu de ce retour inespéré en même temps que les autres gradés, conseillers, et courtisans, faisait les cents pas devant la porte de la chambre du Prince. Les mains croisées dans le dos, il se sentait bouillir et s'impatientait en attendant de voir arriver Lucas arriver.
— Alors ! Comment va-t-elle ?
— Elle va bien, ne t'en fais pas. C'est presque un miracle.
— Mais que s'est-il passé ?
— Je ne peux l'affirmer avec certitude, mais il est plus que probable qu'elle ait passé ces derniers jours en compagnie de la Princesse batarde du Royaume d'Ovra.
— Vous pensez qu'elle a passé cette semaine entière chez notre ennemie sans que rien ne se passe. Comment cela se pourrait-il ?
— Je n'en sais rien mon ami, je n'ai pas d'explications.
— Ne trouves-tu pas cela étrange que le nom de Tiliana d'Ovra revienne sans cesse alors qu'elle n'est finalement qu'une Sans Peuple.
— Si. Cela est très étrange, et j'ai le sentiment que ça ne va pas aller en s'arrangeant. Nous devons redoubler d'efforts, découvrir les plans d'attaque de Périphène avant qu'il ne soit trop tard, et capturer cette fille.
— Comment pouvons nous capturez quelqu'un dont nous ne connaissons que le nom ? S'enquit le jeune capitaine.
— Astride m'a fait une description d'elle. Bien qu'elle ne soit pas très précise, les caractéristiques qu'elle a évoquées sont plutôt rares, même pour une personne de son genre. Nous réussirons à l'identifier assez aisément, je le crois.
— Que proposez-vous ?
— Commençons par infiltrer le Royaume d'Ovra. Traçons une route qui soit assez sûre pour que notre armée puisse accéder à la forteresse du Roi Sorcier. Avec un peu de chance, nous pourrons nous infiltrer dans la cité et évaluer l'étendue des forces de Périphène avant que celui-ci ne nous porte le premier coup.
Valentin s'arrêta net.
— C'est de la folie ! Nous serons arrêtés par les patrouilles dès que nous aurons franchi la frontière. Et quand bien même ce n'était pas le cas, nous devrions traverser les grandes plaines désertiques avant d'arriver aux montagnes de Gramenbord, et à la forteresse de Sarock. Nous n'y arriverons pas.
— Si. Nous pouvons y arriver. Si nous ne sommes que deux, nous passerons plus facilement inaperçu. Pour ce qui est d'entrer dans la cité pour arriver à la forteresse de Sarock, déguisons-nous en simple paysans et cachons nos visages sous des capuches. Ils ne nous reconnaitrons pas...
— Le roi n'approuvera jamais un tel plan.
— Ecoutez, je ne vous obligerai pas à m'accompagner. Je partirai demain à l'aube, avec ou sans vous.
Valentin s'inclina légèrement.
— Vous savez bien que je ne vous laisserai jamais tomber. Vous êtes mon prince, mon ami et mon futur roi. Je vous suivrai où que vous alliez.
VOUS LISEZ
Tiliana d'Ovra - Les Sans Peuple
Paranormal*AUCUN PLAGIAT N'EST AUTORISE* Le Roi Pierre d'Arcin mène une politique sévère après des années de conflits avec son voisin, le Royaume d'Ovra dirigé le Roi sorcier Périphène. Dans la ville d'Erramore, capitale du royaume, les Sans Peuple nés de pa...